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Théâtre Alchimic, la magie renouvelée

Un petit théâtre tout neuf à Genève! Alchimic

Il est né à Genève en septembre dernier. Autrefois salle de cinéma, ce lieu désormais consacré aux arts de la scène termine avec un spectacle musical sa première demi-saison. Tour d'horizon avec son directeur Pierre-Alexandre Jauffret.

A l’origine, c’était un cinéma, coquinement dit «Le Pigalle». Il était dirigé par Jean Fournier, Valaisan de naissance, réalisateur de son état, qui, dans les années 1960, avait installé son «Pigalle» au bord de l’Arve, sur la Commune de Carouge, à un jet de pierre de Genève.

Depuis septembre 2008, «Le Pigalle» s’appelle officiellement «Alchimic». Dans ce troc, le lieu n’a rien perdu de sa magie puisqu’il est désormais dévolu au théâtre. Un théâtre où l’alchimie revendiquée «naît du mariage des disciplines», comme le dit très fièrement Pierre-Alexandre Jauffret, le nouveau directeur des lieux.

Jamais de trop!

Mêler texte, musique, chansons, vidéo, son, lumière…, faire cohabiter dans une même représentation les différents langages artistiques, reste l’ambition première de Jauffret. C’est pour cela, et rien que pour cela, qu’il a créé son «Alchimic». Un lieu rénové par le propriétaire et équipé techniquement grâce à la Fondation Wilsdorf. Une demande de subvention auprès des autortités de la commune de Carouge est en suspens.

L’Alchimic, une structure de 100 places, vient ainsi gonfler le nombre de scènes genevoises: trente environ – institutions et salles alternatives confondues. Avec ce nombre, n’y a-t-il donc pas saturation à Genève et l’Alchimic n’est-il pas un théâtre de trop?

A la question, Jauffret répond par un bond : «Comment !!! A-t-on jamais entendu dire qu’il y a trop de chaînes de télévision? Je parie sur l’intelligence du public qui reconnaîtra dans le langage que je lui propose celui d’aujourd’hui. Nous communiquons par SMS, courrier électronique, webcam, vidéo, internet… La pluridisciplinarité fait partie de notre univers quotidien. Elle n’avait pas encore de toit à Genève, il était donc temps de lui fournir une salle».

Pourtant, plusieurs scènes genevoises mettent à leur affiche des spectacles pluridisciplinaires. Forum Meyrin et Le Loup, par exemple. Jauffret le sait, mais il se défend de faire du «copier-coller». «Je ne suis en concurrence avec aucun théâtre et je ne fais de l’ombre à personne, lâche-t-il. A l’Alchimic, c’est différent. Mon affiche ne décline pas séparément théâtre, cirque, danse ou musique comme dans d’autres lieux. Le mélange de genres, je le veux dans une même production. C’est même à cette condition que j’accepte les propositions que l’on me soumet».

Des propositions, Jauffret en reçoit deux par semaine, ça vient de toutes parts, du plus petit au plus grand metteur en scène. «Vous comprenez, les artistes indépendants romands ne disposent pas de beaucoup de salles pour s’exprimer, précise-t-il, surtout depuis que le Grütli, lieu convoité par de nombreuses compagnies romandes, est devenu un grand ‘laboratoire’ tourné vers des créations expérimentales. L’Alchimic reste donc indispensable».

Au cœur de sa programmation, le nouveau directeur a placé textes et chansons, du moins pour cette première demi-saison qui s’achève en décembre avec un spectacle musical mis en scène par Vincent Aubert et intitulé «Entre deux départs». Ici, les mots sont de Garcia Marquez et les notes de Narciso Saul: un écrivain et un musicien latino-américains qui racontent des départs, des arrivées, des rencontres, des passions, des séparations… bref, la vie.

Essai à transformer…

Ce que souhaite Jauffret, c’est passer le plus rapidement possible à une programmation annuelle qui court de septembre à juin. Car pour l’instant, il fonctionne par demi-saison, obligatoirement, ses moyens financiers étant très limités.

«J’attends, explique-t-il, la décision de mes autorités de tutelle qui doivent se prononcer prochainement sur les subventions de fonctionnement dont j’ai impérativement besoin. Car pour l’instant, chaque compagnie qui se produit à l’Alchimic arrive avec ses sous. Moi je ne fais que fournir la salle».
Mais notre interlocuteur est optimiste: «Je pense qu’on ne me refusera pas l’aide, vu que ma première demi-saison est très satisfaisante. C’est plus que je n’espérais. Pour les «7 nouvelles» d’Anton Tchekhov, nous avons joué à guichets fermés».

Sur les quatre spectacles programmés de septembre à décembre, trois sont des créations, dont une, «La Fête», fut montée par Laurence Calame. Pour un début, c’est du solide, d’autant que Calame, habituée des scènes institutionnelles, a apporté son lot d’expérience et emmené dans son sillage trois très bonnes comédiennes romandes.

Et le reste est à l’avenant, à en croire le directeur des lieux qui promet de belles surprises pour sa deuxième demi-saison. Laquelle démarre le 9 janvier avec «Don Quichotte: miroir et reflets», une pièce du Genevois Richard Gauteron. Pour la suite, motus et bouche cousue. On en saura plus fin décembre. C’est du moins le souhait de Jauffret.

swissinfo, Ghania Adamo

Né à Genève en 1961.

Metteur en scène d’opéra, il étudie d’abord dans sa ville natale jusqu’à l’obtention de la maturité scientifique.

Sa formation, il la reçoit sur le tas en assistant de grands metteurs en scène européens, comme Antoine Bourseiller et Pier-Luigi Pizzi.

Il travaille ainsi sur plusieurs scènes lyriques d’Europe : Paris, Londres, Madrid, Genève, Venise, Gênes…

La création de spectacles le passionne et le conduit à s’intéresser au théâtre également.

Dès 1982, il signe pour les planches des adaptations théâtrales, comme «L’Odyssée» d’Homère qu’il présente à Genève.

Suivront «Le Petit Prince» et «Vol de nuit» de Saint-Exupéry, ainsi que «L’Apocalypse» selon Saint-Jean et «L’Assommoir» de Zola.

En 2001, il fonde sa compagnie l’Alchimic avec laquelle il explore un théâtre musical de gestes et de mouvements.

Parallèlement, il réalise des galas événementiels pour de grandes salles genevoises, comme Palexpo et l’Arena.

«Entre deux départs», spectacle musical de Vincent Aubert. A voir à l’Alchimic, du 8 au 21 décembre.

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