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Droit international: l’UDC ouvre la bataille avec son initiative

L'UDC lance la bataille du droit suisse contre le droit international. A gauche, le président du parti Albert Rösti et son vice-président Oskar Freysinger. KEYSTONE/PETER SCHNEIDER sda-ats

(Keystone-ATS) Le droit suisse doit primer sur le droit international. L’UDC a déposé vendredi son initiative populaire “Le droit suisse au lieu de juges étrangers”, munie de 116’709 signatures. Le parti accuse les élites d’un “coup d’Etat” contre le peuple et la Constitution.

Selon la Constitution fédérale, le peuple suisse et les cantons sont le législateur suprême de notre pays, a déclaré Christoph Blocher lors d’une conférence de presse à Berne. Or l’autodétermination législative de la Suisse est constamment minée.

Les coupables, selon le tribun de la droite populiste: le Parlement, le gouvernement, l’administration, la justice et les professeurs de droit. “Ils ont constitué une alliance inquiétante pour destituer sournoisement le constituant.”

Leur intention est évidente, ces milieux cherchent à museler la démocratie directe. “Il ne s’agit ni plus ni moins d’un coup d’Etat” contre le peuple et la Constitution, accuse l’ancien conseiller fédéral Christoph Blocher.

Et le président du parti Albert Rösti de renchérir: depuis 2012, plusieurs décisions du Tribunal fédéral placent le droit international au-dessus des décisions du peuple suisse.

La mise en oeuvre de l’initiative sur le renvoi des étrangers criminels, l’initiative sur l’internement à vie, sur l’imprescriptibilité des crimes pédophiles: autant d’exemples où les juges de Lausanne ont, par leurs décisions, bafoué la démocratie directe et la séparation des pouvoirs, selon l’UDC.

Mère des batailles

Mais l’UDC tient la solution, affirme-t-elle: son initiative populaire corrigera ce cap dangereux en donnant la primauté du droit suisse par rapport au droit international.

Car, “nous sommes des souverainistes convaincus”, a abondé le vice-président de l’UDC et conseiller d’Etat valaisan Oskar Freysinger. La question de la primauté du droit suisse est donc la mère de toutes les batailles, toutes les autres problématiques, notamment l’asile et la migration, y sont liées.

Dénoncer les traités

Le texte stipule que la Confédération et les cantons respectent le droit international. Mais la Constitution fédérale est placée au-dessus, “sous réserve des règles impératives du droit international” (interdiction de la torture, du génocide et de l’esclavage, notamment).

L’initiative indique aussi que la Confédération et les cantons ne contractent aucune obligation de droit international qui soit en conflit avec la Constitution suisse. Sinon, ces obligations doivent être adaptées et les traités dénoncés, si besoin.

Cibler l’UE

L’initiative sur l’autodétermination vise aussi à empêcher toute reprise automatique ou “dynamique” du droit de l’UE. Christoph Blocher a lancé la semaine dernière sa campagne contre un accord-cadre institutionnel entre la Suisse et l’UE. Selon lui, un tel accord obligerait le pays à suivre les décisions de la Cour européenne de justice et le mettrait sous tutelle.

Le moment choisi pour relancer la fronde contre l’UE se greffe sur le calendrier serré de la mise en oeuvre de l’initiative contre l’immigration de masse. Aucune solution consensuelle n’a été trouvée avec l’UE pour l’instant. Le délai est fixé au 17 février 2017, moment où la Suisse devra introduire une clause de sauvegarde unilatérale et des contingents.

Crédibilité en question

Le texte devra encore passer devant le Parlement et le Conseil fédéral. Mais de nombreuses voix critiques, dont des organisations comme Amnesty ou Opération Libero, se sont déjà fait entendre. On lui reproche de s’attaquer frontalement aux droits humains et à la Convention européenne des droits de l’homme.

Vendredi, une vaste alliance de partis de tous bords est également sortie du bois pour dénoncer un texte qui “torpille les intérêts de la Suisse”. En plus des droits humains, l’initiative met en danger la politique de sécurité et les intérêts économiques du pays.

Le succès économique et la stabilité politique de la Suisse résident aussi dans le droit international, rappellent le PS, le PLR, le PDC, les Verts, le PBD et le PEV dans un communiqué. Faire primer le droit suisse sur le droit international en tout temps serait une violation contractuelle. Et nuirait massivement à l’attractivité de la place helvétique et à la crédibilité du pays.

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