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Une Suissesse fait découvrir New Delhi à vélo

Choc des univers... Katherine face à un mendiant indien. swissinfo.ch

Ville chaotique, trafic dangereux... telle est la réputation de New Delhi, la capitale indienne. Mais depuis peu, un Hollandais et une Suissesse proposent une visite de la ville qui détourne ce cliché: un tour à bicyclette aux premières lueurs du matin.

La ville est encore endormie. Quelques chauffeurs de taxi se sont arrêtés au coin de la rue pour engloutir leur premier chaï de la journée [thé au lait sucré avec des épices, typiquement indien]. Une légère brume refuse de s’envoler. Un décor de matin d’hiver, à l’entrée de ‘Old Delhi’, la vieille ville de la capitale indienne.

T-shirt orange, et énergie à revendre, Remco fait son apparition. Il est 6h45, et le guide a déjà préparé les vélos des huit participants: « Ils brillent, non? On les astique tous les matins » s’extasie le jeune néerlandais, tout fier. Ce matin, fait rare, quatre inscrits feront faux bond. «C’est vrai que c’est tôt comme rendez-vous», regrette Remco, «mais c’est la seule heure à laquelle il est possible de faire du vélo dans Old Delhi. Après, il y a plein de monde dans les rues, des vendeurs sur les trottoirs, des deux-roues partout!»

Slalom entre vaches et scooters

Le petit groupe du ‘Delhi by Cycle’ s’ébranle: Remco en tête et Mukesh, le jeune Indien qui accompagne le groupe, en queue de cortège. Quelques coups de pédale pour s’habituer au vélo sans vitesses et c’est parti!

Michelle, une Australienne qui n’est pas remontée sur une bicyclette depuis des années, n’en revient pas: «C’est beaucoup plus facile qu’on ne le croit! Depuis la voiture, on se dit que c’est un trafic de folie, qu’on n’arrivera jamais à s’en sortir. Mais en fait, quand on est dedans, on se débrouille sans problème.»

«Levez la tête, la visite se passe aussi dans les airs », lance le guide en passant sous des poteaux électriques surchargés de connexions illégales.

La visite commence dans des ruelles étroites de Old Delhi: une colonne d’Occidentaux entre les vaches sacrées, des fillettes en tresses allant à l’école et des embouteillages de charrettes à bœufs. Ici, les épiciers ont pris l’habitude de ce passage quotidien et lèvent les yeux de leur journal pour saluer joyeusement l’équipée: «Namaste, namaste, hello!».

Accro au vélo

L’idée de ce projet – loufoque, aux yeux des Indiens pour qui la bicyclette est un véhicule de pauvres – est né chez… un Hollandais évidemment. «Je voulais faire quelque chose de nouveau: ça faisait cinq ans que je travaillais comme journaliste à Delhi, et je commençais à avoir l’impression de me répéter. Et puis, j’ai pensé au vélo – parce que je suis Hollandais, que j’ai toujours circulé à bicyclette, et parce que j’ai visité Bangkok, où les tours à vélo marchent du tonnerre», explique Jack Leenaars, un grand gaillard avec un énorme sourire toujours aux lèvres.

L’excursion donne un aperçu des principaux lieux touristiques d’Old Delhi. «Prenez un foulard, nous allons visiter le marché aux épices», avertit Remco, «couvrez-vous le nez, si vous ne voulez pas éternuer!»

Dans le cour interne de l’immeuble, d’énormes sacs blancs, au contenu rouge vif: des kilos de piments rouges, indispensables aux cuisinières du coin. Remco guide son groupe jusqu’au toit du marché, pour apprécier la vue. Le jeune homme connaît son chemin – il effectue le même tour environ cinq fois par semaine – dès qu’un groupe de 2-3 personnes s’est inscrit pour la balade.

Un deuxième parcours

Le marketing et l’administration de ‘Delhi by Cycle’, c’est une Suissesse spécialiste du tourisme dans l’Asie du sud-est, qui s’en charge. Après avoir travaillé pour de grands groupes de tours-opérateurs, Aline Stucki a tout laissé tomber pour faire du vélo à Delhi.

«A mon précédent poste, les clients étaient tellement nombreux qu’ils devenaient des numéros de dossier, des groupes. Ici, je les vois tous un à un. J’ai la sensation qu’ils sont plus réels, plus vivants.» Le matin, la jeune Vaudoise, fait donc office de guide à bicyclette, et l’après-midi elle visite les hôtels et les agences de voyage pour leur parler du tour.

Partis de presque rien – trois bécanes, un guide et du bouche-à-oreille – les deux entrepreneurs sont aujourd’hui bien établis. Ils viennent d’ouvrir un deuxième parcours et songent à en créer un troisième. Un nouveau guide doit arriver la semaine prochaine, comme huit bicyclettes flambant neuves. «J’aimerais bien que – grâce à nous – les Indiens apprennent à apprécier le vélo», sourit Aline, «pas seulement qu’ils viennent à notre excursion, mais qu’ils se mettent à pédaler aussi dans leur vie de tous les jours… »

A Old Delhi, la visite touche à sa fin. Attablés autour d’un petit-déjeuner local – mouton en sauce et pain – les cyclistes du jour sont ravis. «Je n’aurais jamais pu voir tout ça en trois heures si j’avais dû marcher», s’exclame Michelle. Katherine, elle, est presque une habituée du tour: c’est la deuxième fois qu’elle visite Old Delhi à vélo: «Je trouve que c’est la seule manière d’apprécier ce quartier! A vélo, on ne se fait pas harceler comme la plupart des touristes. Les gens nous regardent, nous sourient, mais ils n’essaient pas de nous vendre quelque chose.»

Miyuki Droz Aramaki, New Dehli, swissinfo.ch

Quotidien. Le tour à vélo de Delhi by Cycle est proposé tous les matins. Il a lieu à partir de 2 à 4 participants – le nombre minimum de personnes est négociable.

Accessible. L’excursion dure trois heures, avec une pause ‘thé’ et une pause ‘petit-déjeuner’. Le parcours est accessible à tous, pas besoin d’être un bon cycliste.

Connaught Place. Le point de départ et d’arrivée est situé à proximité de Connaught Place, au cœur de Delhi.

Réserver. Pour réserver ou pour obtenir plus d’informations, appeler Aline au +91 (0) 9818 55 7784 ou Jack au +91 (0)9818 98 1194.

Deux Delhi. La ville de Delhi est composée de deux parties: Old Delhi et New Delhi.

Moghols. Au cours des premiers siècles après J.-C., Delhi a été la capitale de plusieurs empires mais l’événement décisif pour la ville sera la prise du Nord de l’Inde par les Moghols au 16ème: ceux-ci feront de Delhi la capitale de l’Inde musulmane.

Shah Jahan. La cité prend la forme qu’on lui connaît aujourd’hui pendant le règne de Shah Jahan (1628-1658), considéré comme ‘l’âge d’or des moghols’.

Old Delhi. L’empereur, qui est aussi le commanditaire du Taj Mahal, fait construire le Fort Rouge et la Grand Mosquée (Jama Masjid). Ces deux monuments et le dédale de ruelles qui les entourent composent ce qu’on appelle aujourd’hui ‘Old Delhi’.

Britanniques. ‘New Delhi’ voit le jour au début du XXe siècle, lorsque les Britanniques décident de transférer la capitale de leur Empire de Calcutta à Delhi.

Lutyens. L’architecte Edwin Lutyens (1869-1944) est chargé de la conception et de la réalisation d’un quartier plus agréable qu”Old Delhi’ pour les colons. De grandes avenues boisées organisées en étoile, des demeures avec jardins…

‘New Delhi’ est aujourd’hui devenu le quartier des ambassades, alors qu’Old Delhi est resté un secteur de la ville indien et populaire.

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