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La Suisse publie la liste des comptes dormants

Les 44 millions de francs d’avoirs non revendiqués déposés dans les banques suisses ont peu de chances d’être un jour réclamés par les descendants de leurs détenteurs originaux. Tel est l’avis d’un expert en la matière, alors que la Suisse vient de publier la liste de ces comptes.

Mercredi 16 décembre, l’Obudsman des banques suissesLien externe a publié les noms de 2600 titulaires de comptes dormants qui peuvent être consultés en ligne. Le siteLien externe ainsi créé répond aux exigences modifiées de la loi sur les banques qui sont entrées en vigueur au début de l’année.

Désormais, les banques suisses doivent publier le nom de tout client qui détient au moins 500 francs et avec qui elles n’ont plus eu de contact depuis 60 ans. La nouvelle disposition donne aux parents de un à cinq ans pour réclamer ces avoirs, qui comprennent aussi 80 cassettes au contenu inconnu. Passé ce délai, les fonds seront donnés à l’Etat.

«Ce sont les cas sans espoir. Ils sont tellement anciens et on a si peu de détails qu’il sera presque impossible à quiconque de réclamer ces avoirs», explique à swissinfo.ch David Laufer, co-fondateur de LMD Search, société basée à Lausanne. Lequel ne serait «pas surpris qu’au moins 80% de ces millions finissent dans les caisses de l’Etat».

Parmi les 2600 personnes dont les noms ont été fournis par les banques, beaucoup n’ont pas de date de naissance, ni de nationalité. On trouve même de nombreux cas où les numéros des comptes bancaires se sont perdus dans les brumes du temps.

David Laufer, dont la société travaille notamment pour le compte des banques, à rechercher des centaines de clients «perdus» ou leurs descendants, espère que les futures listes de comptes dormants (elles seront mises à jour chaque année) contiendront plus de détails sur les clients.

L’Association suisse des banquiers (ASBLien externe) a salué la publication de cette liste. Selon son directeur Claude-Alain Margelisch, elle «contribue à la sécurité juridique dans le traitement des avoirs en déshérence»

Des valises de billets

La question des comptes en déshérence poursuit les banques suisses depuis les révélations des années 90, où l’on apprenait que certaines détenaient des fonds de clients juifs tués pendant la Shoa. Cependant, l’ASB est persuadée que la liste qui vient d’être publiée n’a rien à voir avec cette affaire, réglée en 1998 à la suite de la plainte collective déposée aux Etats-Unis par les héritiers des titulaires des comptes.

Au contraire, la modification de la loi a été motivée par le besoin d’adapter le droit bancaire suisse à celui d’autres places financières sur la question des avoirs dormants. Et David Laufer voit une autre raison pour laquelle les banques veulent sortir les avoirs dormants de leurs comptes.

«L’époque des gens qui se présentaient dans une banque avec de faux papiers et des valises pleines de billets est révolue, affirme l’expert. L’environnement réglementaire a radicalement changé au cours des dernières années. De nos jours, les banques, qu’elles soient en Suisse ou n’importe où ailleurs, ne peuvent plus se permettre d’avoir des clients qui échappent à leurs radars».

«Pour une banque, ce n’est pas crédible de continuer à gérer les avoirs d’un client né en 1876 et dont on n’a plus entendu parler depuis un siècle. Elles sont mises sous une forte pression pour liquider de tels cas», ajoute David Laufer.

Depuis 1996, les personnes qui veulent récupérer les avoirs de leur famille peuvent s’adresser à l’Ombudsman des banques suisses. Selon l’ASB, entre 2001 et 2014, son office a réussi à retrouver 52 millions de francs et 42 cassettes, qui ont pu ainsi être rendus à leurs propriétaires légaux.

(Traduction de l’anglais: Marc-André Miserez)

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