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Elections fédérales: cap sur le vote électronique

Etape après étape, le vote électronique va de l'avant. Keystone

Participer électroniquement aux élections fédérales reste une des principales revendications des Suisses de l’étranger. Le vote électronique ne sera pas encore généralisé en octobre 2011, mais des essais pourraient avoir lieu dans certains cantons.

Depuis longtemps déjà, les Suisses de l’étranger peuvent participer par correspondance aux votations et aux élections qui se déroulent dans leur mère-patrie. Mais ils souhaitent que cette participation ne se fasse plus uniquement sur le traditionnel support en papier, mais directement à partir d’un ordinateur.

C’est ainsi que depuis plusieurs années, au fil de leurs réunions, les différentes organisations d’expatriés ainsi que leur organe faîtier, l’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE), appellent de leurs vœux la mise en place du «vote électronique».

Poste parfois en retard

Cette demande se justifie du fait que les services postaux connaissent des retards importants dans certains pays, ce qui empêche les expatriés de voter. «Ici, le courrier est parfois délivré avec des mois de retard. On risque ainsi de recevoir notre matériel alors que l’issue du scrutin est déjà connue», témoigne par exemple Pierino Lardi, un Suisse installé au Venezuela.

Selon le directeur de l’OSE, Rudolf Wyder, ce problème est encore plus aigu lors des élections fédérales, car le délai d’envoi du matériel de vote est plus serré que lors des votations. «Et c’est vraiment difficile lorsqu’il faut organiser un 2e tour, qui a lieu trois semaines après le 1er tour, précise-t-il. Le temps n’est pas suffisant pour que le matériel soit envoyé et retourné. Il s’agit là d’un handicap pour les Suisses de l’étranger qui ne pourra être levé qu’avec le vote électronique.»

Rudolf Wyder est par ailleurs convaincu que l’introduction généralisée du vote électronique augmentera la participation des expatriés aux scrutins nationaux. «Aujourd’hui déjà, un Suisse de l’étranger sur quatre vote et l’introduction du vote électronique devrait certainement augmenter cette participation. Je ne veux toutefois pas spéculer sur l’ampleur de cette augmentation.»

Et le directeur de l’OSE de conclure: «Plus vite le vote électronique arrivera, mieux ce sera».

Déjà de nombreux essais

Les revendications de l’OSE ne sont toutefois pas restées sans effets. La Confédération s’est lancée depuis plusieurs années dans l’expérience du vote électronique et trois cantons-pilotes (Neuchâtel, Genève et Zurich) ont réalisé pas loin d’une vingtaine d’essais grandeur nature chacun.

Plusieurs autres cantons se sont joints à l’expérience en adoptant le système de Zurich ou celui de Genève. Le modèle neuchâtelois n’a en revanche pas été repris ailleurs. En effet, à Neuchâtel, le système informatique n’est pas uniquement consacré au vote électronique, mais s’englobe dans une offre plus vaste appelée «guichet unique» qui permet, notamment, de remettre sa déclaration d’impôt ou d’obtenir certains documents officiels directement en ligne.

Quoi qu’il en soit, l’expérimentation va de l’avant. Après des essais pilotes à Genève, à Neuchâtel et à Zurich, une nouvelle phase d’essais élargis a démarré en 2008. C’est ainsi que lors des dernières votations fédérales du 13 février, douze cantons ont procédé à de nouveaux essais «qui se sont déroulés sans problème», relève la Chancellerie fédérale dans un communiqué. Cette dernière précise encore que «les essais de vote électronique ont entièrement satisfait aux exigences de la Confédération».

Un coup de frein…

Dans ces conditions, on pourrait donc s’attendre à ce que tout soit prêt pour un essai lors des élections fédérales d’octobre. Eh bien non. Deux des cantons-pilotes, Genève et Zurich, ont annoncé qu’ils ne procéderaient pas à de nouveaux tests au mois d’octobre sur leur sol.

A Genève, on avance des problèmes juridiques. Le canton ne possède pas encore une base légale suffisante. Ce problème sera prochainement résolu, mais dans l’intervalle, pas question de se lancer pour les élections fédérales. Celles-ci représentent une échéance politique trop importante pour risquer d’être entachées par des recours.

Cependant, le système genevois pourrait être tout de même testé cet automne, mais dans le canton de Bâle-Ville, qui pourrait l’utiliser pour le vote des Bâlois de l’étranger.

A Zurich, la suspension des essais est liée à des questions de coûts, mais également à des problèmes techniques. A Neuchâtel enfin, qui ne connaît pas de problèmes particuliers, on considère également qu’il est prématuré de se lancer pour les élections fédérales pour des raisons techniques.

«Pour une votation, il suffit de répondre par oui ou par non. Pour une élection, avec les possibilités de panachage, de biffage ou de cumul, c’est techniquement beaucoup plus compliqué», explique Séverine Despland, chancelière du canton de Neuchâtel.

… mais pas d’arrêt

Pour autant, l’expérience du vote électronique devrait se poursuivre. «Notre objectif est de réaliser des essais d’élections électroniques au niveau communal en 2012, précise Séverine Despland. De toute façon, la Confédération demande d’abord des essais au niveau local avant de passer au niveau fédéral.»

Du côté de la Chancellerie fédérale, justement, on assure que les essais vont se poursuivre. «Certains articles parus récemment suscitent des interrogations quand à l’avenir du projet. Force est de constater que, le sujet étant complexe, tout compte-rendu abrégé provoque des malentendus», précise-t-elle.

L’objectif de la Chancellerie fédérale est qu’une poignée de cantons proposent pour la première fois le vote électronique lors des élections fédérales d’octobre 2011. Ils y travaillent intensivement. Le gouvernement s’exprimera sur la demande d’autorisation de ces cantons dans le courant du mois de juin 2011.

La Chancellerie fédérale poursuit donc la mise en œuvre de la stratégie du gouvernement sur le vote électronique approuvée par le Parlement en 2007. «Nous sommes contents de pouvoir ainsi répondre à un réel besoin des Suisses de l’étranger», souligne-t-elle.

La justice se penchera sur l’élection complémentaire du 6 mars 2011 qui doit désigner le remplaçant de la nouvelle ministre Simonetta Sommaruga à la Chambre haute.

Un Suisse de l’étranger a en effet déposé un recours en matière de droit de vote. Il affirme qu’en raison de l’envoi tardif du matériel de vote il n’a pas pu participer au scrutin.

La plainte sera traitée par le Tribunal administratif du canton de Berne.

Plusieurs partis politiques ont également dénoncé l’envoi tardif du matériel de vote. L’ordonnance sur les droits politiques stipule que le matériel de vote doit parvenir aux citoyens au plus tard cinq jours avant la date du scrutin.

1998: Le gouvernement publie Stratégie pour une société de l’information en Suisse, document dans lequel la question du vote électronique est abordée.

La Cinquième Suisse a fait de l’introduction du vote électronique l’une de ses priorités.

2000: Le gouvernement mandate la Chancellerie fédérale afin d’examiner la  faisabilité de l’introduction du vote électronique.

2001: Préparation du premier rapport sur le scrutin en ligne, et concluant que des essais concrets sont nécessaires.

2002: Le Parlement établi un cadre juridique afin de permettre aux cantons la mise en œuvre de tels essais.

2003: Premier essai cantonal à Genève.

2005: Neuchâtel et Zurich lui emboitent le pas. Les trois premiers cantons pilotes recourent chacun à des outils informatiques différents.

 

2006: Le gouvernement présente une mouture affinée de sa Stratégie pour une société de l’information en Suisse. Les conclusions positives sur le vote électronique qu’il contient encourage d’autres cantons à se lancer.

 

2009: Bâle-Ville et Genève paraphent un accord selon lequel Bâle a le droit d’utiliser le vote électronique genevois. En septembre, ils sont rejoint pas les cantons des Grisons, de St Gall, de Schaffhouse, d’Argovie, de Thurgovie, de Soleure et Fribourg qui optent pour une reprise du système zurichois.

2010: Berne, en tant que canton qui compte le plus grand nombre de communes de toute la Suisse signe à tour un accord avec Genève afin de pouvoir bénéficier de son outil informatique. Lucerne lui emboîte le pas.

2011: Lors du scrutin du 13 février, quelque 175’000 électeurs avaient la possibilité de recourir au vote électronique dans les cantons de Zurich, de Lucerne, de Fribourg, de Soleure, de Bâle-Ville, de Schaffhouse, de Saint-Gall, des Grisons, d’Argovie, de Thurgovie, de Neuchâtel et de Genève. D’autres cantons ont fait part de leur intérêt pour le vote électronique: la Chancellerie fédérale est actuellement en pourparlers avec eux.

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