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Actes racistes dans l’armée peut-être impunis

Keystone

Le juge d'instruction de l'armée veut classer la procédure ouverte contre quatre militaires qui avaient pratiqué le salut hitlérien et tenu des propos racistes.

Cette décision – qui n’est pas définitive – a été vivement critiquée mardi par les milieux antiracistes.

En août 2005, quatre militaires de l’école de recrues de grenadiers d’Isone, au Tessin, avaient été renvoyés à la maison après avoir fait usage entre eux du salut hitlérien. Ils avaient aussi tenu des propos racistes et à forte connotation d’extrême droite. Une enquête avait alors été ouverte.

Aujourd’hui, le juge d’instruction militaire veut classer l’affaire. Martin Immenhauser, porte-parole de l’Office de l’auditeur en chef de l’armée, confirme l’information diffusée mardi sur les ondes de la radio suisse alémanique DRS.

L’armée, domaine privé?

Pour justifier l’abandon de la procédure, le juge d’instruction militaire avance l’argument suivant: les propos racistes n’ont pas été tenus en public, mais toujours devant un cercle restreint de personnes.

Selon lui, les militaires ne peuvent donc pas être punis pour discrimination raciale. Tout au plus, ils pourraient écoper d’une amende disciplinaire pour mauvais comportement.

Pour sa part, le président de la commission fédérale contre le racisme Georg Kreis estime que la suspension de la procédure pose problème. Il observe que le Tribunal fédéral a récemment rendu un verdict opposé où il donnait une définition beaucoup plus large de la sphère publique.

Après le verdict militaire, une décision politique s’impose et la société civile doit clairement condamner de tels actes, ajoute Georg Kreis. L’expiation des quatre militaires est certes indispensable, mais les effets de l’affaire sur la société sont beaucoup plus importants, selon lui.

Le professeur fribourgeois de droit pénal Marcel Niggli voit également d’un mauvais oeil un éventuel classement par la justice militaire: cela signifierait que l’armée relève du domaine privé, a-t-il déclaré sur les ondes de la radio alémanique DRS.

Décision finale attendue

La Fondation contre le racisme et l’antisémitisme (GRA) est du même avis: elle trouve pour le moins curieux que l’armée soit considérée comme privée dans ce contexte.

La décision finale de poursuivre la procédure dépend désormais du commandant de l’école de recrue, qui peut encore ordonner une enquête préliminaire. Et c’est bien ce qu’il compte faire, selon le porte-parole de l’armée Felix Endrich.

swissinfo et les agences

Depuis 2002, l’armée suisse dispose d’un service de lutte contre l’extrémisme.
Il est chargé de prévenir et de surveiller les éventuels débordements.
Ce service traite moins de huit cas par année.
Il admet néanmoins que quelque 800 néo-nazis ou sympathisants sont incorporés sous les drapeaux.
Le plus souvent, ceux-ci se tiennent tranquilles. L’armée évite en effet d’incorporer dans ses rangs les extrémistes les plus notoires.

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