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Semaine du goût: quand se nourrir signifie résister

L’éducation aux saveurs commence dès l’enfance. semainedugout.ch

Du 16 au 26 septembre, la Suisse vivra à l’enseigne des saveurs. Célébrée pour la première fois il y a dix ans, la Semaine du Goût est devenue un bastion important de la sauvegarde de la biodiversité et de la lutte contre la standardisation des produits alimentaires.

Que de chemin parcouru en dix ans. Au départ uniquement vaudoise, la Semaine du Goût concerne désormais pratiquement toutes les régions de Suisse. Cette année, ce ne sont pas moins de 1525 rendez-vous qui sont au programme dans tout le pays, dont plus de 300 en Suisse alémanique.

Et il y en a – c’est le cas de le dire – pour tous les goûts: de la soupe préparée par des chefs renommés au centre commercial Balexert à Genève à l’hommage à la pomme de terre dans un restaurant de Lucerne, en passant par des plats à base de produits de la forêt proposés par un «Grotto» tessinois, les notes de saveurs de la région du Lac de Morat ou les menus cuisinés par les maires en personne dans certaines communes.

Les épicentres de la manifestation seront les villes de Lucerne et d’Onex (en périphérie de Genève), nommées Cités du Goût 2010.

En dix ans, les objectifs de la Semaine sont restés les mêmes: valoriser la diversité des goûts, rendre les consommateurs plus attentifs à la qualité et à la saisonnalité des produits, préserver les traditions, favoriser la découverte et promouvoir une alimentation saine.

Les jeunes avant tout

«Nous voulons semer des graines», a dit Josef Zisyadis, président de la manifestation et député du parti du travail, lors d’une conférence de presse tenue fin août à Onex.

Une volonté qui se manifeste par le vaste éventail d’offres destinée aux plus jeunes durant la Semaine du Goût. En fait, une manifestation sur trois se tient dans une école.

Par exemple, les quelque 1400 élèves de Delémont, dans le Jura pourront suivre des ateliers du goût, tandis que ceux d’Onex pourront participer, entre autres choses, à la fabrication du chocolat.

A signaler également que dans certains restaurants gastronomiques célèbres, les jeunes de 16 à 25 ans pourront bénéficier de rabais importants.

Qualité plus que quantité

Avec une telle foison de manifestations, ne risque-t-on pas de perdre un peu le fil ? Parrain de l’édition 2010, le chef vaudois multi-étoilé Philippe Rochat note qu’il faudrait peut-être «mieux sélectionner les événements», pour éviter que l’on ne retrouve au final dans le chaudron «des animations qui n’ont rien à y faire».

«Il est possible que Rochat ait raison, bien que nous ayons toujours cherché la qualité avant la quantité, répond Josef Zisyadis. Il faut bien préciser que nous ne sommes pas un organisme de certification. En outre, nous avons onze comités cantonaux qui examinent les candidatures. Nous insistons beaucoup sur l’aspect pédagogique, et si nous voyons que des restaurants ou d’autres participants ne font pas assez d’efforts, en particulier pour proposer quelques chose d’original, nous ne les acceptons pas».

Bilan en clair-obscur

La bataille pour l’éducation au goût est encore loin d’être gagnée et ceux qui la mènent ont parfois l’impression de lutter contre un ennemi trop fort pour eux.

En présentant le bilan de cette première décennie d’activité, Josef Zisyadis se garde d’ailleurs de tout triomphalisme: «La question que nous devons nous poser est la suivante: en dix ans, avons-nous réussi à changer le mode d’alimentation des Suisses ?» Et pour le député, la réponse est mitigée.

«C’est une lutte contre la montre. La standardisation des goûts gagne chaque jour du terrain», note Josef Zisyadis.

«Nos frigidaires deviennent de plus en plus des succursales des supermarchés», ajoute René Longet, membre de l’exécutif de la commune d’Onex et président d’équiterre, une ONG qui milite «pour des choix écologiques, équitables et solidaires».

«Nous cherchons a créer de nouveaux réflexes, à faire en sorte que le consommateur devienne ‘consmmacteur’ et à faire comprendre à tous que la préservation de la biodiversité dépend en premier lieu de nous-mêmes, enchaîne Josef Zisyadis. Et le contexte est difficile. Il n’est qu’à se souvenir, par exemple, qu’aux Etats-Unis, 80% des variétés de salades et 90% des variétés de maïs ont disparu».

Simplifier

La cause du goût a néanmoins fait quelques pas en avant. Pour s’en rendre compte, il suffit d’observer les étalages des supermarchés, qui offrent de plus en plus de légumes, de fruits ou de viandes de producteurs locaux ou d’aliments munis d’un label de qualité spécifique.

«Les grandes chaînes de distribution ont certainement compris que le client a besoin de mettre un visage sur ce qu’il achète, de savoir qui a produit la marchandise. Dans ce sens, je pense qu’avec la Semaine du Goût, nous avons réussi à semer quelque chose», observe Josef Zisyadis.

La profusion des labels risque toutefois de dérouter un peu le consommateur – ou mieux, le «consommacteur», relève René Longet.

«Un des objectifs que nous nous sommes fixé pour la Semaine du Goût, c’est de simplifier, poursuit l’édile d’Onex. Nous mettons l’accent sur les cinq paramètres les plus importants qui devraient être pris en compte quand on fait des achats: le mode de production, la proximité, la diversité, la santé et l’équité».

Valoriser la diversité des goûts et des cultures alimentaires.

Favoriser les échanges entre les professionnels du secteur alimentaire.

Sensibiliser les jeunes générations aux plaisirs du goût.

Rendre le consommateurs plus attentif à la qualité et à la saisonnalité des produits.

Valoriser les connaissances et les techniques de type artisanal.

Promouvoir une alimentation saine.

Favoriser la découverte de produits de qualité.

Préserver la tradition et encourager les innovations culinaires.

Revaloriser l’art culinaire domestique.

A Lucerne, un des événements principaux sera la journée de dégustation et de découverte des produits régionaux, le samedi 18 septembre.

A Onex, la semaine culminera le 26 septembre avec une grande fête, dont le but est de réunir les consommateurs et tous les acteurs locaux de l’alimentation.

Durable. Les deux villes ne limitent pas leurs actions de sensibilisation à la seule Semaine du Goût, mais les inscrivent dans la durée. A Onex par exemple, on a crée entre autres choses un label «Santé – proximité – goût» à l’intention des commerçants locaux.

(Traduction de l’italien: Marc-André Miserez)

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