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La loi est dépassée, estime le Forum Recherche génétique de l’ASSN

En Suisse, l'opinion publique n'est guère favorable aux OGM, et les agriculteurs eux-mêmes avaient soutenu la prolongation du moratoire (archives). KEYSTONE/LAURENT GILLIERON sda-ats

(Keystone-ATS) Pour le Forum Recherche génétique de l’Académie suisse des sciences naturelles, la loi sur le génie génétique (LGG) est dépassée. De nouvelles techniques de sélection végétale flirtant avec les OGM pourraient contribuer à l’agriculture suisse de demain, a-t-il plaidé.

Ces nouvelles techniques élargissent considérablement les possibilités en matière de sélection végétale. Elles contribueraient ainsi à une agriculture à la fois plus respectueuse de l’environnement et plus économique en Suisse, écrit le Forum dans une fiche d’information présentée jeudi devant la presse à Berne.

Du point de vue des sciences naturelles, aucune raison ne justifie une réglementation plus sévère que celle appliquée à la sélection conventionnelle, estiment les auteurs de ce document intitulé “Nouvelles techniques de sélection végétale pour l”agriculture suisse – Gros potentiel, avenir ouvert”.

Si la LGG part du principe que les méthodes du génie génétique sont liées à des risques particuliers, il est avéré aujourd’hui que, fondamentalement, ce n’est pas le cas, ont-ils ajouté. De ce fait, il est opportun d’adapter les dispositions légales à l’état actuel des connaissances, jugent-ils.

Techniques variées

A l’aide de ces techniques très variées, les sélectionneurs agissent toujours au niveau de l’information génétique de la plante pour en changer les propriétés. Mais en comparaison avec la sélection conventionnelle, elles sont nettement plus précises et rapides. En outre, de nouvelles propriétés sont intégrées dans les variétés sans que les propriétés existantes soient perdues.

L’expression “nouvelles techniques de sélection végétale” couvre de nombreuses méthodes différentes aux appellations hermétiques, cisgénèse, mutagénèse dirigée par oligonucléotide ou encore méthylation de l’ADN dirigée par ARN. Elles ont en commun le fait d’intervenir au niveau de l’information génétique, en modifiant la séquence de l’ADN ou la réglementation de son expression.

Un débat mondial a actuellement lieu pour déterminer si les variétés issues de ces techniques doivent être considérées ou non comme organismes génétiquement modifiés (OGM). Un besoin de clarification en la matière existe également en Suisse, notent les scientifiques.

La question centrale est de savoir si l’on débouche sur des plantes dont le matériel génétique modifié ne pourrait pas être retrouvé en conditions naturelles par croisement et recombinaison naturelle. Ce n’est que si l’on peut répondre par l’affirmative que les plantes doivent être qualifiées d’OGM au sens de la LGG.

Dans certains cas toutefois, des molécules d’acides nucléiques sont introduites temporairement, voire de manière permanente, dans la plante-cible, ce qui fait de ces techniques des méthodes de génie génétique susceptibles de transformer les plantes ainsi produites en OGM.

Moratoire jusqu’en 2017

Un moratoire sur les OGM est actuellement en cours en Suisse jusqu’en 2017 et va très probablement être prolongé jusqu’en 2021. Une nouvelle prolongation, une interdiction générale de culture d’OGM ou une coexistence de systèmes de cultures avec et sans OGM sont les options pour la suite.

Dans cette perspective, les auteurs évoquent diverses possibilités: utiliser la marge de manoeuvre de la loi actuelle en faveur des nouvelles techniques, compléter la liste des exceptions déjà prévues par l’ordonnance, voire procéder à un changement de paradigme en ne considérant plus que le produit final et non la méthode. Une modification profonde de la loi serait alors nécessaire.

“Du point de vue scientifique, le passage d’une réglementation basée partiellement sur les méthodes à une réglementation basée purement sur le produit de la sélection végétale est opportun”, écrivent les auteurs dans leur conclusion.

Le besoin global en produits alimentaires devrait augmenter d’environ 70% d’ici 2050, argumentent-ils. Ce développement concerne également la Suisse qui, en 2013, n’a produit elle-même que la moitié de son besoin en calories.

Le Forum était déjà venu dire devant les médias en 2013 que le moratoire n’est pas la bonne solution. Il avait déploré que les résultats du Programme national de recherche “Utilité et risques de la dissémination des plantes génétiquement modifiées” (PNR 59), qui s’est clos en 2012, ne soient pas suffisamment pris en compte par les autorités.

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