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Vingt-cinq organisations contre la traite des femmes

Beaucoup de prostituées sont victimes de la traite des femmes. Keystone

La traite des femmes existe bel et bien en Suisse, mais la Suisse officielle ne lutte pas assez contre ce phénomène, déplore la coalition «Euro 08 contre la traite des femmes»,

C’est pourquoi une campagne d’information a lieu dans plusieurs villes suisse le 8 mars – date de la Journée de la femme. Les autorités seront également sensibilisées au travers d’une pétition.

La Suisse n’agit pas suffisamment en faveur des victimes de ces actes criminels et n’assure pas le respect de leurs droits, ont défendu vendredi à Berne plusieurs représentants de la coalition «Euro 08 contre la traite des femme». Ses membres ont donc décidé de lancer une pétition qui réclame essentiellement «le droit à un séjour sûr en Suisse».

Trop peu de victimes de la traite des femmes sont reconnues comme telles par Berne, regrette Dori Winkler, co-présidente de la coalition et représentante du centre d’information pour les femmes (FIZ). La Confédération en recense 3000, mais seules 5% d’entre elles s’adressent au FIZ. Cette situation s’explique par le fait que la Suisse place la lutte contre l’immigration illégale au centre de ses priorités, estime Dori Winkler.

Il faut donc cesser de criminaliser les victimes de la traite des femmes en raison de leur séjour illégal en Suisse ou pour d’autres raisons, exige Ruth-Gaby Vermot, co-présidente de la coalition. Traumatisées, ces «femmes-esclaves» se sont souvent enfuies et soustraites à leurs bourreaux, explique l’ancienne députée socialiste. Elles ont donc besoin de calme et d’un délai de réflexion avant de parler.

Permis de séjour

Lancée à l’occasion de la Journée des femmes de samedi, la pétition des 25 organisations demande ainsi au gouvernement, au Parlement et aux cantons d’accorder aux victimes un permis de séjour. Et ce, indépendamment de la volonté de ces femmes de témoigner.

Le texte exige aussi que les campagnes de sensibilisation sur la traite des femmes soient encouragées. Il réclame en outre que les cantons assurent aux victimes un standard de protection obligatoire. Autre revendication: que les policiers et les autorités judiciaires reçoivent des formations continues en la matière.

Dans ce but, la pétition demande que Berne ratifie au plus vite la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite d’êtres humains. Cette convention contient en effet les exigences soulevées par la coalition.

L’Ukraine visée

Selon une étude des Nations Unies, entre 700’000 et 2 millions de personnes sont victimes chaque année de la traite d’êtres humains, principalement des femmes et des jeunes filles, souligne Ruth-Gaby Vermot.

Les causes de cette réalité sont souvent liées à une situation précaire sur le marché du travail, à la pénurie d’emploi et de formation et à la discrimination sociale des femmes dans de nombreux pays. En Ukraine, dont de nombreuses femmes exploitées en Suisse sont originaires, 70% des chômeurs sont de sexe féminin, selon une étude.

Les promesses mensongères des trafiquants pour une vie meilleure, même assorties de violence, convainquent nombre de femmes confrontées à une situation sans issue, déplore Ruth-Gaby Vermot. Les criminels ne renoncent pas à ce «marché lucratif», se sachant protégés par la corruption et le blanchiment de l’argent sale, dénonce la députée au Conseil de l’Europe.

Campagne dès samedi

Dès samedi, Journée internationale de la femme, différentes actions de sensibilisation auront lieu dans les villes hôtes de l’Euro 2008. Des victimes symboliques de la traite des femmes traverseront les centres-villes de Genève, Berne, Bâle et Zurich.

Durant la compétition, un spot de sensibilisation sera diffusé sur des écrans géants et à la télévision. Le message s’adresse en particulier aux hommes, clients potentiels de prostituées victimes de la traite des femmes, précise Ruth-Gaby Vermot.

swissinfo et les agences

Les 25 organisations demandent

– au gouvernement et au Parlement:

1. d’introduire, pour les victimes de la traite, le droit à un permis de séjour qui ne dépende pas de leur volonté de témoigner;

2. de définir des normes contraignantes relatives à la protection des victimes de la traite des femmes pour tous les cantons;

3. d’encourager les campagnes de sensibilisation et d’information sur la traite des femmes en Suisse;

4. de ratifier rapidement la Convention du Conseil de l’Europe contre la traite des êtres humains.

– aux gouvernements cantonaux:

1. de ne pas criminaliser les victimes de la traite des femmes mais de leur octroyer un permis de séjour;

2. de leur procurer un lieu de séjour sûr ainsi que l’assistance et le conseil de spécialiste;

3. de former régulièrement la police, la justice et les services des migrations, de les obliger à collaborer avec les centres spécialisés et à engager des spécialistes de la traite des êtres humains.

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