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Emmanuel Macron, le choix des Suisses de France

Emmanuel Macron passe pour un candidat proche des préoccupations des Français. A vérifier à l'épreuve des faits. Keystone

L’Union des Associations Suisses de France tient ce week-end sa réunion annuelle à Vichy. L’occasion de prendre la température parmi les expatriés, à une semaine du 2e tour de l’élection présidentielle de leur pays d’adoption. Leurs préférences vont clairement à Emmanuel Macron, un choix qui semble surtout motivé par la volonté de faire barrage au Front national.

Pour leur 59e réunion annuelle, les Suisses de France ont cette année choisi la ville de Vichy, située en Auvergne, en plein centre du pays. Cette ville d’eau calme et pittoresque ne semble guère atteinte par la fièvre électorale du moment, qui tourne pourtant presque en boucle sur les chaînes d’informations télévisées et qui fait la une de tous les journaux.

En déambulant en ville, nulle trace de l’important rendez-vous électoral à venir. Pas de stands dans les rues, pas d’affiches. Un seul détail évoque les élections. Au détour d’une rue, une voix énervée de femme se fait entendre depuis un local minuscule. «C’est dégoûtant ce qu’on lui a fait. Il n’a pourtant tué ni fait tuer personne». Ce local est la permanence du parti «Les Républicains». Pas difficile dès lors de comprendre que l’on y ressasse la défaite de François Fillon.

Dans l’hôtel où les Suisses de France sont réunis, les élections ne sont pas non plus au cœur des conversations, ce qui est presque étonnant pour un observateur de l’extérieur. «Il y a peut-être un peu de lassitude. Nous sommes ici pour parler d’autre chose», explique Dominique Baccaunaud, du cercle de Guyenne et Gascogne. «J’ai des cousins en Suisse qui parlent plus de cette élection que moi», plaisante Marie Paul Guignard, du cercle de Besançon.

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Refus du Front national

Mais en leur posant directement la question, les participants à la réunion se montrent plus loquaces. Ce qui saute immédiatement aux yeux, c’est que le Front national ne fait pas recette auprès des Suisses de France. En tout cas, aucune des nombreuses personnes approchées a indiqué vouloir donner sa voix à Marine Le Pen lors du 2e tour.

«Les partisans du Front national sont presque introuvables parmi nous. De par leur culture politique, les Suisses ne sont pas très portés vers les extrêmes», indique Roger Sauvain, de l’Union helvétique de Lyon. «Il y a une vraie angoisse par rapport au Front national. La montée de Marine Le Pen perturbe beaucoup d’entre nous», ajoute Francis Weill, de l’Association de l’Hôpital suisse de Paris.

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L’idée d’une accession de Marine Le Pen à la présidence fait presque tressaillir certains Suisses. Et lorsqu’on leur fait remarquer que, compte tenu de la configuration politique actuelle en France, ce scénario est impossible ou pour le moins très hautement improbable, certains déclarent qu’ils seront inquiets jusqu’au tout dernier moment. Vraie inquiétude ou juste une petite envie de se faire peur? Mystère.

Défendre l’Union européenne

Pour justifier leur refus du Front national, les Suisses de France citent exclusivement des motifs d’ordre économique. Marine Le Pen au pouvoir signifierait une fermeture, un repli sur soi, du protectionnisme; autant de points qui se solderaient par une ruine du pays.

Mais c’est en fait l’hostilité affichée de Marine Le Pen à l’Union européenne qui les irrite tout particulièrement. «J’ai peur pour l’UE et il y a beaucoup de Suisses qui pensent comme moi», indique par exemple Margrit Bachmann, de Vichy.

«Le ‘Frexit’ n’est effectivement pas vendeur auprès de nous», renchérit Marie Paul Guignard. «Marine Le Pen a très peu de partisans parmi nous, car les Suisses de France sont très bien intégrés dans l’Union européenne», juge Martin Strebel, de Paris.

Un saut dans l’inconnu

Le 2e tour de la présidentielle, qui aura lieu le dimanche 7 mai, présente la particularité de ne pas compter de représentants des grands partis historiques qui se sont partagé le pouvoir ces dernières décennies. «C’est une élection très particulière qui pose beaucoup de question», note François Bodmer, de Clermont-Ferrand.

Il semble d’ores et déjà certain que la plupart des Suisses de France qui voteront – une grande partie d’entre eux possédant la double nationalité – accorderont leur voix à Emmanuel Macron. Certains sont persuadés qu’il est un bon candidat.

C’est notamment le cas de Francis Weill, qui avait déjà voté pour lui au 1er tour. «C’est le candidat du consensus à la suisse», note ce médecin parisien. Elisabeth Etchart est également convaincue que c’est un bon choix. «Les Français en ont assez du traditionnel clivage entre la gauche et la droite et Emmanuel Macron est le plus en phase avec leurs préoccupations», estime la présidente de l’Union suisse du Genevois.

Cependant, bon nombre des personnes interrogées par swissinfo.ch indiquent que le choix du candidat du mouvement «En marche» est avant tout un choix par défaut pour éviter Marine Le Pen. Car dans le fond, personne ne sait très bien qui est ce candidat de 39 ans, qui n’a jamais été élu, qui ne dispose pas d’un appareil de parti fort et dont les contours du programme restent assez flous.

«Emmanuel Macron, c’est un saut dans l’inconnu, résume Dominique Baccaunaud. Ce sera peut-être un tremplin pour réfléchir à une autre manière de faire de la politique, sinon on retombera dans les mêmes travers.»

Elections aussi à l’UASF

La réunion de l’UASF de Vichy a été l’occasion d’élire les douze membres qui représenteront la France au Conseil des Suisses de l’étrangerLien externe (CSE) lors de la prochaine législature.

Les élus sont (par ordre alphabétique): Jean-Paul Aeschlimann, Dominique Baccaunaud, Jean-Paul Beti, Jacques de Buffet, Christian Cornuz, Valéry Engelhard, Stéphanie Leu, Françoise Millet-Leroux, Daniel Plumet, Roger Sauvain, Vincent Tornare et Francis Weill.

Actuelle membre du conseil, Elisabeth Etchart a été élue conseillère suppléante. La personne élue à cette fonction nouvellement créée est destinée à remplacer un conseiller qui ne pourrait pas être présent à une séance du CSE. 

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