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Le GSsA met la pression sur le financement du commerce de guerre

Des petits chars d'assaut sur roulettes ont emmené les cartons de signatures à la Chancellerie fédérale. KEYSTONE/ANTHONY ANEX sda-ats

(Keystone-ATS) Le peuple votera sans doute sur le financement des producteurs de matériel de guerre. Le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) a déposé jeudi à Berne son initiative populaire pour que la place financière suisse ne soit plus complice du commerce des armes.

Le texte, muni de 104’902 signatures, a été remis à la Chancellerie fédérale à Berne. Le texte “Pour une interdiction du financement des producteurs de matériel de guerre” exige que la Banque nationale suisse (BNS), les caisses de pension et les fondations renoncent à investir dans l’industrie d’armement. Et ce qu’elle soit basée en Suisse ou à l’étranger.

La BNS à elle seule disposait à la fin de l’année dernière d’une participation de près de deux milliards de francs dans des producteurs américains d’armes nucléaires, affirme le GSsA. Les caisses de pensions sont également dans le viseur des initiants.

Elles “financent aussi la production d’armes utilisées lors de conflits au cours desquels les droits des peuples sont systématiquement bafoués, tel qu’actuellement au Yémen. Cette situation doit cesser. La Suisse doit contribuer à la paix”, a déclaré Youniss Mussa, co-secrétaire romand du GSsA.

Législation lacunaire

Selon l’initiative populaire, l’octroi d’un crédit, d’un prêt, d’une donation à une entreprise dont plus de 5% du chiffre d’affaires vient de la production de matériel de guerre serait interdit. Idem de la prise de participation et de l’acquisition de titres émis par l’industrie de l’armement. Les équipements de déminage humanitaire, les armes de chasse et de sport (dont les munitions) ne sont pas considérés comme du matériel de guerre.

La loi fédérale sur le matériel de guerre interdit déjà le financement direct et indirect de matériels de guerre prohibés. Mais elle est selon les initiants facile à contourner. Le financement indirect n’est en effet pas considéré comme une infraction tant qu’il n’y a pas volonté de contourner le financement direct: une zone grise très difficile pour les autorités pénales.

D’où la nécessité de compléter la législation actuelle et de compléter la Constitution. Les banques et assurances ne sont pas concernées, mais la Confédération s’engage à mettre en place des conditions similaires pour celles-ci aussi bien en Suisse qu’à l’étranger.

Entrave à la liberté économique

Le comité d’initiative compte notamment les conseillers nationaux Lisa Mazzone (Verts/GE), Ada Marra (PS/VD) et Balthasar Glättli (Verts/ZH), ainsi que le sociologue genevois Jean Ziegler. Le texte est soutenu par les Jeunes Verts, le PS et 39 autres organisations.

Après la décision du Conseil fédéral la semaine dernière d’autoriser les exportations d’armes vers les pays en conflit, l’initiative tombe à point nommé, selon le comité d’initiative. “La population ne veut pas attiser les guerres; elle veut au contraire que la Suisse contribue à des solutions aux conflits”.

Le GSsA a déjà échoué devant le peuple en 2009 avec une initiative semblable, qui voulait interdire les exportations de matériel de guerre. Le texte avait été rejeté par 68,2% des votants.

Cette nouvelle initiative est d’ores et déjà rejetée par le Cercle de travail sécurité et techniques de défense (cstd) qui réunit 70 personnalités des milieux politique, économique et civil. Pour lui, le texte porte atteinte à la liberté économique et ouvre la voie à d’autres limitations dans différents secteurs.

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