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Les casinos et les loteries suisses raflent largement la mise

Loi jeux d argent, Pascal Vuichard
Les opposants ne s'attendaient pas une telle défaite, à l'image de Pascal Vuichard, co-président des jeunes Verts Libéraux, qui suit les résultats depuis le QG de la campagne pour le non. Keystone

La crainte d’une «censure» d’internet et la mobilisation des jeunes politiciens n’ont pas suffi à faire capoter la Loi sur les jeux d’argent. L'objet a été accepté par 72,9% de oui. La participation est faible: 34%.

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72,9% de Suisses ont soutenu dimanche la nouvelle loi sur les jeux d’argentLien externe. Les sections de jeunes des partis politiques qui avaient lancé un référendum repartent les mains vides.

En Suisse latine, l’acceptation tourne au plébiscite dans le canton de Vaud (88,3%) et des scores de plus de 80% sont observés à Neuchâtel, Genève, dans le Jura, au Tessin et à Fribourg. A l’inverse, les cantons les plus tièdes ont été Soleure, Schwytz et Zurich, qui disent tout de même oui à 63 ou 65%.

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Les premières réactions du Conseil fédéral sur les votations du jour


«L’argent ne fait pas tout»

Ce score très net montre «l’attachement des Suisses au modèle actuel», a affirmé Jean-Luc Moner-Banet, directeur de la Loterie romande. «Nous nous attendions à un résultat positif, mais pas à un oui d’une telle ampleur», a-t-il poursuivi, rappelant que «c’est la troisième fois en 20 ans que le peuple dit vouloir des jeux d’argent qui soient attractifs et qui servent des objectifs d’utilité publique».

«Il est heureux que l’argent ne fasse pas tout en politique. Il ne faut pas que la démocratie suisse soit influencée par des moyens financiers provenant de milieux plus que douteux», a dit de son côté à la radio-télévision publique RTS Jean-René Fournier, président de la Loterie romande. Il réagissait aux révélations selon lesquelles la campagne de votation a été financée par des fonds provenant de plateformes étrangères.

L’argent restera en Suisse

Au niveau politique, le député libéral-radical Philippe Bauer, coprésident du comité pour des jeux au service de l’utilité publique, salue notamment le fait que les bénéfices des jeux resteront en Suisse. Il est rejoint sur ce point par le Parti socialiste, seul parti avec les démocrates-chrétiens qui soutenait ouvertement la Loi. Les revenus des casinos ne pourront ainsi plus s’échapper dans des oasis fiscales.

L’acceptation de la loi démontre que les Suisses souhaitent renforcer le système des retraites grâce aux revenus des jeux en ligne tout comme le sport et la culture, écrivent les socialistes. La population n’entend pas considérer internet comme une zone de non-droit.

Tant pour Philippe Bauer que pour le PS, la loi renforce la prévention des addictions de manière satisfaisante. Les casinos se sont engagés à affecter 0,5% de leurs bénéfices à la protection, a rappelé Philippe Bauer. Et tous les milieux seront représentés dans les groupes chargés de la prévention, a-t-il assuré.

«On verra bien…»

Dans le camp des vaincus, le député libéral-radical Philippe Nantermod, membre du comité référendaire, attend de voir si la Confédération parviendra à récupérer l’argent qui file vers les offres en ligne non autorisées. «On va voir une nouvelle fois à coup sûr que le blocage ne sert à rien», a-t-il déclaré à l’ats. La polémique sur l’origine du financement de la campagne ne change rien à ce problème de fond.

Le Valaisan n’a d’ailleurs pas manqué de dénoncer la disproportion de moyens dans la campagne. Le camp du oui a bénéficié pour moitié de l’argent des casinos qui appartiennent majoritairement à des groupes étrangers. On peut donc discuter de l’origine des fonds, a-t-il souligné, sachant que le comité de campagne pour le oui à la loi a pu miser sur 3 millions de francs contre un demi-million pour le non.

Kevin Morisod, coprésident des Jeunes Verts suisses, s’est également dit déçu par l’ampleur du oui du peuple. La perte d’argent en jeu pour l’AVS, la culture et le sport, à savoir un milliard de francs, a sans doute fait pencher la balance dans l’opinion publique.

Les Jeunes Verts comptent désormais sur les ordonnances d’application de la loi, actuellement en consultation. «On veut des garanties notamment en matière de prévention de l’addiction au jeu», selon le jeune Vert. Il ne faut pas laisser ce domaine au monde du jeu, estime Kevin Morisod.

«Blocages» sur internet

Avec la nouvelle loi, les sociétés de loteries pourront offrir de nouvelles formes de paris sportifs et les casinos suisses proposer aussi des offres sur internet. Les joueurs qui veulent jouer au poker ou à la roulette sur un site étranger seront en revanche redirigés vers une page les avertissant que cette offre n’est pas légale en Suisse.

Les cantons pourront autoriser des petits tournois de poker et éviter les loteries et jeux illégaux. Protection des joueurs et prévention contre l’addiction seront renforcées. Comme les maisons de jeu, les sociétés de loterie devront exclure les personnes dépendantes. Les joueurs de loto ne devront en revanche plus payer d’impôts sur les gains inférieurs à un million de francs.


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Et le petit poker entre amis?

Les adeptes des petits tournois de poker savent déjà à quelle sauce ils pourraient être mangés. Le gouvernement a en effet déjà mis en consultation les modalités d’application de la Loi sur les jeux d’argent.

Ainsi, les jeux de casino, les loteries et les paris sportifs continueront d’être soumis au régime de l’autorisation. Elle permet aussi les jeux en ligne de type roulette ou poker.

En revanche, les jeux d’argent pratiqués en famille ou entre amis ne nécessiteront pas d’autorisation. Mais des conditions sont posées. Les mises d’argent devront être sans danger. Pour chaque tournoi, la mise de départ ne pourra excéder 200 francs et la somme totale des mises de départ ne devra pas excéder 20’000 francs. Il sera interdit d’organiser plus de trois tournois par jour et par lieu.

Ces tournois devront avoir lieu dans un cercle privé avec un nombre restreint de joueurs. Ceux-ci devront se connaître, ce qui sous-entend des parties en famille ou entre collègues de bureau. Par contre, les jeux proposés sur une plateforme exploitée à titre professionnel ou dans le cadre d’une offre automatisée ne seront pas considérés comme privés.

(ats)

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