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Le quotidien le plus lu de Suisse est un gratuit

Il est gratuit, et il faut parfois se battre pour en avoir un. Keystone

Le journal gratuit 20 Minuten renforce sa position de leader du marché. Le quotidien alémanique frise le million de lecteurs et rafle les annonces publicitaires.

En Suisse romande, seuls le quotidien de boulevard Le Matin, Le Nouvelliste (Valais) et La Côte (Vaud) sont en progression. Tous les autres reculent.

Malgré le recul de la plupart des titres traditionnels, les Suisses restent, en comparaison internationale, très friands de journaux. Environ 91% de la population lit au moins un quotidien et 93% se penche régulièrement sur un magazine.

C’est ce qui ressort de l’analyse du lectorat suisse en 2005, publiée mardi par l’Institut de recherches et d’études des médias publicitaires (REMP). Ces chiffres ne traduisent pas le tirage des journaux, mais une estimation du nombre de leurs lecteurs, d’après un sondage mené d’avril 2004 à mars 2005 auprès de 23’813 personnes dans les trois régions linguistiques du pays.

20 Minuten caracole en tête

En tête du classement national, 20 Minuten brûle toujours la politesse au Blick. Il a gagné 166’000 lecteurs, à 948’000 contre 19’000 pour le quotidien de boulevard, lu par 717’000 Alémaniques. Cette forte progression du journal gratuit est essentiellement due à l’élargissement en juin 2004 de son rayon de distribution à la Suisse centrale.

Le Tages-Anzeiger, de Zurich, occupe toujours la 3e place avec 567’000 lecteurs potentiels (-6000). Le Bund (-21’000 à 405’000) est 4e devant la Mittelland Zeitung (+8000 à 389’000) et la Neue Zürcher Zeitung, 7e, élargit son lectorat de 12’000 personnes à 341’000.

Le quarté romand

Le quarté de tête des journaux romands reste inchangé. Premier et 6e au niveau national, Le Matin est le seul quotidien à enregistrer une hausse de 22’000 lecteurs, passant à 353’000. Pour le REMP toutefois, cette progression n’est pas vraiment significative au vu de la marge d’erreur. Elle affiche plutôt une tendance.

En 2e position (10e sur le plan Suisse), 24 Heures enregistre un recul de 21’000, à 266’000. Mais là aussi, l’institut signale qu’il s’agit d’une simulation obtenue en supprimant les doublons, la nouvelle formule du quotidien vaudois ayant absorbé La Presse Nord Vaudois et La Presse Riviera/Chablais à fin février.

La Tribune de Genève se place à la 3e position (-12’000 à 175’000), suivie par Le Temps, qui enregistre une tendance à la baisse et perd 13’000 lecteurs à 129’000.

Dans la presse régionale, le recul est aussi sensible mais pas statistiquement parlant. Ainsi, en Valais, Le Nouvelliste gagne 6000 lecteurs à 111’000 et à Fribourg, La Liberté en perd 4000 à 90’000. Ailleurs également les variations sont minimes.

Au Tessin aussi, le numéro un est un gratuit: Il Caffè, qui gagne 19’000 lecteurs, à 125’000.

L’avenir aux gratuits?

Au vu de ces chiffres, et avec le lancement annoncé d’un gratuit par le géant romand Edipresse dans quelques mois, les journaux traditionnels ont-ils encore un avenir?

«20 Minuten est un produit très bien fait, bien ciblé pour une clientèle jeune, et qui sait très bien jouer de la complémentarité entre le journal et le site Internet», reconnaît Josef Trappel, professeur en sciences de la communication à l’Université de Zurich.

Point de vue partagé par Saverio Progano, directeur de l’agence Mediaedge à Lausanne. Pour lui, ce journal «correspond à une tendance actuelle, il donne une information vite lue. C’est une concurrence directe pour certains titres, mais pas pour les magazines, ni pour les quotidiens qui proposent de nombreux articles de fond».

Les deux spécialistes voient donc les gratuits promis à un bel avenir, d’autant que, comme le souligne Saverio Progano, le lectorat de 20 Minuten dépasse désormais largement les cercles des étudiants pendulaires, qui ont été les premiers à l’adopter.

Le gâteau n’est pas extensible

L’étude de la REMP montre que 20 Minuten n’a pas gagné ses nouveaux lecteurs uniquement au détriment des autres quotidiens. Certains ne lisaient pas de journaux avant et d’autres prennent le gratuit en plus de leur feuille favorite.

La publicité, par contre, un gratuit la prend forcément aux autres. «Le gâteau publicitaire n’est pas extensible, bien au contraire, fait remarquer Saverio Progano. Et les annonceurs qui veulent cibler un public large et plutôt jeune, disons de 15 à 35 ans, ont tout intérêt à passer leurs annonces dans un gratuit.»

Autant dire que les journaux traditionnels vont au-devant de lendemains diffciles. D’autant que, comme le souligne Josef Trappel, «actuellement, 20 Minuten bénéficie d’une sorte de bonus du leader. Il attire la publicité comme un aimant».

swissinfo et les agences

– Les dix quotidiens suisses les plus lus en 2005:

– 20 Minuten: 948’000 (+166’000 par rapport à 2004)
– Blick: 717’000 en Suisse alémanique uniquement
(-19’000)
– Tages-Anzeiger: 567’000 (-6000)
– Berner Zeitung: 405’000 (-21’000)
– Mittellandzeitung: 389’000 (+8000)
– Le Matin: 353’000 (+22’000)
– Neue Zürcher Zeitung: 341’000 (+12’000)
– Neue Luzerner Zeitung: 292’000 (+2000)
– Die Südostschweiz: 249’000 (stable)
– 24 Heures: 266’000
(-21’000)

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