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Berne favorable à une séparation entre armée birmane et économie

La Suisse salue les efforts de la Mission d'établissement des faits sur la Birmanie présidée par Marzuki Darusman sur les intérêts économiques de l'arme birmane. KEYSTONE/SALVATORE DI NOLFI sda-ats

(Keystone-ATS) La Suisse est favorable à une séparation entre l’armée birmane et l’économie de ce pays. Mardi à Genève, au lendemain d’un rapport accablant sur ces liens, elle a demandé aux sociétés actives en Birmanie de se conformer aux droits de l’homme.

Devant le Conseil des droits de l’homme, elle a salué les efforts de la Mission d’établissement des faits de l’ONU sur cette question. Dans un rapport lundi, celle-ci avait détaillé les intérêts économiques de l’armée, qui contrôle plus de 100 entreprises.

Au total, 45 sociétés et organisations ont de leur côté donné plus de six millions de dollars aux militaires pour lancer les violences de 2017 contre les Rohingyas. Des dizaines d’entreprises étrangères ont fait affaire avec elle et celles de plusieurs pays lui ont vendu des armes. La Suisse est aussi “gravement” inquiète des allégations de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre, notamment en lien avec les violences sexuelles contre la minorité musulmane.

Devant la presse, le président de la Mission Marzuki Darusman a estimé mardi que la responsabilité d’Aung San Suu Kyi reste une “question ouverte”. Il estime “probable” que la Prix Nobel de la paix ne savait pas que l’armée allait lancer une offensive qui allait faire des milliers de victimes. Et provoquer le déplacement de quelque 740’000 membres de la minorité musulmane.

Mais la cheffe du gouvernement n’a pas cherché ensuite à éviter la situation et établir des responsabilités. Pour autant, seule une instance judiciaire pourrait décider d’une éventuelle “culpabilité”, ajoute M. Darusman. Il explique que les chefs de l’armée ont dit qu’il avaient mené “une consultation” avec Mme Suu Kyi sur tout ce qu’ils faisaient. Il faudra le “clarifier”, dit-il.

Efforts par la Gambie

Jusqu’à présent, la Mission n’a mis en cause nommément que six hauts responsables de l’armée qui devraient être poursuivis, selon les enquêteurs, pour génocide. Mais elle estime que la responsabilité de l’Etat est engagée et que celui-ci devrait en répondre devant la Cour internationale de la justice (CIJ). Des efforts sont menés par la Gambie pour une possible demande de saisir cette juridiction.

La partie civile de l’Etat birman a un rôle dans la détérioration encore davantage des droits de l’homme depuis un an, a fait remarquer un autre membre de la Mission, Christopher Sidoti. “Il sera de plus en plus impossible” pour elle “d’échapper à une responsabilité pénale internationale”, a-t-il ajouté.

La seule question est “où et quand”, a renchéri sa collègue Radhika Coomaraswamy. De son côté, la rapporteuse spéciale Yanghee Lee a alerté sur l’augmentation des détenus politiques.

La Mission a fait suivre au nouveau Mécanisme d’enquête international indépendant ses données pour la préparation de dossiers pour des juridictions pénales. Mais elle estime, comme certains Etats, qu’un format supplémentaire devra accompagner celui-ci tant qu’il n’est pas entièrement opérationnel depuis Genève.

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