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Le National abandonne l’idée d’une retraite à 67 ans

Le National a fait quelques concessions lundi sur la réforme des retraites. Il a fermé la porte à un relèvement automatique de l'âge de la retraite à 67 ans (photo symbolique). KEYSTONE/CHRISTOF SCHUERPF sda-ats

(Keystone-ATS) En attendant le dénouement final de la réforme des retraites, le National a fait lundi un pas en direction du Conseil des Etats. Il a renoncé au mécanisme de relèvement automatique de l’âge de la retraite à 67 ans, et à couper dans les rentes de veuves.

La réforme de la prévoyance vieillesse 2020 veut garantir le financement des 1er et 2e piliers. Plusieurs mesures sont prévues: un relèvement de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans, une augmentation de la TVA et une baisse du taux de conversion du capital de prévoyance professionnelle en rente de 6,8 à 6%.

Ce dernier point n’est plus contesté au Parlement, mais il pourrait faire capoter la réforme devant le peuple. Les deux Chambres s’accordent donc sur la nécessité de compenser cette réduction des rentes professionnelles, mais s’opposent idéologiquement sur la manière de le faire.

Le bonus de la discorde

La Chambre du peuple a réitéré par 102 voix contre 91 son refus de la solution du Conseil des Etats, “un su-sucre” pour les travailleurs, a critiqué Regine Sauter (PLR/ZH). Cette option veut compenser dans l’AVS via un bonus de 70 francs pour les nouveaux rentiers et une augmentation de 150 à 155% du plafond de rente pour les couples mariés.

Le National s’en est tenu à son modèle qui mise sur une épargne accrue des salariés pour la prévoyance professionnelle. Il l’a cependant un peu retouché.

Le prélèvement sur les salaires des 25-34 ans serait de 5% et la cotisation pour les 35-44 ans passerait de 9 à 8%. La contribution serait ensuite plafonnée à 13,5%. Le niveau de rentes serait garanti car les contributions seraient prélevées sur l’entier du salaire assuré, ce qui devrait améliorer la situation des employés à temps partiel et en particulier des femmes.

Hausse de la TVA

Autre grande divergence: Le National a maintenu par 104 voix contre 91 sa volonté de limiter la hausse de TVA à 0,6 point de pourcentage. La Chambre des cantons considère que seul un point entier permettra de garantir le financement de l’AVS jusqu’en 2030.

Entre les deux modèles, la différence de financement du fonds AVS se montera à 18 milliards de francs en 2030. “Un coût incommensurable pour les générations suivantes”, a dénoncé le conseiller fédéral Alain Berset. A la tribune, UDC et PLR ont pourtant averti: augmenter la TVA au-delà de 0,6% revient à franchir une ligne rouge.

Exit la retraite à 67 ans

Le National a cédé sur tout le reste. Il a abandonné tacitement l’idée d’une augmentation automatique de l’âge de la retraite jusqu’à 67 ans si le fonds AVS ne couvre plus que 80% de ses dépenses et qu’aucune réforme n’est engagée. Pour le Conseil des Etats, ce mécanisme menaçait toute la réforme.

Les députés ont décidé d’épargner les rentes de veuves sans enfants à charge ainsi que celles pour enfant de l’AVS, qui complètent la rente vieillesse pour les rentiers ayant encore une progéniture à charge. Ils ont largement refusé de réserver les rentes pour enfants adoptés à ceux qui vivent en Suisse.

Ils ont finalement accepté par 160 voix contre 35 de mieux cadrer les assureurs vie, qui devront affecter 92% de leurs excédents à leurs assurés et limiter leurs primes pour le risque décès et invalidité à 100% du sinistre attendu.

Concessions en retour

Les tractations à venir au sein de la conférence de conciliation ont imprégné les débats. En renonçant à la retraite à 67 ans, l’UDC, le PLR et le PVL ont cédé sur un élément-clé pour le National. Ils attendent en contrepartie des concessions de la part des sénateurs.

“Nous avons éliminé sept des neuf divergences. C’est maintenant au tour du Conseil des Etats de faire de même”, a précisé Ignazio Cassis (PLR/TI). Et si la Chambre des cantons ne s’y résout pas, “elle portera la responsabilité de l’échec de la réforme”, a ajouté Isabelle Moret (PLR/VD) au nom de la commission.

La solution du Conseil des Etats est déjà un compromis, a rappelé de son côté la gauche. Les femmes sacrifient déjà beaucoup à la réforme, pas question de faire d’autres concessions. Le ministre des assurances sociales s’est contenté de rappeler aux députés qu’un échec de la réforme coûterait plusieurs dizaines de milliards de francs.

TVA et réforme liées

Le National a accepté de lier le sort des deux volets du projet. La réforme n’entrera en vigueur que si le peuple et les cantons disent oui à la révision de la constitution pour augmenter la TVA. Il ne sera donc même pas nécessaire de lancer un référendum contre le volet législatif pour tout faire capoter.

Les changements touchant au 2e pilier entreront en vigueur seulement à partir de 2019, afin de laisser aux caisses de pensions le temps de faire les adaptations nécessaires. Les nouveaux prélèvements de TVA et l’élévation progressive de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans commenceront à courir dès 2018.

Conférence de conciliation

Le dossier sera traité mardi en conférence de conciliation. Les tenants de la solution du Conseil des Etats, soit la gauche, le PDC et le PBD y étant majoritaires, le bonus de 70 francs et la hausse d’un point de la TVA gardent toutes leurs chances. Le verdict final au Parlement devrait tomber jeudi, voire vendredi.

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