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«Ça serait plus simple de sortir avec un garçon!»

C'est par où le coeur ...de Nadia? Image tirée du Nadia se marie

Nadia se marie, 10e tome des aventures de Titeuf, tiré à deux millions d’exemplaires, est sorti mardi en Suisse romande.

Pour la première fois, Zep construit un véritable récit sur 46 planches. Un grand espace «pour développer l’état amoureux de Titeuf». Interview.

«Tu sens bon, on dirait le printemps…». Titeuf révise avec son copain Manu. Son objectif: séduire Nadia, parce qu’il semblerait qu’elle va se marier. Dès le premier dialogue, le lecteur sait où Zep va l’emmener.

Ça va être drôle, mais plein de sensibilité aussi. Ça parle des filles et des garçons «qui se tournent autour sans s’approcher», comme dit Zep, de l’attirance et du dégoût qu’on ressent à cet âge-là pour l’amour et le sexe, ces grands inconnus.

C’est du sérieux

Souvent, on sourit. Par exemple, quand Titeuf rêve de son premier baiser à Nadia: «Eurk! Les salives qui se mélangent, c’est dégueu!»

«A cet âge, on est sans cesse confronté à ce que va être la sexualité», commente le dessinateur.

«On ne ressent pas du tout le désir de mélanger sa salive avec celle d’une fille ou de se mettre tout nu contre son corps. Mais on a besoin d’en parler pour rendre le truc moins dramatique.»

Oui, parce que si les maladresses du petit bonhomme à la mèche folle nous font rire, c’est aussi du sérieux tout ça. L’espoir, l’euphorie, les stratagèmes de séduction, la déception, le chagrin d’amour…

«Ils singent des situations d’adulte avec toute l’honnêteté dont peut être capable un enfant, ajoute Zep. C’est marrant. Et en même temps, Titeuf force l’admiration, parce qu’on a tendance à perdre cette spontanéité quand on devient adulte.»

A chacun sa Nadia

Adulte, on oublie peut-être aussi à quel point tout ça a pu être important, fort et douloureux. Désespéré parce que tous ses plans tournent au cafouillage, Titeuf dit à Manu: «Laisse-moi mourir!»

«A cet instant, il pense que sa vie est fichue. Mais quand on est enfant, la vie n’est fichue que pendant dix minutes. Ensuite, on zappe. Mais c’est vrai que l’amour n’est pas réservé aux adultes. On est amoureux depuis tout petit.»

Zep s’en souvient bien. D’ailleurs, les aventures de Titeuf sont largement inspirées de sa propre enfance. Et Nadia… Existait-elle aussi en vrai?

«Dans ma classe, il y avait une fille qui s’appelait Nadia. Tous les garçons étaient amoureux d’elle. Evidemment, elle était inaccessible, comme la Nadia de Titeuf. Je n’ai pas vécu cette histoire rigoureusement, mais il y a toujours une part de vérité.»

Sa vie d’aujourd’hui pourrait-elle également inspirer d’autres histoires à Zep? «Je pense, mais j’ai besoin d’un décalage pour écrire ce qui m’arrive. Ce que je vis aujourd’hui sera peut-être de la matière pour les livres que je dessinerai à soixante ans.»

Un vrai récit

En attendant, Nadia se marie est sorti mardi en Suisse romande et paraîtra deux jours plus tard en France. Avec deux millions d’exemplaires de tirage initial, il pulvérise le total des ventes de l’album précédent, La loi du préau, (1,5 million).

Avec ce 10e tome, Zep a construit son premier vrai récit. Ses neuf albums précédents présentaient en effet une série de sketches.

«Le rythme du gag sur une page est contraignant. Là, j’avais envie de développer l’état amoureux de Titeuf. Il me fallait plus d’espace pour qu’il essaie de comprendre le mystère féminin.»

Et ça, ça prend du temps… C’est sûr. Et même, des fois on n’y arrive pas du tout. Alors, on se dit, comme Manu: «Ce serait plus simple de sortir avec un garçon!» Et vice-versa.

swissinfo, Alexandra Richard

1993, premier album de Titeuf, «Dieu, le sexe et les bretelles», tiré à 7000 exemplaires.
2004, 10e tome, «Nadia se marie», tiré à 2 millions d’exemplaires.
Sortie mardi en Suisse romande. Deux jours plus tard en France.
120’000 exemplaires destinés à la Suisse romande. 1,8 million à la France.
Traduit en quinze langues, dont le chinois, le coréen, le grec et le norvégien.

– Né le 15 décembre 1967 à Genève, Zep, alias Philippe Chappuis, réalise sa première histoire à 8 ans.

– Son premier magazine amateur, qu’il publie dès l’âge de 12 ans, s’intitule déjà Zep, clin d’œil à Led Zeppelin.

– En 1992, Titeuf naît par hasard sur un carnet de croquis, alors que Zep dessine des souvenirs d’enfance.

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