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France: les opposants à la réforme du travail jouent leur va-tout

Le cortège parisien, qui a débuté vers 14h00, a rassemblé entre 18'000 et 19'000 personnes selon la police, 100'000 selon la CGT. Keystone/AP/FRANCOIS MORI sda-ats

(Keystone-ATS) Grèves et manifestations, pénurie de carburants, fronde étendue aux ports et aux centrales nucléaires: les opposants à la réforme du travail en France ont joué leur va-tout jeudi lors de la 8e journée de mobilisation pour tenter de faire plier le gouvernement.

Sous pression pour éviter une paralysie du pays à deux semaines de l’ouverture de l’Euro-2016 de football, le premier ministre Manuel Valls a laissé entendre jeudi la possibilité de “modifications” au texte. Il est “inacceptable” de “bloquer un pays” et de “s’en prendre ainsi aux intérêts économiques de la France”, a fustigé M. Valls devant les députés.

Valls recadre Sapin

Dans la matinée, il avait déjà dénoncé “l’irresponsabilité” de la CGT. Il avait aussi réaffirmé son refus de renoncer à cette dernière réforme clé du quinquennat du président François Hollande.

Il a également exclu de revenir sur son article le plus contesté, qui assouplit la législation sur le temps de travail en favorisant les accords d’entreprises, recadrant son ministre des Finances Michel Sapin qui venait d’avancer cette hypothèse.

“Quelle est aujourd’hui la position du gouvernement? Cela nous met dans l’embarras pour savoir à qui s’adresser”, a ironisé le patron du syndicat CGT. “Comme pour d’autres sujets, cela montre que le président (François Hollande) n’a plus la majorité”, a-t-il estimé.

Heurts et interpellations

Les syndicats CGT et FO ont appelé à une nouvelle journée de mobilisation jeudi, la huitième depuis mars, pour exiger le retrait de la loi Travail, qu’ils accusent de détruire les droits des salariés. Ces nouvelles manifestations ont réuni au moins 153’000 manifestants en France, selon les autorités, tandis que la CGT en a recensé le double, près de 300’000, soit une mobilisation en baisse par rapport à il y a une semaine.

Selon le ministère de l’Intérieur et la préfecture de police de Paris, 77 personnes ont été interpellées, dont 36 dans la capitale, et quinze policiers ou gendarmes ont été blessés. “Quatorze dépôts pétroliers ont été débloqués sans incidents”, a ajouté le porte-parole du ministère, Pierre-Henry Brandet. “Dans plusieurs villes, cette nouvelle journée d’action a été synonyme de grandes tensions”, a-t-il déclaré, estimant toutefois que le dispositif des forces de l’ordre avait “permis aux débordements d’être contenus”.

Le cortège parisien qui a débuté vers 14h00 a rassemblé entre 18’000 et 19’000 personnes selon cette dernière, 100’000 selon la CGT et FO. Des milliers de personnes se sont également mobilisées ailleurs en France, comme à Toulouse (6000 selon la police, 20’000 selon les organisateurs), Bordeaux (3000 à 13’000), le Havre (7400 à 30’000), Clermont-Ferrand (1550 à 7000), Saint-Nazaire (2500 à 4500), Rouen (3300 selon la police), Lyon (3000).

Nouveauté et signe de l’ampleur du mouvement, les 19 centrales nucléaires de France, qui délivrent 75% de l’électricité du pays, ont été en grève. Dix d’entre elles ont diminué leur production, selon la CGT, qui prône “la généralisation” du conflit. RTE, gestionnaire du réseau français à haute tension, a assuré n’avoir “pas de problème d’alimentation électrique”.

Stations-service: un léger mieux

Le durcissement de la fronde, avec le blocage des sites pétroliers, a amené la France à puiser dans ses réserves stratégiques de carburant. Manuel Valls n’a pas exclu une réquisition d’employés dans les cinq raffineries au ralenti ou à l’arrêt, sur les huit du pays.

Un léger mieux se dessinait dans l’approvisionnement des près de 12’000 stations-service du pays. Une sur cinq ont affiché une rupture totale ou partielle de carburant, contre un tiers la veille. L’Union française des industries pétrolière (Ufip) a dit avoir constaté un moindre afflux des automobilistes aux pompes.

Toutefois, l’acheminement du pétrole restait compliqué du fait d’arrêts de travail dans “la plupart des ports”, selon la CGT. Des files d’attente ont persisté dans certaines stations.

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