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Nouveaux heurts à Beyrouth, plus de 140 blessés

Les forces anti-émeutes ont tiré à Beyrouth des balles en caoutchouc et des gaz lacrymogènes pour disperser des manifestants antigouvernementaux qui leur jetaient des pierres. KEYSTONE/AP/HM sda-ats

(Keystone-ATS) Les forces anti-émeutes ont tiré dimanche à Beyrouth des balles en caoutchouc et des gaz lacrymogènes pour disperser des manifestants antigouvernementaux qui leur jetaient des pierres. Ces nouveaux affrontements violents ont fait 145 blessés.

En deux jours, plus de 520 personnes ont été blessées dans les violences. Les accrochages de samedi qui ont blessé 377 personnes ont été d’une violence inédite depuis le début le 17 octobre de la contestation contre une classe politique jugée corrompue et incapable de sortir le Liban du marasme économique.

Pour le deuxième soir consécutif, des centaines de manifestants se sont rassemblés dans le centre-ville à l’entrée d’une avenue menant au Parlement, près de la place des Martyrs, épicentre de la contestation. Aux cris de “Révolution, Révolution”, ils ont jeté des pierres et des pétards sur un barrage des forces anti-émeutes bloquant l’avenue. Les policiers ont répliqué avec des balles en caoutchouc, un canon à eau et des gaz lacrymogènes.

La Croix Rouge libanaise a fait état de 145 blessés, dont 45 hospitalisés. Deux journalistes ont été blessés dont l’un à la main par une balle en caoutchouc selon son média.

En fin de soirée et face au nuage de gaz lacrymogène et aux pluies diluviennes, les manifestants se sont retirés du principal point de rassemblement et les heurts ont cessé, selon des journalistes de l’AFP sur place. Seule une poignée de contestataires sont restés dans les rues voisines.

“On en a marre”

En trois mois de contestation, la colère n’a fait que grandir parmi les manifestants qui fustigent l’inertie des dirigeants: la crise économique s’aggrave avec des licenciements en masse, des restrictions bancaires drastiques et une forte dépréciation de la livre libanaise face au dollar.

“On en a marre des hommes politiques. Après trois mois de révolution, ils nous prouvent qu’ils ne changent pas, qu’ils n’écoutent pas, qu’ils n’apportent rien”, s’insurge Mazen, 34 ans.

Sur Twitter, les forces de sécurité ont appelé les manifestants à ne pas “attaquer” la police. Samedi, les forces de l’ordre ont aussi tiré des balles en caoutchouc et eu recours aux canons à eau dans le centre-ville, après que des manifestants ont lancé des pierres et des poteaux de signalisation sur elles.

Une télévision locale et des internautes ont partagé des témoignages de familles dont les enfants, parfois âgés de 18 ans, ont été touchés samedi à l’oeil par des balles en caoutchouc.

“Violence excessive”

“Il n’y avait aucune justification pour le recours brutal à la force par la police anti-émeute contre des manifestants largement pacifiques”, a estimé Human Rights Watch (HRW). Accusant les policiers d’avoir “tiré des balles en caoutchouc dans les yeux”, Michael Page, directeur adjoint de HRW pour le Moyen-Orient, a appelé les autorités à “mettre fin à cette culture de l’impunité pour les abus policiers”.

Face à cette escalade, le président Michel Aoun a convoqué lundi “une réunion de sécurité” en présence des ministres de la Défense et de l’Intérieur, a annoncé ANI. Selon un Comité des avocats pour la défense des manifestants, une quarantaine de manifestants ont été interpellés samedi avant d’être relâchés. “La majorité” ont été victimes de “violences excessives”, certains affichant des blessures “à la tête, au visage, ou aux organes génitaux”.

Alors que le mouvement de contestation était globalement pacifique au départ, les affrontements se sont multipliés ces derniers jours entre forces de l’ordre et manifestants qui ont attaqué les vitrines de banques qui cristallisent une grande partie de la colère populaire.

Les manifestants réclament un gouvernement de technocrates, alors que la classe dirigeante est quasi inchangée depuis des décennies, une amélioration des services publics quasiment absents et la fin du chômage et de la corruption. Après la démission fin octobre du Premier ministre Saad Hariri, sous la pression de la rue, Hassan Diab a été désigné pour le remplacer le 19 décembre mais n’a toujours pas formé son gouvernement.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

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