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Les Journées littéraires toujours à la page

A Soleure, il est question de littérature, mais aussi de politique culturelle, de traduction et d'édition. literaturtage

Les Journées littéraires de Soleure fêtent cette année leur 30ème édition. Auteurs suisses et étrangers, talents confirmés et jeunes plumes, le mélange des langues et des cultures est comme d'habitude au programme.

Depuis 1979, les mots résonnent chaque week-end de l’Ascension dans le décor propice de Soleure la baroque. Bâtiment amiral des Journées littéraires, le Landhaus prête ses voûtes et ses salles pavées aux voix de multiples auteurs venus de Suisse et d’ailleurs.

Fidèles au concept de départ, les organisateurs invitent les écrivains reconnus pour favoriser la découverte de nouveaux arrivés dans le monde des lettres. Plusieurs fois membre de la Commission de programmation, éditeur et journaliste, Martin Zingg estime que la manifestation a su rester jeune.

swissinfo: Quelles sont les idées présentes lors de la première édition des Journées littéraires de Soleure et qui perdurent?

Martin Zingg: Les Journées littéraires ont vu le jour grâce à des écrivains comme Peter Bichsel, Otto F. Walter, Rolf Niederhauser et d’autres, qui voulaient organiser une sorte de «Werkschau» pour montrer ce qui se passait en Suisse sur le plan littéraire.

De cette époque, il reste le besoin de discuter des œuvres d’auteurs venus des quatre régions linguistiques et de l’étranger, mais aussi celui de parler de politique culturelle. Cette année, la nouvelle loi sur la culture qui est en préparation sera évoquée.

L’idée de ne pas figer la programmation a aussi perduré. La commission qui s’en occupe est renouvelée, dans la mesure du possible, tous les deux ans. Même s’il n’est pas toujours facile de trouver des personnes qui veulent s’engager.

swissinfo: Finalement, la recette a peu varié en presque 30 ans. N’y a-t-il pas un risque de lassitude?

M.Z.: Le but a toujours été de montrer ce qui se passe en Suisse. Ce n’est pas un festival qui invite n’importe quel auteur connu. Nous avons toujours privilégié la qualité et invité également des auteurs peu connus et des jeunes auteurs. Pour attirer le public, il faut cependant des têtes d’affiche.

Cette année, il y a peu d’auteurs qui font partie de la vieille génération: Muschg, Nizon, Jörg Steiner et Michel Viala, mais tous ont publié un nouveau livre. En fait, il y a même beaucoup d’anciens qui sont un peu vexés de ne pas être invités à Soleure…

Quant à une recette, il n’y en a pas vraiment. Il faut toujours réinventer, recommencer, en comptant avec le fait que les auteurs ne sont pas forcément disponibles car les manifestations qui ressemblent à Soleure se sont multipliées.

swissinfo: Justement cette année les Journées littéraires ont lieu en même temps que le Salon du livre de Genève. La foire du livre de Bâle, finalement annulée, était prévue en même temps. Ne faudrait-il pas une meilleure coordination?

M.Z.: Le fait est que personne ne veut vraiment avoir une coordination. Pour ce qui est du Salon de Genève, il y a une forme de coopération puisque des auteurs étrangers comme Dacia Maraini ou Lydia Davis iront d’abord à Genève puis viendront à Soleure. D’ailleurs les contacts avec Genève s’améliorent grâce notamment au travail de Daniel de Roulet.

swissinfo: Quel est votre sentiment sur le paysage éditorial suisse. Le rachat de maisons d’éditions alémaniques par des éditeurs allemands constitue-t-il un risque?

M.Z.: Récemment, Nagel & Kimche, racheté par Hanser, a publié une très belle anthologie de poésie romande sous la direction de Philippe Jaccottet. Même si les éditeurs sont allemands ou français, ils doivent aussi travailler pour le public suisse.

Un autre phénomène intéressant est l’émergence en Suisse alémanique de petites maisons d’édition courageuses, comme Salis ou pudelundpinscher, qui naissent pour lancer des auteurs débutants. Dans les Grisons en revanche, il n’existe plus aucune maison d’édition.

swissinfo: Soleure se veut lieu de circulation entre les littératures des diverses régions linguistiques. Or il est rare que des francophones assistent à une lecture en allemand ou vice-versa…

M.Z.: Je ne sais pas à qui il faut reprocher cela. C’est toujours une question d’intérêt. Mais il est vrai qu’on programme en principe les auteurs romands la même journée car on sait que les personnes venues de Suisse romande ne restent en général qu’un jour.

Il faut quand même souligner qu’il y a toujours une petite partie du public suisse alémanique qui s’intéresse aux auteurs romands. Par contre le public romand qui s’intéresse aux auteurs alémaniques ou tessinois est beaucoup plus restreint!

Les barrières linguistiques sont par essence très hautes, et elles le sont encore plus lorsqu’il est question de littérature car il faut alors un certain niveau de maîtrise de la langue. Par ailleurs, on connaît moins aujourd’hui les écrivains qu’à l’époque des Frisch, Dürrenmatt et Chessex. La place accordée dans les médias à la littérature a diminué, même si la situation en Suisse n’est pas si mauvaise comparée à celle d’autres pays.

swissinfo, Carole Wälti

Les Journées littéraires de Soleure ont été fondées en 1978. La première édition a eu lieu en 1979.

Elles se veulent un forum pour la création littéraire en Suisse. L’essentiel de la manifestation est constitué de lectures.

En parallèle se tiennent des expositions liées à la littérature, des podiums autour de sujets littéraires ou encore des ateliers de traduction.

Cette année, plus de 70 écrivains suisses et étrangers seront présents à Soleure du 2 au 4 mai.

Dont notamment des écrivains confirmés comme Adolf Muschg, Paul Nizon, Peter Stamm, Jörg Steiner, Michel Viala ou Daniel Maggetti, et des auteurs prometteurs, comme Marius Daniel Popescu.

Au total, 14 auteurs présenteront leur toute première œuvre.

Parmi les auteurs étrangers figurent le Français Gilles Leroy, Prix Goncourt 2007, les Italiens Dacia Maraini et Andrea de Carlo, les Américains Lydia Davis et Nathan Englander ou encore la Cubaine Wendy Guerra.

Pour la première fois cette année, le diffuseur national SRG SSR idée suisse est partenaire des Journées littéraires.

Les sites de ses radios et chaînes tv dans les quatre régions linguistiques offrent des dossiers spécifiques sur la manifestation.

Enregistrées en direct par la radio suisse alémanique DRS, les lectures seront disponibles sur son site intégralement, avec la possibilité de les écouter gratuitement en streaming ou en podcast.

Cette année, les organisateurs des Journées de Soleure peuvent compter sur 100’000 francs supplémentaires, qui n’étaient pas inscrits à leur budget. La manifestation reçoit en effet le Prix Zurlauben pour la culture parlée et écrite, décerné par la Fondation Landis & Gyr.

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