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Ueli Maurer, de soldat de l’UDC à ministre

Pixsil

Dirigeant de la section zurichoise de l'Union démocratique du centre (UDC / droite nationaliste), Ueli Maurer a été élu mercredi au gouvernement. Le nouveau conseiller fédéral se dit prêt à collaborer avec ses collègues au nom de la concordance.

Bien qu’il ait, par le passé, à plusieurs reprise affirmé ne pas être intéressé par la charge de ministre, Ueli Maurer fait désormais partie du gouvernement. Ce changement de cap s’explique avant tout par la fidélité absolue à sa formation politique.

«Ce qui compte, c’est la décision du parti: si l’Union démocratique du centre a l’intention de retourner au gouvernement, je suis prêt à assumer ce rôle», avait-il déclaré fin novembre dans une interview accordée au quotidien alémanique Tages Anzeiger.

Cette année 2008 avait déjà été caractérisée par un changement important pour le politicien zurichois. En mars, Ueli Maurer avait en effet abandonné la présidence du parti national pour se consacrer à ses activités de consultant en communication et de député au Parlement fédéral.

Peu de mois plus tard, toujours par fidélité à son parti, il avait cependant accepté d’assumer la direction de la section zurichoise de l’UDC, celle qui, selon lui, montre la voie que doit suivre le parti national.

Infatigable

A en croire ceux qui le connaissent de près, Ueli Maurer – qui a une formation commerciale et de comptable – est un grand travailleur totalement dévoué à son parti. C’est lui, en qualité de président du parti national, qui a fait progresser sa formation, la faisant passer de 14,9% de l’électorat en 1996 à 29% en 2007. Durant ces années, Ueli Maurer s’est consacré entièrement au développement de l’UDC, voyageant énormément à travers tout le pays.

Le nouveau ministre a su implanter son parti dans toute la Suisse, même dans les régions francophones. Il a par ailleurs réussi à réunir le parti autour de l’aile très conservatrice du canton de Zurich, symbolisée par son leader historique Christoph Blocher. Sous la présidence d’Ueli Maurer, 12 nouveaux partis cantonaux et 600 sections locales ont été créées.

Durant cette période, Ueli Maurer a mis l’accent sur la formation du personnel au sein de l’UDC, organisant des cours dans lesquels il expliquait la nécessité d’attirer les électeurs avec quelques messages clefs exprimés dans un langage simple et direct.

L’ombre de Blocher

Souvent dépeint comme un simple exécutant des ordres de Christoph Blocher, Ueli Maurer a souvent été surnommé «Ueli, der Knecht» (Ueli, le serviteur, par analogie avec le titre d’un roman de Jeremias Gotthelf) ou alors présenté comme un clone du tribun zurichois.

Dans une interview récente, Ueli Maurer a expliqué la répartition des tâches avec le leader historique du parti. Il affirmait que Christoph Blocher est le stratège capable de déterminer quels sont les thèmes politiques les plus importants, alors que son rôle à lui, consiste à obtenir l’acceptation politique nécessaire pour les thèmes à débattre et à choisir la manière de les présenter à l’opinion publique.

A ce propos, Ueli Maurer a indiqué que c’était lui qui avait choisi les affiches très controversées de la campagne électorale 2007, qui représentaient des moutons blancs chassant un mouton noir. Il avait préféré cette image à celle d’un homme de couleur avec un couteau plein de sang.

Prêt à collaborer

Selon le président du Parti démocrate-chrétien (PDC / centre-droit) Christophe Darbellay, «il existe deux Ueli Maurer. Il y a d’une part un personnage pragmatique, intelligent, sympathique, avec qui il est possible de discuter tranquillement. D’autre part, il y a un Ueli Maurer dur, dogmatique, qui se soucie uniquement des intérêts de son propre parti. Un seul des deux est compatible avec la charge de conseiller fédéral.»

Ueli Maurer a souvent fait preuve d’une grande dureté, surtout dans le cadre de confrontations avec des collègues de parti dont il estimait qu’ils n’avaient pas accompli leur tâche de manière appropriée. Il avait notamment qualifié les ministres Samuel Schmid et Eveline Widmer-Schlumpf – à l’époque encore membres de l’UDC – d’«appendice à éliminer».

Rappelons que suite à la non réélection de Christoph Blocher au gouvernement, en décembre 2007, l’UDC avait décidé de ne pas reconnaître ces deux ministres comme faisant partie de la famille UDC. Après le refus d’Eveline Widmer-Schlumpf de quitter le gouvernement et le parti, le comité central avait exclu la section grisonne du parti national. Le groupe dissident avait alors fondé en 2008 le nouveau Parti bourgeois démocratique, auquel ont adhéré les deux ministres.

Avant même son élection, le nouveau conseiller fédéral s’est cependant dit prêt à collaborer pour le bien du pays, même si cela implique pour lui d’être en contradiction avec les positions officielles du parti. «La collégialité n’est pas un problème, elle fait parti du système politique. Je suis prêt à collaborer de manière constructive avec Eveline Widmer-Schlumpf, à défendre les missions de l’armée à l’étranger et la libre circulation des personnes», avait-il déclaré.

Plutôt couscous

Fils de paysan, marié, père de six enfants avec lesquels il aime passer son peu de temps libre, Ueli Maurer se définit comme un patriote. Il passe ses vacances exclusivement en Suisse, l’un de ses livres préférés est «Heidi» et l’hymne national fait partie de ses morceaux de prédilection.

Le nouveau ministre refuse catégoriquement l’étiquette de raciste. «Dans notre parti, il n’y a pas de place pour les extrémistes, explique-t-il. Mon épouse est née et a grandi au Ghana, nous avons beaucoup d’amis de couleur et, chez nous, on mange plus souvent du couscous que de la raclette.»

«En politique, affirme-t-il, celui qui n’utilise pas des expressions fortes n’a aucune chance de capter l’attention. Si je parle de la hausse de la criminalité, les journalistes baillent. Si, en revanche, je parle de criminalité étrangère en hausse, soudainement, ils m’écoutent.»

swissinfo, Andrea Clementi
(Traduction de l’italien: Olivier Pauchard)

Il est né le 1er décembre 1950 à Wetzikon, dans le canton de Zurich. Après un apprentissage d’employé de commerce, il obtient un diplôme de comptable et devient responsable de la coopérative agricole Hinwil-Bauma. En 1994, il est nommé directeur de l’Association zurichoise des paysans.

Sa carrière politique commence en 1978 au conseil communal de Hinwil (canton de Zurich). Cinq ans plus tard, Ueli Maurer est élu au parlement cantonal, dont il est le président en 1990-1991. En 1991, il entre au Conseil national (Chambre basse du Parlement) et en 1996, il devient président de l’Union démocratique du centre.

Sa carrière politique a aussi été marquée par des défaites. En 1991, il n’est pas parvenu à entrer au gouvernement du canton de Zurich, battu par l’actuel ministre des Transports, le socialiste Moritz Leuenberger. Et en 2007, la Verte libérale Verena Diener l’a battu lors de l’élection au Conseil des Etats (Chambre haute du Parlement).

En 2008, Ueli Maurer quitte sa fonction de président de l’UDC nationale pour reprendre, de manière un peu surprenante, celle de président de la section zurichoise.

A l’armée, Ueli Maurer a le grade de major.

Il est marié et père de six enfants.

L’Union démocratique du centre (UDC) se situe à droite du paysage politique suisse.

Née en 1971 de la fusion de deux partis défendant les intérêts des paysans et des artisans, elle a connu une progression fulgurante depuis le début des années 90.

Prônant une politique économique libérale, une coopération limitée avec l’Union européenne (UE) et un durcissement envers les étrangers et les réfugiés, l’UDC est devenue le premier parti du pays.

En 2003, elle a obtenu un second siège au gouvernement avec l’arrivée de son ténor Christoph Blocher. Ce dernier a été remplacé, sans l’aval du parti, par Evelin Widmer-Schlumpf en décembre 2007.

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