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Les avocats et les conseillers définitivement exclus du projet

Les avocats ne seront pas soumis à la loi sur le blanchiment d'argent (archives). KEYSTONE/MARTIAL TREZZINI sda-ats

(Keystone-ATS) Les avocats et autres conseillers ne seront pas assujettis à la loi sur le blanchiment d’argent. Le National a accepté lundi, par 123 voix contre 67, un projet de révision édulcoré.

La question était cruciale. Elle a même failli faire échouer le projet. Les députés ont refusé lors d’un premier examen d’entrer en matière en raison de dispositions visant à soumettre les conseillers à la loi. La catégorie a ensuite été retirée par les sénateurs.

“Oser l’exemplarité”

Lundi, la thématique a de nouveau été au coeur des débats. La gauche a tenté de maintenir les dispositions sur les conseillers dans la loi.

Les Panama Papers ont démontré les limites de la législation suisse, a dénoncé Baptiste Hurni (PS/NE). Les avocats et les conseillers peuvent aujourd’hui expliquer comment blanchir de l’argent, sans être poursuivis s’ils ne participent pas à la transaction. Ils n’ont par ailleurs aucune obligation de dénoncer ceux qui blanchissent de l’argent, s’ils en ont connaissance.

“La loi ne touche pas les activités typiques des avocats”, a poursuivi le Neuchâtelois. Et il s’agit d’une recommandation du Groupe d’action financière (GAFI). “Osons l’exemplarité”, a quant à lui lancé Nicolas Walder (Verts/GE). “Refusons que notre pays soit un terrain de jeu pour les criminels en cols blancs.”

“Bon compromis”

La droite l’a toutefois emporté. Pour Philipp Matthias Bregy (PDC/VS), le projet permet de remplir sept des huit recommandations du GAFI. “C’est déjà un bon compromis.” De plus, aucun avocat suisse n’a été impliqué dans les Panama Papers, a noté Vincent Maître (PDC/GE) au nom de la commission, critiquant un mauvais exemple.

Les conseillers sont déjà soumis à la loi, a-t-il poursuivi. Afin d’éviter que le projet n’échoue, le ministre des finances Ueli Maurer s’est également rangé à la solution du Conseil des Etats et au retrait de la catégorie.

Fondeurs aussi exclus

Le camp rose-vert a encore tenté de modifier le projet sur plusieurs points. Il aurait souhaité soumettre les personnes, qui fabriquent des produits de la fonte à titre professionnel, à la loi. Il s’agit d’une règlementation utile, demandée par la branche concernée elle-même, a rappelé Florence Brenzikofer (Verts/BL), appelant à combler une lacune dans la législation. Sans succès.

La gauche aurait également voulu suivre le Conseil fédéral sur les négociants de métaux précieux et pierres précieuses. Le projet gouvernemental entendait abaisser à 15’000 francs le montant maximal pour lequel ces derniers peuvent accepter sans autres des paiements en espèces.

Les députés ont toutefois préféré maintenir le seuil à 100’000 francs. Les deux propositions n’auraient pas permis d’améliorer la lutte contre le financement du terrorisme, a argumenté Vincent Maître.

“Soupçon fondé”

La notion de “soupçon fondé” a aussi été un point central des débats. Le Conseil des Etats avait réussi à la rendre plus restrictive. Les députés ont refusé de suivre. Par 176 voix contre 16, ils ont accepté une proposition de la gauche. Nicolas Walder a dénoncé un signal mal venu qui échouerait à faire sortir la Suisse du contrôle du GAFI.

Sa définition se rapproche de la volonté du gouvernement, a souligné le ministre des finances. Ueli Maurer a appelé à la soutenir, mais plutôt pour créer une différence avec les sénateurs et se repencher sur le sujet. Seule une poignée d’UDC s’y est opposée. Yves Nidegger a même tenté d’assouplir le concept.

Organisations caritatives

Le projet de loi prévoit plusieurs autres mesures. Les intermédiaires financiers devront vérifier l’identité du client, documenter la prestation et clarifier ses arrière-plan et but. Ils devront vérifier périodiquement ces informations.

Le Code civil introduit également pour les associations qui collectent ou distribuent des fonds à l’étranger à des fins caritatives, religieuses, culturelles ou sociales l’obligation de s’inscrire au registre du commerce. Le camp rose-vert aurait souhaité quelques ajustements sur ce point.

“Une inscription obligatoire semble disproportionnée”, a critiqué Nicolas Walder. Seules les institutions présentant un risque élevé devraient y être soumises. Pour Ueli Maurer, il serait mieux de laisser le Conseil fédéral de régler le problème dans l’ordonnance. Il a été entendu.

Les associations devront également désigner un représentant en Suisse et tenir une liste de leurs membres. Elles seront ainsi astreintes aux mêmes obligations de transparence.

Le projet retourne au Conseil des Etats.

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