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L’école suisse comme inspiration pour des projets d’aide au développement

Ein Junge steht vor einer Schulklasse, seine Kameraden und Kameradinnen strecken die Hände in die Luft.
L'importance sociale de l'école obligatoire suisse et les dispositions institutionnelles qui permettent à tous les enfants de recevoir une éducation de qualité influencent le travail de la DDC dans ses pays partenaires. © KEYSTONE / CHRISTIAN BEUTLER

La formation professionnelle suisse jouit d'une bonne réputation dans la coopération au développement. Les acquis de l'enseignement obligatoire, tels que le multilinguisme ou l'organisation décentralisée, ne sont pas aussi fameux. La Suisse entend à l'avenir faire davantage appel à cette expertise et la mettre au service de ses pays partenaires.

En Mongolie, la Direction du développement et de la coopération (DDC) soutient une réforme des programmes scolaires du Ministère de l’éducation, axée sur les compétences: les élèves doivent acquérir des connaissances de base en matière d’écologie, de politique, d’économie et dans le domaine social.

Dans les écoles helvétiques, les élèves se familiarisent avec des questions de développement durable et apprennent à utiliser les ressources naturelles. Son orientation sur la vie quotidienne est l’une des cinq forces principales du système scolaire du pays. Elle lui confère un rôle de pionnier en comparaison internationale et inspire la coopération au développement.

Les cinq points forts du système scolaire suisse

  • Place centrale et qualité de l’école publique
  • Organisation décentralisée de l’éducation favorisant des solutions adaptées au contexte local
  • Plurilinguisme
  • Acquisition de compétences-clés à l’école –une préparation à la vie
  • Préparation à la vie professionnelle et possibilité de rattrapage

Ces caractéristiques et d’autres ont été compilées par l’Institut pour la coopération internationale en matière d’éducation (IZB) de la Haute école pédagogique de Zoug pour le compte de la DDC, en vue d’identifier les éventuelles plus-values pour la coopération internationale.

Un rapport a examiné ces points forts afin de déterminer s’ils peuvent apporter une valeur ajoutée à la coopération internationale. swissinfo.ch s’est entretenu avec Sabina Handschin, spécialiste de l’éducation à la DDC, au sujet des résultats de cette étude.

swissinfo.ch: Le système suisse et ses cinq atouts principaux est-il un cas particulier par rapport aux autres pays européens et à leur coopération au développement?

Sabina Handschin: Dans ces cinq domaines, la coopération au développement suisse dispose d’avantages spécifiques par rapport à d’autres pays, même si d’autres pays comme l’Allemagne, l’Angleterre, la Norvège et la France soutiennent également des projets de développement dans le domaine de l’éducation. Dans le domaine de l’éducation de base*, la Suisse peut s’appuyer sur des expériences spécifiques de son propre système scolaire.

swissinfo.ch: Qu’est-ce que cela signifie concrètement?

S.H.: Prenons l’exemple du multilinguisme: la France investit également dans des projets visant à promouvoir le plurilinguisme dans ses pays partenaires. Cependant, le système scolaire national français est monolingue. La Suisse, avec ses quatre langues d’enseignement, selon les régions, l’enseignement bilingue dans des lieux bilingues et la promotion ciblée d’autres langues, peut offrir à ses pays partenaires plus d’expérience.

swissinfo.ch: Une évaluation de l’engagement de la DDC dans le domaine de l’éducation de base en 2016 a déjà montré que la coopération au développement dans le domaine de l’éducation s’inspire implicitement du système scolaire suisse et a un impact. Quels éléments nouveaux apporte ce dernier rapport?

S.H.: Il s’agit là d’une nouvelle orientation: La DDC étudie pour la première fois intensivement la manière dont le travail de développement peut profiter du système suisse. L’analyse répond à cette question par une vue d’ensemble et apporte une clarté conceptuelle pour la suite de nos travaux.

Première réunion au milieu du mois

A quels défis en matière de formation la DDC doit-elle faire face dans le cadre de la coopération internationale à laquelle les écoles et les autorités éducatives suisses sont également confrontées ? Quels aspects de notre système scolaire fédéraliste et multilingue peuvent également intéresser les pays partenaires de la DDC?

Le 12 septembre, la DDC invite des représentants du système éducatif suisse, de la coopération internationale et d’autres parties intéressées à une manifestation publique à Berne pour discuter notamment de ces questions. L’étude IZB sera également présentée au public lors de cet événement.

swissinfo.ch: Que signifie concrètement cela pour le travail de la DDC?

S.H.: En plus des partenariats existants avec des représentants de la coopération au développement, la DDC souhaite maintenant établir un échange régulier avec les responsables du système scolaire suisse. L’idée est de conclure prochainement de nouveaux partenariats, par exemple avec des cantons, des communes ou même des écoles, afin de mettre l’expertise suisse au service de nos pays partenaires.

swissinfo.ch: On dirait presque que la DDC veut maintenant investir dans le système scolaire suisse.

S.H.: Non, pas question, ce n’est pas notre mandat. Il ne s’agit d’ailleurs pas d’exporter le système scolaire suisse. Nous voulons tourner notre regard vers l’intérieur afin de mieux évaluer où et sous quelle forme il est judicieux d’utiliser l’expérience du système scolaire suisse pour notre travail. Nous voulons renforcer l’efficacité de l’engagement de la Suisse dans le domaine de la formation grâce aux spécificités helvétiques et à l’échange de connaissances. Il s’agit d’inspiration et d’échanges entre les experts de l’enseignement scolaire suisse, la DDC, les partenaires du développement et les responsables de l’éducation de nos pays partenaires.

swissinfo.ch: Pouvez-vous citer un exemple concret?

S.H.: En mai, je me suis rendue au Liban. Le système scolaire public de ce pays est extrêmement faible. 70% des enfants libanais fréquentent des écoles privées en raison de la faiblesse des établissements publics. Les perdants sont les enfants des couches les plus pauvres de la population, qui ne peuvent se permettre de financer une scolarisation privée. Les nombreux enfants de réfugiés en provenance de Syrie, qui doivent intégrer le cursus public, ne rendent pas la situation plus facile. Lors d’une réunion avec des représentants du Ministère de l’éducation, la Suisse a été invitée à intensifier les échanges dans le domaine de l’enseignement scolaire public. Le ministère voulait savoir comment la Suisse garantit des écoles publiques inclusives, de qualité et adaptées aux enfants.

«Tous les parents veulent que leurs enfants reçoivent une bonne éducation et les autorités scolaires veulent pouvoir mener à bien leur mission»

swissinfo.ch: La scolarité obligatoire a une longue tradition en Suisse et un rôle social important. Selon les informations de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la Suisse est le pays qui investit le plus par élève après le Luxembourg. Les exigences de base ne sont-elles pas trop différentes?

S.H.: Les visites de centaines d’écoles de pays d’Afrique et du Moyen-Orient m’ont montrées que, en Suisse ou ailleurs, les préoccupations et les défis fondamentaux pour une éducation scolaire équitable sont les mêmes. Que ce soit au Mali, au Niger, en Afghanistan ou dans une famille de réfugiés syriens en Jordanie: tous les parents veulent que leurs enfants reçoivent une bonne éducation et les autorités scolaires veulent pouvoir mener à bien leur mission.

Evidemment, on ne peut pas comparer les niveaux de vie ou les budgets de la Suisse et de ses pays partenaires. Les conditions cadres sont partout différentes, il est donc important que les approches soient adaptées aux conditions locales. La diversité du système scolaire suisse en est un bon exemple: sa structure fédérale, son ancrage local, le fait que la population et les parents aient leur mot à dire, par exemple, font que notre système se distingue des autres.

Cela peut inspirer les autorités scolaires en Afghanistan, par exemple, où la DDC a lancé un programme visant à renforcer la supervision décentralisée des écoles et la participation des parents au quotidien scolaire.

L’éducation – un objectif central

L’éducation est au cœur du Message sur la coopération internationale 2017-2020Lien externe de la Suisse. Il couvre à la fois l’enseignement de base et la formation professionnelle. Le Parlement a chargé la DDC d’augmenter de 50% son engagement dans ce domaine, ce qui représente un investissement supplémentaire d’environ 660 millions de francs suisses. 

En 2017, la DDC a lancé sa nouvelle stratégie en matière d’éducationLien externe. Elle décrit comment la Suisse entend atteindre cet objectif dans le cadre de ses engagements bilatéraux et multilatéraux.

*L’éducation de base signifie l’enseignement obligatoire (primaire et secondaire inférieur).

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