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La Suisse et l’UE relancent la piste d’un accord cadre

Benita Ferrero-Waldner et Micheline Calmy-Rey à Bruxelles jeudi. Keystone

Le «oui» suisse à la libre circulation des personnes ouvre de nouvelles perspectives pour Berne, a souligné jeudi la commissaire européenne aux Relations extérieures, Benita Ferrero-Waldner. On reparle de la conclusion d'un accord cadre entre la Suisse et l'Union européenne.

Benita Ferrero-Waldner a reçu jeudi la ministre suisse des Affaires étrangères, Micheline Calmy-Rey. Elles auraient dû se rencontrer le 12 février, quatre jours après que le peuple suisse a donné son feu à l’ouverture progressive du marché du travail helvétique aux ressortissants de tous les Etats membres de l’Union européenne (UE), mais la ministre helvétique avait alors dû reporter sa visite à Bruxelles, en raison d’une mauvaise grippe.

Ce contretemps n’a pas empêché la commissaire européenne de se féliciter du résultat du référendum du 8 février, qui «permet la poursuite des relations» entre la Suisse et l’Union «dans des domaines d’intérêt mutuel».

«Maintenant, on regarde vers l’avenir», a-t-elle ajouté. Il sera toujours placé sous le signe du bilatéralisme. D’une part, Berne et Bruxelles ont déjà ouvert des négociations sectorielles dans différents domaines (électricité, libre-échange agricole, etc.). D’autre part, Micheline Calmy-Rey et Benita Ferrero-Waldner ont annoncé le lancement de discussions «exploratoires» sur la conclusion éventuelle d’un accord cadre entre la Suisse et l’UE.

Procédure délicate

Cet accord cadre, dont on parle depuis 2001, devrait permettre d’ordonner la myriade d’accords bilatéraux (120, environ) qui unissent les deux parties, de les sécuriser. Car Berne veut éviter qu’une «clause guillotine» les soudent.

Cet accord permettrait également d’instaurer un mécanisme permettant de les adapter plus facilement aux évolutions de «l’acquis communautaire» (la législation et la jurisprudence de l’Union). Les Vingt-Sept pays de l’UE, en effet, n’entendent plus bricoler des accords sur mesure pour la Suisse.

«Cette procédure sera délicate» à imaginer, a reconnu Micheline Calmy-Rey, car la Suisse tient à préserver son autonomie législative. Benita Ferrero-Waldner s’est toutefois voulue rassurante: «La procédure de reprise de l’acquis ne pourra pas être automatique, car on veut pas toucher à la souveraineté suisse».

«L’atmosphère entre la Suisse et l’Union européenne est excellente», a donc résumé la ministre suisse. Elle a malgré tout changé depuis le 8 février, deux dossiers empoisonnés ayant depuis lors refait surface: ceux de la fiscalité cantonale et du secret bancaire suisses. Ils ont tous les deux été évoqué, jeudi.

Propositions insuffisantes

La Commission juge insuffisantes les propositions que Berne a faites en vue de réduire les avantages fiscaux qu’accordent les cantons aux sociétés de domicile, aux holdings et aux sociétés mixtes qui s’installent sur leur territoire. Bruxelles les assimile à des aides d’Etat qui menacent le bon fonctionnement de l’accord de libre-échange que la Suisse et l’UE ont conclus en 1972, car ils provoquent des délocalisations d’entreprises.

Tout en contestant le bien-fondé des critiques européennes, le gouvernement suisse s’est déclaré prêt à proposer au Parlement d’abolir le régime des sociétés boîtes aux lettres et d’interdire aux holdings et aux sociétés mixtes d’exercer certaines activités.

«Ces propositions vont dans la bonne direction», a souligné Benita Ferrero-Waldner, tout en réclamant «un peu plus de sectorisation» – les holdings et les sociétés mixtes bénéficieront toujours «d’un traitement préférentiel» et «d’avantages sélectifs» inacceptables par rapport à d’autres sociétés établies en Suisse, souligne un rapport de ses services. La commissaire européenne se dit toutefois persuadée «qu’on trouera des solutions» à ce problème.

Autre casse-tête

En attendant, la Suisse risque d’être confrontée à un autre casse-tête, après que la banque suisse UBS eut été contrainte de livrer les noms de 300 de ses clients, accusés de fraude fiscale, à la justice américaine.

«Les Etats-Unis ne doivent pas être mieux traités que l’Union européenne», a rappelé Benita Ferro-Waldner, en notant que l’affaire UBS «conforte» l’Union dans sa volonté de lutter contre tout usage abusif du secret bancaire.

Soutenue par de nombreux Etats membres de l’UE, la Commission a déjà proposé de le supprimer pour les non-résidents. A Berne, où le gouvernement a créé en son sein une «délégation stratégique», on redoute que la pression devienne intenable.

swissinfo, Tanguy Verhoosel, Bruxelles

Atalante. Dans le dossier de la piraterie au large de la Somalie, le gouvernement suisse a décidé mercredi que la Suisse participerait à la mission européenne Atalante sous la forme d’un détachement de militaires, comme le demandait l’UE.

Parmi les dossiers en suspens dans la relation Suisse-UE figurent:

Justice. Fin novembre 2008, un accord a été signé entre la Suisse et l’organisation européenne de coordination judiciaire Eurojust sur la lutte contre la grande criminalité. Le Parlement doit encore ratifier cet accord.

Electricité. Depuis 2006, des négociations sont en cours sur le transit transfrontalier de l’électricité et le libre accès mutuel aux marchés.

Agriculture. Des négociations sont en cours sur un libre- échange dans le secteur agro-alimentaire. Cet accord doit permettre d’ouvrir les marchés respectifs aux produits agricoles et alimentaires ainsi que d’éliminer les entraves comme les droits de douanes et autres barrières.

Santé publique. Ces négociations visent une coopération renforcée et institutionnalisée dans le domaine de la santé publique. La priorité est la participation de la Suisse au Centre européen de prévention et de contrôle des maladies et à l’Autorité européenne de sécurité des aliments ainsi qu’aux systèmes d’alerte rapide.

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