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A Zurich, les déchets encombrants partent en tram

En neuf mois, le Cargo-Tram a déjà récolté 300 tonnes de déchets. swissinfo.ch

Les Zurichois profitent massivement de ce service gratuit et unique au monde. Depuis avril, une fois par mois, le «Cargo-Tram» ramasse les gros déchets de la plus grande ville de Suisse.

Le succès est tel que l’offre sera doublée l’année prochaine.

On voit immédiatement qu’il se passe quelque chose d’inhabituel: ce vendredi après-midi de décembre, aux alentours du rond-point Letzigrund de Zurich. Un nombre surprenant de passants se hâtent en portant des vieux tapis ou des sacs débordant de bois ou de ferraille.

Destination: les wagons parqués à l’arrêt «Letzigrund», trois rames qui forment le «Cargo-Tram.» Une fois par mois, depuis mi-avril, les Zurichois peuvent y amener leurs «cassons» gratuitement entre 15 et 19 heures. Trois autres haltes de la ville sont déjà en service.

Le Service municipal des déchets (ERZ) et les Transports publics de la ville (VBZ) semblent avoir pensé à tout: des vélos avec remorques sont à disposition pour ceux qui voudraient aller chercher quelque chose chez eux.

«Au début, trop de gens sont venus en voiture. Cela encombraît les places, explique Andreas Uhl, porte-parole des VBZ. Mais les gens ont compris et le problème a été résolu.»

Le prix de l’innovation

Unique au monde, le Cargo-Tram a reçu en novembre le «Prix d’innovation» des transports publics. Les Zurichois se targuent d’un effet maximal pour un investissement minimal, «quelques centaines de milliers de francs», déclare la porte-parole d’ERZ Jeannette Jutzeler.

Les rames supportant les deux containers pour le métal datent de la deuxième guerre et le premier wagon, portant le nom «Cargo» est un wagon chasse-neige repeint.

Les Zurichois qui profitent de ce nouveau service sont enthousiastes. «Sensationnel», «intelligent», «très pratique», répondent-ils. Et tous demandent l’horaire 2004, qui doublera le nombre de points de récolte à huit stations disséminées dans toute la ville.

Pour ne pas gêner le trafic normal, les haltes doivent être dotées de rails de déviation. Une trentaine d’arrêts en sont pourvus.

Une maman arrive avec une remorque pleine de cadres de fenêtre. «C’est super. Si on avait dû louer une benne, cela aurait coûté trop cher», explique-t-elle. Un container d’entreprise de 800 litres coûte en effet 47 francs 70 par ramassage.

Comme tous les matériaux incinérables, le bois est déposé dans le camion-benne parqué sur la place. Les wagons n’accueillent que le métal.

En fin d’après-midi, le Cargo-Tram rentre à la centrale des VBZ et les containers sont chargés sur des camions qui se rendent à l’usine de recyclage du canton.

Presque tout est accepté

Penaud, un homme repart avec son disque dur d’ordinateur, refusé par les employés ERZ.

«Les ordinateurs et tous les appareils électriques ou électroniques doivent être ramenés au magasin, explique Stephan Engeler, qui supervise la collecte. Les gens ne sont pas toujours très contents mais l’explication est assez diffusée.»

Affiches et tous-ménages informent en effet régulièrement sur ce qui est repris et ce qui ne l’est pas (produits chimiques, médicaments, casseroles, pneus, pour lesquels d’autres centres de collecte existent).

«Mais notre devoir est aussi de laisser les gens jeter ce qu’ils veulent, dit Stephan Engeler. Nous avons déjà dû chasser des retraités qui voulaient «sauver» des tapis!»

La taxe sur le sac-poubelle a été introduite à Zurich en 1993 (actuellement, elle est de 2 francs 04 pour un sac de 35 litres), tout comme le ramassage payant des déchets encombrants.

Celui-ci est facturé aujourd’hui 40 francs 10, pour cinq minutes de travail. Toute minute supplémentaire coûte 8 francs… On comprend le succès du Cargo-Tram, qui aura récolté, en neuf mois d’existence, quelque 300 tonnes de détrituts.

Déchets illégaux

Autre problème, né avec la taxe, les déchets «sauvages» ont pesé 181 tonnes en 2002 et, jusqu’en juin 2003, 88 tonnes.

La porte-parole d’ERZ Jeannette Jutzeler en est convaincue: «Si nous ne faisions rien, cette quantité augmenterait».

Outre le Cargo-Tram, la ville mène depuis trois ans des actions ponctuelles de collecte gratuite, moyennant l’utilisation d’un bon envoyé auparavant à tous les ménages. En juin, en une seule journée, 160 tonnes ont été récoltées dans deux quartiers.

Quant au tram, il a décidément de beaux jours devant lui: les VBZ sont en pourparlers avec Migros-Zurich pour éventuellement assurer une distribution de marchandises dans les magasins de la ville grâce à une nouvelle ligne, en préparation.

De la même manière, à Dresde (D), VW utilise le tram pour acheminer des marchandises en ville entre ses unités de production.

A Zurich, le tram, qui dispose d’un excellent réseau, avait déjà transporté des vivres, mais aussi débarrassé les détrituts, pendant la Seconde Guerre mondiale, rappelle Andreas Uhl des VBZ. Aujourd’hui, ce sont les bouchons routiers qui suscitent de nouvelles vocations.

swissinfo, Ariane Gigon Bormann, Zurich

– Un Cargo-Tram roule en ville de Zurich depuis mi-avril 2003. Une fois par mois, il est stationné dans un quartier de 15 à 19 heures.

– Les habitants peuvent déposer gratuitement leurs déchets en métal dans deux wagons-containers et leurs déchets incinérables dans un camion-benne qui accompagne le tram.

– Des vélos avec remorques sont à disposition pour ceux qui veulent aller chercher quelque chose.

– Ce service, unique au monde, a reçu en novembre le Prix d’innovation pour les transports publics.

– En neuf mois, le Cargo-Tram aura récolté quelque 300 tonnes de déchets, soit davantage que la quantité de déchets «sauvages» laissés sur les trottoirs en 2002 (181 tonnes).

– Les déchets illégaux sont un problème depuis l’introduction de la taxe sur le sac-poubelle en 1993 à Zurich. Parallèlement, l’élimination de déchets encombrants était aussi devenue payante.

– Actuellement, il en coûte 40 francs 10 pour faire débarrasser des déchets encombrants par les services municipaux, pour cinq minutes de travail.

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