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Alliance à la conférence d’Abou Dhabi sur le patrimoine en péril

Un réseau international de refuges permettrait de mettre à l'abri des biens culturels menacés: ici un manuscrit ancien abîmé par des extrémistes islamiques à Tombouctou, au nord du Mali (archives). KEYSTONE/AP/BABA AHMED sda-ats

(Keystone-ATS) La France, les Emirats arabes unis et l’Unesco ont lancé un vibrant appel vendredi à l’ouverture à Abou Dhabi d’une conférence internationale sur la protection des biens culturels menacés. Objectif: créer un réseau international de “refuges” pour les mettre à l’abri.

L’événement, “historique”, a été organisé à l’initiative des Emirats arabes unis et de la France. Il réunit des représentants d’une quarantaine de pays, dont la Suisse.

“Nous travaillons ensemble pour lancer une initiative mondiale (…) pour protéger le patrimoine culturel en péril”, a déclaré Mohammed Khalifa al-Moubarak, président de l’Autorité du tourisme et de la culture d’Abou Dhabi. “Nous sommes aujourd’hui à un tournant historique qui nous dicte de travailler ensemble pour préserver le patrimoine et les cultures du monde”, a ajouté le responsable émirati.

“(C’est) le temps de la mobilisation internationale: acteurs privés et publics réunis au service de la protection du patrimoine menacé par les guerres, la barbarie et le terrorisme”, a lancé pour sa part l’ex-ministre français de la culture Jack Lang. Il a souhaité que la conférence soit clairement “tournée vers l’action”.

Fondation envisagée à Genève

Cette initiative a pour objectifs de créer un fonds de 100 millions de dollars et un réseau international de “refuges” pour mettre à l’abri des biens culturels menacés. La Suisse va d’ailleurs présenter son concept de refuge, premier du genre.

Le fonds serait constitué sous la forme d’une “entité juridique indépendante”, selon un document préparatoire qui évoque une “fondation de droit suisse” susceptible d’être établie à Genève dès 2017.

Il pourrait bénéficier d’incitations fiscales et s’inspirer des statuts du “Global Fund”, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, fondation à but non lucratif basée aussi à Genève, selon une source française.

La conférence d’Abou Dhabi s’achèvera sur l’adoption d’une déclaration politique qui demandera au Conseil de sécurité de l’ONU d’appuyer les objectifs fixés, selon un projet de texte.

“Crime de guerre”

Prenant ensuite la parole, Irina Bokova, directrice générale de l’Unesco, a prévenu que “jamais dans l’histoire récente, le patrimoine de l’humanité n’a été détruit comme actuellement en Irak et en Syrie”. Elle a qualifié de “crime de guerre” la destruction “délibérée” du patrimoine qui, selon elle, s’apparente à du “nettoyage culturel”.

“Le patrimoine nous rassemble et c’est pour cette raison que certains cherchent à le détruire”, a encore dit Mme Bokova. “La protection du patrimoine est inséparable de la protection des vies humaines”, a-t-elle souligné en insistant sur la nécessité d’une action collective. “Pour réussir, nous devons travailler ensemble”, a dit Mme Bokova.

Saccages au nom de l'”idolâtrie”

Cinquante-cinq sites sur 1052 biens dans le monde figurent actuellement sur la liste du patrimoine mondial “en péril” de l’Unesco. La communauté internationale s’est indignée ces dernières années des saccages commis par des djihadistes, notamment en Syrie, en Irak, en Afghanistan et au Mali au nom d’un combat contre “l’idolâtrie”.

La conférence se clôturera samedi par l’adoption d’une déclaration politique en présence du président français François Hollande et de l’homme fort des Emirats, cheikh Mohamed ben Zayed. La réunion se déroule en marge des travaux d’achèvement du Louvre d’Abou Dhabi, voulu comme “le premier musée universel dans le monde arabe” et un “symbole de tolérance”.

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