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Lausanne-Genève: le rail dépassé par la route?

Sur la route comme sur le rail, l'axe Lausanne-Genève est saturé. Keystone

Espérée par le monde politique et les pendulaires, la 3e voie ferroviaire entre les pôles de l'Arc lémanique n'est pas pour demain. La Confédération ne la financera pas.

Après le tollé suscité par cette décision, des solutions alternatives de financement émergent. Les partisans d’un développement de la route montent eux aussi au créneau.

Emblème de la collaboration entre les cantons de Vaud et de Genève, la 3e voie ne figure pas parmi les priorités du gouvernement suisse.

Présentés mercredi dernier, les objectifs de Berne en matière de développement ferroviaire jusqu’à 2030 ne mentionnent en effet pas ce projet destiné à améliorer la liaison entre les deux poumons économiques de la région lémanique.

Préparée – notamment par le ministre des transports Moritz Leuenberger qui avait révélé fin mars que cette voie n’était pas une priorité -, la gifle n’en a pas moins dopé la détermination des deux cantons.

Les ministres cantonaux vaudois François Marthaler et genevois Robert Cramer ont ainsi déclaré qu’ils ne se satisferont pas des aménagements envisagés par Berne. Soit la réalisation d’une quatrième voie entre Lausanne et Renens, l’adaptation des quais et l’augmentation des trains à deux étages.

Pour eux, c’est l’entier de l’argent non utilisé de Rail 2000 qui doit être mis à disposition, soit 7,5 milliards de francs, et non pas seulement 5 milliards comme le prévoit le projet fédéral. Vaud et Genève exigent par ailleurs que les dépassements de crédits liés au tunnel du Gothard fassent l’objet d’un financement spécifique de la Confédération.

Un projet «pingre»

Même si Ouestrail, l’association de défense des intérêts ferroviaires de Suisse occidentale, estime que la 3e voie Lausanne-Genève n’est qu’un dossier parmi d’autres tout aussi importants pour la Suisse romande, elle a relevé que le projet du Conseil fédéral est «boiteux et pingre.»

«Du point de vue de la fréquentation, cette 3e voie est peut-être plus importante que d’autres. Mais elle fait partie de nos priorités au même titre que la ligne du pied du Jura et l’aménagement à deux voies du tunnel de base du Lötschberg», souligne Jean-Claude Hennet, secrétaire général d’Ouestrail.

Côté fréquentation en effet, la ligne Lausanne-Genève est l’une des plus rentables de Suisse. Quant au trafic, certains scénarios prévoient une augmentation de 15% d’ici à 2015 et de 30% d’ici à 2030. Les spécialistes parlent à cet égard de ‘catastrophe programmée’.

«Rail 2000 a été voté il y a vingt ans. Entretemps, les besoins ont augmenté, poursuit Jean-Claude Hennet, l’offre ferroviaire n’est plus à la hauteur. Or il est nécessaire d’avoir un réseau ferroviaire performant et attractif dans l’ensemble du pays pour inciter à prendre le train»

Aspect écologique

Souvent mis en avant par les défenseurs de la 3e voie, le respect de l’environnement est également cher au président de la Ville de Lausanne, l’écologiste Daniel Brélaz. Il a pour sa part proposé que le canton de Vaud accorde un prêt contre remboursement de 200 millions de francs à la Confédération pour relancer ce projet.

Une idée que Moritz Leuenberger a trouvée digne d’intérêt, mais qu’Ouestrail ne voit pas d’un bon œil, du moins dans un avenir proche. «Le peuple a décidé qu’il appartenait à la Confédération de financer la deuxième étape de Rail 2000. Il n’y a pas de raison de puiser dans les caisses cantonales», fait remarquer Jean-Claude Hennet.

De leur côté, les partisans d’un développement de l’axe autoroutier entre Lausanne et Genève ont également donné de la voix.

Sur les ondes de la Radio suisse romande, le président de la section vaudoise de l’Automobile Club de Suisse (ACS) Claude Haldi a ainsi plaidé pour la construction d’une voie autoroutière supplémentaire, qui aurait l’avantage de pouvoir être construite plus rapidement qu’une voie ferroviaire.

Le boulet des surcoûts du Gothard

Tout en défendant la complémentarité des moyens de transport, Jean-Claude Hennet oppose à ce raisonnement les problèmes d’engorgement aux entrées de Lausanne et de Genève.

Un point de vue que partage également l’Association transports et environnement (ATE), pour qui la solution passe par le rail. A condition toutefois que les surcoûts du Gothard et des tunnels ferroviaires alpins n’handicapent pas le développement du réseau ferroviaire en plaine.

En consultation jusqu’à fin juin, les priorités du gouvernement risquent donc d’être remises en question, en particulier en Suisse romande. Au Parlement, une coalition pourrait contraindre le Conseil fédéral à revoir sa copie, à condition que tous les parlementaires romands montent dans le même train.

swissinfo, Carole Wälti

En 1998, le peuple suisse a voté une enveloppe globale de 30 milliards de francs pour la réalisation des projets d’infrastructure des transports publics (fonds FTP).

Ce fonds englobe les Nouvelles lignes ferroviaires à travers les Alpes (NLFA), Rail 2000, le raccordement au TGV et les mesures antibruit.

Le solde de ce fonds se monte à 7,5 milliards de francs. Berne, dans son projet, a ramené ce montant à 5 milliards de francs.

Cet argent servira à financer une trentaine de mesures de développement du réseau des chemins de fer.

Le but des investissements prévus est notamment de réduire les temps de parcours entre la Suisse occidentale et la Suisse orientale et de garantir les capacités pour transférer sur le rail le trafic des marchandises traversant les Alpes.

D’ici 2030, cinq milliards seront consacrés aux grands projets d’infrastructure ferroviaire.
Près de trois milliards seront investis en Suisse occidentale, sur le Plateau et dans le nord-ouest du pays.
Un milliard servira à la région zurichoise et à la Suisse orientale.
Enfin 800 millions seront engagés entre Zurich et Lucerne ainsi que dans la région du Gothard.

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