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Les soins intensifs pourraient bientôt atteindre leurs limites

"Il faut réduire autant que possible ses contacts sociaux" a déclaré vendredi Martin Ackermann, chef de la Task Force scientifique de la Confédération (archives). KEYSTONE/ANTHONY ANEX sda-ats

(Keystone-ATS) L’augmentation du nombre de patients admis dans les unités de soins intensifs est particulièrement inquiétante. “Nous estimons que la limite de capacité sera atteinte entre le 5 et le 18 novembre si rien ne change”, a souligné Martin Ackermann, chef de la Task Force.

Il s’agit désormais de réduire les contacts sociaux au minimum pour contenir la pandémie de coronavirus, a souligné vendredi le responsable lors de la conférence de presse hebdomadaire des experts à Berne. “Nous avons remarqué que les hospitalisations doublent chaque semaine”, a-t-il déclaré. Il en va de même pour le nombre d’admissions aux soins intensifs et pour les décès.

La Suisse dispose de 22’000 lits en soins aigus. 16’000 sont occupés, dont 710 par des patients Covid. Le pays dispose de 5000 places en réserve. En soins intensifs, 19% des lits sont occupés par des malades atteints par le coronavirus, soit 144 lits. Il reste 342 places, a énuméré Andreas Stettbacher, délégué du Conseil fédéral pour le Service sanitaire coordonné.

Pour les services de soins intermédiaires, qui ne nécessitent pas des soins intensifs mais une présence accrue du personnel, la Suisse compte 465 lits, dont 313 sont occupés. Près de 50 patients Covid y sont admis. Il reste 200 places de réserve.

Possibles goulets d’étranglement

Des goulets d’étranglement pourraient se faire ressentir dans les soins intensifs et au niveau des services de soins intermédiaires. La situation évolue très rapidement, a précisé l’expert.

Mais si du personnel des soins normaux est transféré vers ces services de soins aigus, la pénurie de personnel pourrait aussi concerner les soins normaux. “A ce moment, on pourrait envisager l’engagement de l’armée”. Il faut absolument veiller à ce que le personnel soignant ne s’épuise pas.

Chiffres réels difficiles à chiffrer

Le chiffre réel des infections est difficile à déterminer actuellement, selon M. Ackermann. Il est probablement trois à quatre fois plus élevé. Au printemps, il était dix fois plus élevé et au cours de l’été deux à trois fois plus important que les chiffres annoncés quotidiennement.

Reste que selon les données de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), la situation de la Suisse s’est gravement détériorée en comparaison internationale. Les chiffres sont cinq fois plus élevés qu’en Allemagne, deux fois plus élevés qu’en Autriche et en Italie.

La Suisse a une incidence de 495 cas pour 100’000 habitants, a rappelé Stefan Kuster, chef de la division Maladies transmissibles de l’OFSP. Seule la France est plus proche de la Suisse avec une incidence de 450 cas pour 100’000 habitants.

Stratégie d’endiguement freinée

Au cours de la semaine écoulée, le nombre de cas a plus que doublé, atteignant vendredi plus de 6600. Chaque personne positive infecte en moyenne 1,6 personne. Aucune classe d’âge n’est épargnée, ni aucune région de Suisse.

La stratégie d’endiguement ne fonctionne plus en raison du nombre élevé de cas, explique M. Ackermann. Pour que le taux de reproduction redevienne inférieur à 1, il faut éviter la moitié des contacts dans la vie professionnelle et privée.

L’augmentation dramatique des nouvelles infections rend également le traçage plus que difficile, a relevé le président de l’association des médecins cantonaux, Rudolf Hauri. “On atteint clairement les limites”, a-t-il ajouté, parlant d’une “machine enrayée”. Nous mettons tout en oeuvre pour que le traçage soit optimisé.

Tourisme en ville à la peine

Concernant l’impact économique, le secteur touristique, l’un des premiers touchés par la crise, devra sans doute attendre 2023 voire 2024 pour se remettre totalement, selon Erik Jakob, chef de la direction de la promotion économique. C’est surtout les villes qui souffrent, certaines ayant vu l’affluence de visiteurs diminuer de 60% par rapport à 2019.

La Task Force de la Confédération réitère ses recommandations, à savoir éviter au maximum les contacts risqués et respecter les mesures d’hygiène. Les mesures prises actuellement devraient rester en vigueur jusqu’en mars ou avril afin de contenir la pandémie sur le long terme et éviter un effet yo-yo.

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