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And then there were… back

Mike Rutherford, Tony Banks, Phil Collins, dépositaires de la marque Genesis. Keystone

Enorme, le passage de Genesis au Stade de Suisse ! Cette musique qui a fait planer une génération, puis danser une autre, a gardé toute sa puissance. Le concert n'en est pas moins inégal. Le public a oscillé entre attention polie et enthousiasme débridé. Mais ce groupe a deux publics. Et chacun sait ce qu'il aime.

1975 `The Lamb lies down on Broadway’, 1976 ‘A Trick of the Tail’, 1977 ‘Wind and Wuthering’. Trois tournées de Genesis, trois passages en Suisse. Les suivantes ? Sais plus, j’avais décroché.

Ces dates marquent la transition de l’ère Gabriel à l’ère Collins. Le groupe fait encore du rock ‘progressif’, sur de longues pièces quasi symphoniques. Mais l’année d’après, il vire à la pop-soul-funk qui va le faire entrer dans les charts et vendre enfin des disques (160 millions à ce jour tout de même)… en perdant son âme, diront certains.

2007 ‘Turn it on again’. La Genèse est de retour en ville. Sans disque à vendre, juste pour le pied, dit-on.

Et cette fois, c’est au Stade de Suisse, rutilante arène à côté de laquelle l’antique Festhalle, lieux des précédents triomphes, n’est plus qu’une vieille bâtisse sinistre. Et si petite…

Un décor pour l’envol

La scène est somptueuse, prolongée par d’élégants pylônes qui culminent à 30 mètres du sol, donnant l’impression d’envol vers les nuages.

Plus bas, surmontant la marquise en plexi qui abrite les musiciens (et où les lumières tressent de belles arabesques), un immense mur-écran en forme de vagues verticales. Bonne astuce: où que vous soyez autour du stade, vous en voyez toujours au moins une face et les images qui s’y dessinent.

Des images, d’ailleurs, qu’on pourrait souhaiter plus nombreuses. Et plus audacieuses. Dommage d’utiliser un tel outil high tech pour projeter en double ce que chacun voit déjà sur les écrans latéraux…

Mais il y a aussi des moments magnifiques, comme les peintures de la ‘Home by the Sea’ ou l’étang très vieille Angleterre de ‘Ripples’ – sublime balade, un des grands moments du concert.

Volées de bois vert

Car bon, on est aussi là pour la musique. Alors ? Alors Genesis, c’est puissant. Pas que ça swingue, non, mais ça pulse, ça bat avec la force et la régularité d’une grosse machine bien huilée.

Et efficace. Sur des titres comme ‘No Son of Mine’, ‘Invisible Touch’, ‘Mama’ ou ce bon gros blues bien épais qu’est ‘I can’t dance’, le stade tangue de bonheur et trépigne de plaisir.

Ce n’est pas le cas tout au long du show. Certains moments sont moins emballants, et la belle machine semble un peu tourner à vide. Mais les temps forts rattrapent le tout.

Comme ce duo de batterie avec Chester Thompson, le complice de trois décennies. Même s’il avoue qu’à 56 ans et avec une récente fracture du poignet, il n’a plus les baguettes aussi agiles, Phil Collins est encore là !

Les deux hommes commencent par taper sur… le rembourrage de leurs tabourets. Et c’est déjà énorme. Puis ils passent aux pieds de cymbales, avant de faire pleuvoir sur leurs peaux des avalanches de coups secs, rapides et précis, qui résonnent tantôt comme les tams-tams de la brousse et tantôt comme la plus implacable des rythmiques rock… au carré.

Puissance et émotion

Dans les passages instrumentaux, le groupe étale sa puissance. Tony Banks, impeccable et imperturbable derrière ses claviers, Michael Rutherford, plus à la guitare qu’à la basse et Daryl Stuermer, qui fait le reste, enflent le son jusqu’à la démesure – même si désormais, on ne dépasse plus 100 dB.

C’est impressionnant sur ‘Dukes’s End’, plus émouvant encore sur la section finale de ‘Cinema Show’ et sur le solo de guitare de ”Firth of Fifth’… et carrément jouissif sur ‘Los Endos’, medley hyper-tendu des thèmes de l’excellent ‘Trick of the Tail’.

Quand il n’est pas derrière ses fûts, Collins fait son numéro de pitre (le clochard d”I know what I like’) et parle beaucoup au public. Qu’il s’entend à secouer avec sa démonstration sur l’effet ‘Domino’ – en intro du titre éponyme.

«Ce qui vous arrive à vous» (en braquant les projecteurs sur une portion de la foule) «aura des incidences sur vous» (projecteurs sur une autre portion). Et ainsi de suite, et encore et encore, jusqu’à ce que chacun ait compris qu’il faut hurler plus fort que les autres.

«We’ve got to get in to get out»

Le final est lancé. La partie instrumentale de la chanson va atteindre des hauteurs stratosphériques. Malgré la fine pluie qui tombe depuis le début, le stade s’enflamme. Il aura même droit au feu d’artifice avant le rappel.

Puis pour les adieux, c’est l’envoûtant ‘Carpet Crawlers’. Moment de grâce. Ici, plus question de comparaison Gabriel-Collins. Le second l’a chantée tellement de fois qu’elle est aussi à lui. Et aux 40’000 spectateurs du stade, qui reprennent en chœur «We’ve got to get in to get out». Un ange passe.

Et vous au fait ? Euh, moi… I know what I like… and I like what I know.

La setlist comprend:
– trois titres ou extraits de ‘Selling England by the Pound’
– deux de ‘The Lamb…’
– deux de ‘Trick of the Tail’
– un de ‘Wind and Wuthering’
– et treize des albums suivants, soit ‘And then there were three’, ‘Duke’, ‘Genesis’, Invisible Touch’ et ‘We can’t dance’ (aucun titre d”Abacab’).

… rappelle Phil Collins au public bernois après s’être essayé à l’allemand.

Depuis 1994, Philip David Charles Collins partage son temps entre le bout du Léman et le reste du monde. Mais le batteur-chanteur de Genesis venait déjà ici bien avant.

Notamment à Montreux. A la fin des années 70, il joue devant la piscine du Casino avec Brand X, ce groupe de jazz-fusion totalement délirant qui lui permet de montrer une nouvelle facette de son immense talent de batteur.

Dix ans plus tard, il tient les baguettes pour Eric Clapton. En 1998, il signe l’affiche du Festival, un drôle de petit batteur rigolard et coloré. Et il jamme aussi parfois dans les cafés, avec des musiciens de passage.

C’est encore en Suisse, au Paléo cette fois, qu’il tombe sous le charme de son interprète, Orianne Cevey, à qui il offre un mariage de star au Beau Rivage Palace d’Ouchy.

Avec la nouvelle Mme Collins, il crée ‘Little Dreams’, une fondation qui soutient les enfants qui ont un don ou un talent dans un domaine artistique ou sportif, à ‘réaliser leur rêve’

Puis en 2004, son ‘First Final Farewell Tour’ passe par Montreux. C’est la tournée d’adieu de Phil Collins chanteur solo, dont la carrière a boosté celle de Genesis, et réciproquement.

Deux ans plus tard, Orianne et Phil annoncent leur séparation. Le second reste en Suisse, pour être près de ses enfants. Une partie des répétitions de l’actuelle tournée a d’ailleurs eu lieu à Cossonay.

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