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Les soucis de l’économie suisse

Comment la Suisse va renégocier ses liens commerciaux avec la Grande Bretagne après sa sortie de l’UE? Keystone

Beaucoup de questions restent en suspens après la décision du Royaume-Uni de sortir de l’Union européenne. Mais une chose est sûre, le Brexit aura des conséquences sur l’économie helvétique. Tour d’horizon.

Taux de change

La Banque nationale suisse (BNS) est intervenue sur le marché des changes pour empêcher le franc suisse de prendre l’ascenseur, alors que les investisseurs recherchent des placements sûrs. Comme l’euro et la livre sterling ont rapidement perdu pied, la BNS a eu recours à la planche à billets pour acheter d’autres devises.

Les réserves en devises étrangères de la Banque centrale ont dépassé les 600 milliards de francs le mois dernier. Un record pour la BNS, qui a aboli le cours plancher de 1,20 franc pour un euro en janvier 2015, précisément pour garder sous contrôle le montant de ses réserves en devises étrangères.

Pendant les 12 derniers mois, la monnaie suisse s’est échangée entre 1,09 et 1,11 francs pour un euro. A la suite du vote sur le Brexit, le taux de change a plongé à 1,06 franc avant que la BNS n’intervienne pour le maintenir à 1,08 franc. 

Comme la majeure partie des exportations suisses sont destinées à la zone euro, un franc à parité avec l’euro ferait exploser les prix des produits suisses sur le marché européen. Par ailleurs, le franc fort a déjà affecté le secteur du tourisme en Suisse. L’Office fédéral de la statistique a indiqué vendredi que les visiteurs étrangers en Suisse ont dépensé 3,4% de moins en 2015 qu’au cours de l’année précédente.

Les représentants de l’économie suisse ont réagi au Brexit en appelant la BNS à intervenir pour maintenir le franc au niveau le plus stable possible. Cependant, la plupart des analystes estiment que la volatilité actuelle ne sera que de courte durée.

Commerce avec la Grande-Bretagne

L’an dernier, les exportations des entreprises helvétiques vers la Grande Bretagne se sont élevées à quelque 11,7 milliards de francs, alors que les sociétés suisses ont importé des produits pour une valeur de 6,6 milliards de francs (sans prendre en compte les bijoux et les métaux précieux). Ce qui fait du Royaume-Uni le cinquième pays de destination des exportations suisses et le huitième plus important pays importateur en Suisse.

La Grande-Bretagne ne reçoit toutefois que 6% de toutes les exportations suisses. Par ailleurs, des économistes de Credit Suisse ont souligné que la moitié des exportations suisses vers le Royaume-Uni proviennent de l’industrie pharmaceutique et chimique, qui n’est pas sensible aux fluctuations des prix.

Alexis P. Lautenberg, le président de la Chambre de commerce Suisse-Royaume-Uni, a indiqué au journal Le Temps que le secteur du luxe est celui qui risque de souffrir le plus. La Fédération horlogère suisse considère aussi que le vote sur le Brexit est une mauvaise nouvelle pour la branche. Swissmem, l’association faîtière de l’industrie suisse des machines, équipements électriques et métaux se dit également inquiète. Tandis que les craintes de l’organisation economiesuisse concernent plutôt une possible récession au Royaume-Uni. Ce qui aurait pour effet de réduire la demande de biens.

Une grande question reste sans réponse: comment la Suisse va renégocier ses liens commerciaux avec la Grande Bretagne après sa sortie de l’UE?

Commerce avec la Grande-Bretagne

En tenant compte de la Grande-Bretagne, 55% de toutes les exportations suisses sont destinées à l’Union européenne, ce qui fait de celle-ci le partenaire commercial le plus important de la Suisse.

Les exportateurs suisses s’inquiètent en particulier de l’impact du Brexit sur la monnaie unique. Celle-ci pourrait être affaiblie sur le long terme, en particulier face au franc, qui lui-même devrait se renforcer en raison de son rôle de valeur refuge.

Il n’est pas aisé d’évaluer la puissance économique future de l’UE sans le Royaume Uni. L’Union pourra certes toujours compter sur la puissante économie allemande. La Grande-Bretagne reste néanmoins l’un des poids lourds ayant compensé ces dernières années les performances d’économies plus faibles telles que le Portugal ou la Grèce.

D’aucuns craignent par ailleurs un possible effet-domino avec d’autres pays qui pourraient être tentés de quitter le club européen. Avec à la clé une menace sérieuse pour l’ensemble du projet européen. S’exprimant vendredi, le président de la Confédération Johann Schneider-Ammann n’a pas caché cette insécurité pesant sur le futur du développement économique de l’UE. Une hypothèque qui affectera également la Suisse.

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Dilemme politique

Le Brexit augmente aussi l’incertitude s’agissant des relations politiques futures entre la Suisse et l’UE. Celles-ci ont été mises à mal par l’acceptation par le peuple suisse en février 2014 d’une initiative visant à limiter l’immigration en Suisse, une mesure qui violerait la libre-circulation des personnes entre la Confédération et les pays de l’UE.

Le gouvernement doit faire appliquer cette décision populaire d’ici à février 2017. Or, une solution politique avec Bruxelles a été empêchée jusqu’ici en raison du refus de l’UE de négocier sur la question avant le vote britannique. Désormais, Bruxelles devra gérer le Brexit et ne devrait pas être trop encline à consacrer du temps à régler le problème suisse.

Il s’agit d’un problème de plus pour l’économie suisse: la Suisse est un lieu prisé par les multinationales étrangères, dont les filiales suisses contribuent pour moitié aux rentrées fiscales de la Confédération provenant des entreprises.

Ces multinationales n’avaient pas goûté le vote de 2014, estimant qu’il pourrait rendre plus difficile le recrutement de main-d’œuvre qualifiée. Or, les associations économiques s’inquiètent maintenant du fait que le Brexit pourrait réduire à néant les efforts pour raccommoder les relations Suisse-UE.

(Traduction de l’anglais: Katy Romy et Federico Bragagnini)

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