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«Déchaînées» en quête de liberté

Le téléfilm sensible du Suisse Raymond Vouillamoz dévoile les multiples figures de la liberté féminine. sp

Projeté dans le cadre du festival genevois Cinéma Tous Ecrans, le téléfilm du Suisse Raymond Vouillamoz passera prochainement sur la télévision suisse romande. Sensible, ce long métrage superpose deux époques, la nôtre et celle féministe des années 1970.

Du long-métrage à la série TV, en passant par les productions conçues pour le téléphone portable, la quinzième édition de Cinéma Tous Ecrans, qui s’achève, a ratissé large. Le festival genevois, qui a livré son palmarès samedi, compte plusieurs sections dont les plus importantes («Compétition internationale» et «Regards d’aujourd’hui») étaient orientées cette année sur la société, ses valeurs, ses problèmes.

Drogue, exclusion, meurtres, massacres… Voilà pour les «regards» désenchantés qui se sont croisés au fil d’une section où l’on a pu découvrir des cinéastes de différentes nationalités.

Tout aussi riche en identités est bien sûr la «Compétition internationale» qui, pour cette quinzième édition, avait axé sa thématique sur la famille. Au cœur de cette problématique, «le mensonge sous toutes ses formes: du déni à l’omission, de la fuite à l’aveuglement».

Très sensible et très bien conduit

A l’affiche, donc, de cette section internationale, un téléfilm, «Déchaînées», très sensible et très bien conduit par le Suisse Raymond Vouillamoz qui dévoile ici les multiples figures de la liberté féminine.

Lauréat du prix Swissperform 2009 (meilleur film de Télévision Suisse), ce long-métrage, qui sera diffusé sur la TSR le 25 novembre, brasse 40 ans d’histoires familiales, à travers trois générations de femmes vaillantes.

Lucie (Adèle Haenel), 19 ans, qui vit avec sa mère Aurore (Irène Jacob) et sa petite sœur Malou (Paoline Biguine), est étudiante en droit. A l’occasion d’un stage à la TSR, elle découvre, dans des films d’archives portant sur le mouvement féministe suisse des années 1970, le visage d’une femme qui lui ressemble étonnamment.

Intriguée, elle entreprend une recherche jusqu’à l’obsession. Jusqu’à s’apercevoir que cette femme, dont elle se croit le clone n’est autre que sa grand-mère Geneviève, autrefois militante féministe acharnée.

Un passé exhibé par les archives

Geneviève, son passé exhibé par les archives, son présent caché par un secret, est le moteur de «Déchaînées», qui tourne avec fureur. La fureur de Mai 68, son impact sur la Suisse, les débats et combats qui s’en suivirent et qui agitèrent les consciences dans les années 70. La vie en communauté, la liberté sexuelle, le droit à l’avortement et surtout le droit de vote pour les femmes suisses, autant de batailles menées courageusement par celles que les hommes d’alors cantonnent dans des travaux ménagers.

Fureur donc, mais grincement aussi. Grincement des années 2000 vues à travers la vie d’Aurore, avocate, et de ses deux filles. Ce trio très bourgeois est confortablement installé dans son appartement genevois. Mais le confort est ici miné par un passé lourd non pas de nostalgie mais de sens.

Car tout compte fait, le secret qui pèse sur la famille n’est qu’un prétexte dont se sert le cinéaste pour superposer deux époques, celle de Geneviève et de ses petites filles. Deux époques que tout semble séparer mais qu’un même questionnement rapproche: que faire d’une liberté ardemment gagnée?

Gérer l’héritage des aînés n’est pas facile. Faut-il s’en approprier ou le rejeter? La réponse, c’est la petite Malou qui l’apporte. A sa grande sœur enceinte, qui lui dit vouloir avorter pour suivre l’enseignement de Geneviève, l’adolescente rebelle lance: «Tu confonds tout. Tu ne dois pas suivre une idéologie, mais tes choix à toi». C’est aussi ça la liberté.

Ghania Adamo, swissinfo.ch

Quoi «Déchaînées», téléfilm de Raymond Vouillamoz. Avec notamment: Adèle Haenel, Irène Jacob, Séverine Bujard, Yvette Théraulaz…

A voir sur TSR1 le 25 novembre, sur HD Suisse le 15 décembre. La projection du film est également programmée sur ARTE au printemps 2010.

Né à Martigny en 1941, il est l’auteur de plusieurs longs-métrages de fiction ainsi que de nombreux documentaires.

Il a été réalisateur et grand reporter à la TSR (Télévision Suisse Romande), notamment pour l’émission «Temps Présent».

Il a également assuré la direction des programmes de France 3 et dirigé la TSR pendant 10 ans.

Parmi les films qu’il a tournés citons: «Déchaînées», «El Suizo», «Les Amants de la dent blanche», «Le Bois de la justice», «Noces de souffre», «Ce fleuve qui nous charrie».

Adèle Haenel a reçu le Prix d’interprétation féminine pour sa prestation dans «Déchaînées» du 15e édition du festival Cinéma Tous Ecrans.

«Lost Persons Area», de la réalisatrice belge Caroline Stubbe a reçu samedi le Reflet d’or à l’unanimité du jury.

Le Reflet d’or de la meilleure réalisation revient à Tamo I Ovde («Here & There»), un film serbo-germano-américain de Darko Lungulov qui a aussi reçu le Prix de la meilleure critique internationale.

Le Prix d’interprétation masculine a été décerné à Riz Ahmed, principal interprète de «Shifty».

Ce film du britannique Eran Creevy a également reçu le Prix du jury des jeunes. Quant au Prix du public, il a été décerné à «Un ange à la mer» de Frédéric Dumont.

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SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

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