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Plus d’harmonisation pour une meilleure formation

La Suisse compte 26 systèmes scolaires différents, un par canton. Keystone

Les Suisses votent le 21 mai sur une modification des articles de la Constitution concernant la formation. Le but est d'harmoniser un système éducatif éclaté.

Pour les partisans, le changement doit déboucher sur une formation plus efficace. Les détracteurs craignent un nivellement par le bas et une atteinte au fédéralisme.

Pays fédéraliste, la Suisse l’est aussi dans le domaine de la formation. Les cantons jouissent d’une large autonomie en matière d’éducation, qu’il s’agisse de l’école obligatoire, primaire et secondaire, et de la scolarité post-obligatoire.

Le monde académique est soumis au même principe. Hormis les deux écoles polytechniques fédérales, les universités dépendent des cantons. Enfin, la formation professionnelle est aussi du ressort des cantons.

Des disparités problématiques

L’existence de plusieurs systèmes cantonaux conduit à un système de formation éclaté où les règles ne sont pas les mêmes. C’est par exemple le cas pour l’enseignement à la petite enfance.

L’école enfantine est répandue dans la plupart des cantons. Cependant, elle n’est pas obligatoire partout. Par ailleurs, l’âge d’entrée à l’école enfantine peut varier selon les cantons. La durée des études peut aussi varier; il faut quatre ans pour obtenir un baccalauréat à Fribourg, mais trois dans le canton de Vaud.

Pour les autorités et les responsables de l’instruction publique, cette diversité pourrait s’avérer préjudiciable non seulement à l’enseignement, mais aussi à la mobilité de la population. En effet, comment changer de canton de domicile si le cursus scolaire des enfants y est très différent.

C’est pour ces raisons que la Commission de la science, de l’éducation et de la culture du Conseil national a étroitement collaboré avec la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique pour livrer un projet de nouvelles dispositions constitutionnelles sur la formation.

Objectif qualité

Le but est de «développer un espace éducatif homogène et d’un haut niveau de qualité». Ceci permettait de renforcer la position du système éducatif suisse sur la scène internationale, d’autant que l’étude PISA a montré quelques lacunes chez les élèves suisses, surtout au niveau de la lecture.

Pour parvenir à une amélioration, le projet prévoit une série d’harmonisations, qu’il s’agisse de l’école obligatoire, de la formation post-obligatoire, des hautes études ou encore de la formation professionnelle.

Ainsi, pour la première fois, le projet détermine les différents domaines qui entrent dans la formation de base. Tous les élèves devront recevoir un enseignement dans les domaines suivants: langues, mathématiques et sciences naturelles, sciences humaines et sociales, musique, arts, et activités créatrices, et enfin mouvement et santé.

En outre, des standards nationaux seront établis dans les disciplines clés que sont les langues, les mathématiques et les sciences naturelles. Les cantons devront s’engager à respecter ces standards.

La contrainte comme ultime recours

Le projet sur lequel le peuple se prononce ne vise pas à supprimer totalement l’autonomie des cantons en matière de formation.

En effet, les réformes doivent être mises en place grâce à une harmonisation qui se fera au travers d’un accord entre les différentes instructions publiques cantonales. Ce processus d’harmonisation a d’ailleurs déjà commencé.

Quant à la Confédération, elle n’interviendrait qu’en dernier recours. Selon le projet, ne serait appelée à intervenir que si les cantons n’arrivaient pas à se mettre d’accord entre eux. Elle pourrait alors imposer une solution.

Une faible opposition

Le projet soumis au peuple fait l’objet d’un très large soutien au sein du monde politique. Un chiffre le démontre: à la Chambre basse du Parlement, l’arrêté modifiant les articles de la Constitution sur la formation a été accepté sur le score sans appel de 176 voix contre… 3.

Du coup, pratiquement tous les partis politiques – parmi lesquels les quatre partis gouvernementaux – invitent les citoyens à déposer un «oui» dans l’urne le 21 mai.

Il existe cependant une opposition. L’extrême-gauche dénonce le «déficit démocratique» contenu dans ce projet. «Les citoyens ne pourront plus exercer leurs droits démocratiques sur des thèmes liés à la formation; tout sera décidé par des fonctionnaires», dénonce le député popiste Josef Zisyadis.

Mais l’opposition provient aussi des rangs de la droite, qui insiste plutôt sur l’atteinte portée au fédéralisme. C’est le cas du député démocrate du centre (UDC / droite dure) Oskar Freysinger. «Les cantons ne seront plus autonomes en matière d’éducation, dénonce-t-il. Ceux qui ont un bon système éducatif pourront être contraints à une harmonisation; or le nivellement se fait toujours par le bas.»

Mais Oskar Freysinger n’a pas réussi à convaincre l’UDC – le principal parti du pays – à faire campagne en faveur du «non». Sans ce soutien, on voit mal comment les opposants pourraient remporter le scrutin du 21 mai.

swissinfo, Olivier Pauchard

– La Suisse est un pays fédéraliste par excellence. Les impôts, les forces de police ou la législation, notamment, diffèrent selon les cantons.

– Le système d’éducation est aussi soumis au principe du fédéralisme.

– Concrètement, cela se traduit par toute une série de différences: les manuels scolaires ne sont pas les mêmes, l’âge de l’entrée à l’école peut être différent, les dates des vacances scolaires ne sont pas uniformes, la première langue étrangère enseignée à l’école n’est pas partout une langue nationale, etc.

– Les rencontres régulières entre les différents ministres cantonaux en charge de l’éducation (Conférence des directeurs cantonaux de l’Instruction publique) permettent déjà de parvenir à une certaine harmonisation.

– Mais le projet soumis au vote permettrait d’aller plus loin encore plus loin. La Confédération pourrait ainsi forcer les cantons à harmoniser leur pratique s’ils ne parviennent pas à se mettre d’accord.

Quelques exemples d’harmonisation contenus dans le projet soumis au vote du 21 mai:
Ecole enfantine obligatoire dans l’ensemble du pays
Même âge de début de scolarisation partout
Même durée des études obligatoires (onze ans)
Meilleure reconnaissance des diplômes entre les universités
Développement de standards de formation
Meilleure coordination des efforts des instituts de recherche universitaires

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