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Les opérations douteuses du docteur Zäch

Guido Zäch à son arrivée au Tribunal correctionnel de Bâle. Keystone

Le procès du président de la Fondation suisse pour paraplégiques (FSP) a débuté lundi devant le Tribunal correctionnel de Bâle.

Médecin célèbre, colonel dans l’armée et député démocrate-chrétien, Guido Zäch aurait occasionné des dommages de plusieurs dizaines de millions à la fondation.

A son arrivée au tribunal, où l’attendaient plusieurs dizaines de journalistes et de photographes, l’accusé a salué des paraplégiques et leurs familles présents. Il a répété qu’il était innocent. Et qu’il faisait confiance à la justice.

Les avocats du prévenu ont profité de leur première intervention pour souligner les nombreux services rendus par leur client en faveur des paraplégiques.

Quant à Guido Zäch, il a lancé à ses juges: «Je n’ai jamais cherché à nuire à qui que ce soit».

Une gestion déloyale

Le ministère public du canton de Bâle-Ville accuse Guido Zäch de gestion déloyale et d’abus de confiance.

Selon l’acte d’accusation, il aurait détourné plus de 500.000 francs de la FSP pour son enrichissement personnel.

Il se serait, en outre, octroyé un salaire plus élevé que prévu dans son contrat. De 1990 à 1999, ce supplément atteindrait 1,5 million de francs.

Par ailleurs, toujours avec l’argent de la FSP, le Dr Guido Zäch aurait réalisé des investissements immobiliers non rentables. Qui se seraient soldés par des pertes de plusieurs dizaines de millions de francs.

Une multitude de casquettes

Personnalité incontournable lorsque l’on parle de paraplégie en Suisse, le Dr Zäch multiplie les casquettes et les présidences.

En 1975, c’est lui qui a créé la Fondation suisse pour paraplégique (FSP).

Puis, en 1980, c’est aussi lui qui a créé l’Association suisse des paraplégiques.

En 1990, c’est sous l’impulsion de Guido Zäch que le Centre pour paraplégiques de Nottwil ouvre ses portes. C’est en fait le 3e pilier de ce que la FSP nomme le «triple accord».

Ces trois piliers forment une chaîne de prestations de services destinées à la rééducation intégrale et à l’accompagnement pour la vie de paralysés médullaires.

Le Dr Zäch a été le médecin chef du centre de Nottwil dès son ouverture et jusqu’en octobre 2000. Aujourd’hui, il assure toujours la présidence de la direction de l’établissement.

La clinique de Nottwil est connue et réputée. Pour mémoire, c’est là que le skieur Silvano Beltrametti, entre autres, a été hospitalisé pour sa rééducation après son accident de décembre 2001.

Un retrait du label de qualité



Mais à cette triple casquette, le Dr Zäch en avait ajouté d’autres.

Un cumul qui est, au demeurant, contraire à toutes les règles de bonne gouvernance des organisations caritatives.

En 1991, la multiplication des fonctions à responsabilité du Dr Zäch avait d’ailleurs attiré l’attention du Service spécialisé des institutions d’utilité publique collectant des dons (Zewo).

«Nous avions constaté que Guido Zäch cumulait tellement de casquettes que le contrôle interne ne pouvait plus être garanti», confime à swissinfo Ariuscha Davatz.

«Nous l’avions averti, poursuit la porte-parole de la Zewo. Mais, à ce moment-là, il n’avait pas daigné en tenir compte.»

Entre-temps, Guido Zäch a tout de même abandonné quelques-unes de ses fonctions. Mais pas suffisamment. Raison pour laquelle, le Zewo lui a retiré son label de qualité.

Une gestion familiale des affaires

En plus de ce cumul des fonctions, le médecin a mené une gestion très «familiale» de ses affaires.

L’une de ses filles travaille dans les relations publiques et l’un de ses gendres en tant qu’architecte pour le compte de la Fondation suisse pour paraplégiques.

Une amie de sa femme gère l’hôtel Engel de Dornach et sa belle-mère dirige l’Auberge Landahaus Paracelsus à Bad Ragaz. Deux établissements qui appartiennent justement à la FSP.

Autre exemple. Dans l’opération financière de l’hôtel d’Herisau – où la fondation a subi un dommage de 20 millions de francs -, le bénéficiaire serait surtout le frère de Guido Zäch dont la société a pu vendre des biens fonciers pour 3,3 millions de francs.

La FSP s’en prend aux médias

Mais la Fondation n’aime pas beaucoup que l’on fouille dans ses affaires de famille.

Pour preuve, à la veille du procès, elle a porté plainte contre SonntagsZeitung et Facts auprès du Conseil de la presse.

Motif? Elle estime que ces deux hebdomadaires alémaniques portent atteinte à l’honneur du Dr Zäch et à l’image de la FSP.

En clair, elle estime que l’accusé a été condamné par la presse avant même d’avoir été jugé. Pour autant, elle a renoncé à déposer une plainte pénale.

swissinfo et les agences

En 2002, la FSP a récolté 51,3 millions de francs auprès de 1,2 million de donateurs.

Contre une cotisation de 30 francs par année, elle assure 150’000 francs d’indemnité en cas d’accident.

Seule la Rega – qui fonctionne avec le même principe et la même cotisation – fait mieux avec 66,1 millions de francs et 1,6 million de membres.

– Guido Zäch est accusé d’avoir occasionné des dommages pour plus de 60 millions de francs à la Fondation suisse pour les paraplégiques (FSP).

– Il aurait détourné plus d’un demi-million de francs de la FSP pour son enrichissement personnel.

– Il aurait touché un salaire plus élevé que prévu par le contrat (1,5 million de francs entre 1990 et 1999).

– Il aurait fait acheter à la FSP une maison de 2 millions de francs (plus 2,3 millions de frais de rénovation). Il l’a louée pour son usage personnel de 1988 à 2000. Et il l’a rachetée pour 1,8 million de francs en l’an 2000.

– Ses investissements dans des projets immobiliers auraient causé d’importantes pertes à la FSP (20 millions de francs dans l’Hôtel Herisau, 17,8 millions dans l’Hôtel-Engel à Dornach et 7,7 millions dans un hôtel luxueux à Grindelwald).

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