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L’industrie du tourisme face au dilemme du climat

Davos, une station directement menacée par le manque de neige. RDB

Officiels du tourisme, représentants des gouvernements, scientifiques, écologistes: ils sont 450 dans la station alpine de Davos pour débattre des changements climatiques.

Organisée par trois agences des Nations Unies, cette conférence de trois jours doit débattre des conséquences du réchauffement, mais aussi des moyens de réduire les émissions massives du secteur touristique.

A l’ouverture de la conférence, l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) a admis que le secteur était responsable de 4 à 6% des émissions totales de dioxyde de carbone.

En 2006, on a comptabilisé dans le monde 846 millions de personnes ayant visité un pays autre que le leur. Ce nombre n’inclut donc pas les déplacements touristiques à l’intérieur d’un pays.

L’OMT ne le cache pas: le tourisme est par nature mauvais pour le climat. Il suffit de penser uniquement aux émissions de CO2 des voitures, des cars, des bus et des avions, ou aux quantités d’énergie nécessaires pour chauffer ou pour climatiser les hôtels.

Et il y a plus inquiétant: selon l’agence onusienne, si rien n’est entrepris d’ici là, les émissions de CO2 du secteur touristique pourraient augmenter de 150% dans les 30 prochaines années.

«Le vrai enjeu, c’est de trouver des solutions pour les 50 prochaines années et de commencer à les mettre en œuvre tout de suite», explique à swissinfo Geoffrey Lipman, sous-secrétaire général et porte-parole de l’OMT.

La déclaration de Davos

«Il faut que les scientifiques, les défenseurs de l’environnement et les stratèges de l’industrie touristique travaillent ensemble», insiste Geoffrey Lipman. Et de ces travaux doit sortir un document, déjà baptisé Déclaration de Davos.

Celle-ci sera soumise à la conférence des ministres du tourisme à Londres en novembre, puis intégrée à la stratégie globale des l’ONU contre les changements climatiques, qui doit être négociée en décembre à Bali, pour prendre le relais du Protocole de Kyoto.

Les participants à la conférence de Davos vont plancher à la fois sur des modes de transports et d’hébergement respectueux des principes du développement durable, mais également sur des stratégie de survie pour les pays où de larges couches de la population vivent essentiellement du tourisme.

Paradis perdus

Aujourd’hui, les îles tropicales au parfum de paradis risquent de disparaître sous la montée des eaux et les stations des bords de la Méditerranée sont menacées par la sécheresse. D’un autre côté des centaines de stations de montagne pourraient faire faillite par manque de neige.

«A cet égard, le choix de Davos pour cette conférence est symbolique, note Francesco Frangialli, secrétaire général de l’OMT. C’est typiquement le genre de station qui est directement menacée».

Pour lui, l’important est d’assurer «la cohérence entre les actions entreprises pour lutter contre la pauvreté et celles visant à freiner les changements climatiques».

Car il dans de nombreux pays en voie de développement, le tourisme est un secteur économique important. «Ainsi, le tourisme est un des sources majeures de devises pour 46 des 49 pays les plus pauvres du monde», rappelle Francesco Frangialli

Droits d’émission

Côté suisse, Eric Scheidegger, directeur-adjoint du Secrétariat d’Etat à l’économie, a évoqué dans son discours d’ouverture la possibilité de mécanismes «souples» pour réduire les émissions de CO2.

Par exemple le commerce des droits d’émission et les projets de réduction dans les pays tiers. «Ces projets déploient leurs effets dans les pays émergents, où la protection du climat et le transfert de technologie sont les plus urgents et les plus efficaces», estime Eric Scheidegger.

«Politique à courte vue»

Cette conférence à Davos laisse le Groupe de travail tourisme et développement sceptique. «De notre point de vue, proposer la compensation du trafic aérien comme mesure principale pour lutter contre le changement climatique est une politique à courte vue», estime Christine Plüss, responsable de cette ONG installée à Bâle.

«Plaider pour l’ouverture de nouvelles zones au tourisme, comme le fait régulièrement l’OMT, ne peut pas non plus constituer une solution, ajoute-t-elle. De telles mesures ne sont pas non plus de nature à combattre la pauvreté dans ces régions».

swissinfo, Dale Bechtel à Davos
(Traduction et adaptation de l’anglais: Marc-André Miserez)

L’Organisation mondiale du tourisme a tenu son premier sommet consacré au changement climatique à Djerba (Tunisie) en 2003. Gouvernements, milieux d’affaires et société civile étaient de la partie. Il a donné lieu à la Déclaration de Djerba, qui établit un programme d’actions que le secteur du tourisme doit décliner dans le temps.

Le changement climatique est devenu un thème central pour les décideurs de la planète. Et dans les discussions en cours, le tourisme est un élément important.

L’Organisation mondiale du tourisme prévoit de revoir sa Déclaration de Djerba et d’explorer les différentes manières pour le tourisme de répondre aux priorités climatiques actuelles tout en respectant les Objectifs du Millénaire de l’ONU sur la pauvreté et le développement.

24 septembre: le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon lance un appel aux dirigeants de la planète pour qu’ils agissent rapidement afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique.
1-3 octobre: la deuxième conférence sur le changement climatique et le tourisme a lieu à Davos en Suisse.
12-17 novembre: la 17e session du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) se déroulera à Valence en Espagne.
3-14 décembre: les délégations de plus de 180 pays et ONG se réuniront à Bali sous l’égide de l’ONU pour tenter d’engager les négociations sur l’après-Kyoto.

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