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Les Suisses de l’étranger ne seront pas mieux informés sur les banques

Hans-Peter Portmann
Accepter le texte aurait constitué une ingérence de l'Etat dans la liberté de commerce, pour le député du Parti libéral-radical Hans-Peter Portmann Keystone

La Cinquième Suisse ne disposera pas d’informations spécifiques sur les prestations à l’étranger des banques helvétiques d’importance systémique. La Chambre basse du Parlement a rejeté mardi une motion en ce sens. Une décision que déplore l’Organisation des Suisses de l’étranger.

Pas de réconciliation en vue entre les Suisses de l’étranger et leurs banques. Le Conseil national (Chambre basse) a refusé, par 96 voix contre 80 et 9 abstentions, un texteLien externe qui demandait au gouvernement de garantir à la Cinquième Suisse des informations précises et spécifiques sur les conditions d’accès aux services financiers des grands établissements bancaires. Celles-ci auraient été publiées sur le site du Département fédéral des Affaires étrangères et des consulats. Auteure de la motion, la Commission de politique extérieure voulait ainsi permettre à la diaspora helvétique de maintenir plus facilement des relations bancaires avec son pays d’origine.

Le député du Parti démocrate-chrétien (PDC / centre) Claude Béglé a souligné que les Suisses de l’étranger s’expatrient essentiellement pour des raisons professionnelles et de plus en plus avec l’idée de revenir. «Ils ne coupent pas le cordon ombilical. De ce fait, ils ont besoin de conserver des liens étroits et durables avec notre pays», a-t-il plaidé. Il a rappelé l’importance de maintenir un compte bancaire en Suisse pour les expatriés, notamment pour «contracter une assurance-maladie, cotiser à l’AVS, couvrir des dépenses de séjour en Suisse ou encore gérer un bien immobilier qui serait toujours détenu en Suisse».

«Les Suisses de l’étranger ne coupent pas le cordon ombilical»
Claude Béglé

«Cette proposition est une plaisanterie. Elle est contraire à la loi», a pour sa part estimé le député du Parti libéral-radical (PLR /droite) Hans-Peter Portmann, estimant qu’il s’agit d’une ingérence de l’Etat dans la liberté de commerce.

Le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis a affirmé que «donner des informations sur les offres et les conditions d’entreprises privées n’est pas le devoir de l’Etat». Il a aussi rappelé que certaines organisations privées livrent déjà des informations concernant les conditions requises par les banques pour permettre aux Suisses de l’étranger de garder un compte dans leur pays, à l’image de l’Organisation des Suisses de l’étranger.

10 ans de problèmes mais pas de solution

Le texte rejeté était pourtant le fruit d’un compromis. En effet, en février dernier, le Conseil des Etats (Chambre haute) avait rejeté une motion du sénateur tessinois Filippo Lombardi, qui voulait imposer aux grandes banques de garantir un compte aux Suisses de l’étranger. Au terme de trois séances, les banques concernées et l’auteur du texte s’étaient toutefois mis d’accord sur un texte moins contraignant.

Les relations de la Cinquième Suisse avec les banques helvétiques préoccupent déjà le Parlement depuis plusieurs années. Quatre interventions ont été déposées sur ce thème depuis 2014 mais toutes ont été rejetées. Depuis la crise financière de 2008, les Helvètes expatriées ont de plus en plus de peine à ouvrir ou à garder un compte dans leur pays d’origine. La pression internationale pour lutter contre l’évasion fiscale a en effet poussé les instituts bancaires suisses à restreindre l’accès à leurs services à l’étranger, même pour des clients au bénéfice de la nationalité suisse.

L’an dernier, l’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE) estimait que les quelque 775’000 émigrés suisses étaient traité par les banques comme des citoyens de «seconde classe», exigeant une modification législative. 

En août 2017, les membres du Conseil des Suisses de l’étranger, réunis à Bâle, nous avaient également fait part des problèmes qu’ils rencontraient avec leur banque:

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Les espoirs reposent sur PostFinance

L’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE)Lien externe déplore la décision du Conseil national. «Nous ne demandions pourtant pas un effort important. Le Département fédéral des Affaires étrangères aurait pu se contenter d’une interprétation minimale de la motion et d’ajouter un lien vers la page de notre siteLien externe qui rassemble les informations sur les banques», commente la directrice de l’OSE Ariane Rustichelli.

Le lobby de la Cinquième Suisse place désormais ses espoirs dans une autre motion de la Commission de politique extérieure. Le texte, qui devrait être traité la semaine prochaine par le Parlement, demande au gouvernement de garantir l’accès aux services de PostFinance à des conditions similaires à celles pratiquées en Suisse. «Cette solution se justifie par le fait que PostFinance est en partie en mains publiques. Le risque est toutefois que les parlementaires estiment qu’il y a une distorsion de la concurrence par rapport aux autres banques d’importance systémique. Cependant, il faudra bien un jour trouver une solution à la problématique bancaire pour les Suisses de l’étranger», estime Ariane Rustichelli.

Par ailleurs, cette dernière précise que l’OSE a pu conclure un accord avec la Banque Cantonale de Genève, qui s’engage à offrir ses prestations aux Suisses de l’étranger à des conditions similaires à celles proposées à ceux de l’intérieur. «C’est la preuve qu’il est possible de faire un effort», souligne Ariane Rustichelli.

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