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Apprentissage: les bonnes places sont chères

La coiffure fait à partie des métiers très demandés. Keystone

Sur les 77'000 jeunes Suisses qui termineront l'école obligatoire cette année, entre 3000 et 4000 ne trouvent pas de place d'apprentissage, avertissent les syndicats.

«La situation n’est pas critique», répliquent les autorités et le patronat. Pour eux, le manque de places est surtout évident dans les métiers qui ont la meilleure cote auprès des jeunes.

«Il y a une crise en matière de places d’apprentissage», a lancé Peter Sigerist mercredi devant la presse à Berne. Le secrétaire central de l’Union syndicale suisse (USS) répondait ainsi à Ursula Renold, directrice suppléante de l’Office fédéral de la formation professionnelle et de la technologie (OFFT).

Dans une interview parue lundi en Suisse alémanique, celle-ci avançait – sur la base des données récoltées auprès des cantons – que 95% des jeunes Suisses trouvent une place d’apprentissage au sortir de l’école obligatoire.

Pour Peter Siegrist, cette affirmation traduit une vision «minimaliste et cynique de la réalité». Et André Daguet, du syndicat Unia, d’ajouter que le ministre de l’Economie Joseph Deiss n’a pas tenu sa promesse de donner une perspective à chaque jeune en fin de scolarité.

On ne veut pas de chaises vides

L’USS exige donc une augmentation de l’offre de places d’apprentissage. Pour eux, elle doit être entre 15 et 20% supérieure au nombre de candidats afin de répondre à la demande réelle. Dire qu’il faut une place par apprenti est faux car certains métiers n’ont plus la cote auprès des jeunes, relève Peter Sigerist.

A la direction de l’Union patronale suisse (UPS), Urs F. Meyer juge cette exigence totalement irréaliste. «Pour une entreprise qui décide de créer une place d’apprentissage, il y a des frais à payer, qu’elle trouve un apprenti ou qu’elle n’en trouve pas», explique-t-il.

Il faut en effet créer la place de travail, acheter le matériel et payer le cours pour l’employé qui sera responsable de l’apprenti. Or personne ne le fera pour une place qui risque de ne pas être pourvue.

Dans ce cas, rétorquent les syndicats, c’est aux pouvoirs publics de créer des places. Et d’appeler à «des mesures concrètes et rapides», comme l’augmentation du nombre de places dans les écoles des métiers, les écoles de commerce et les écoles de degré diplôme.

Une année pour se préparer


L’USS demande également la mise sur pied d’une année initiale d’apprentissage. Et regrette que la droite parlementaire ait rejeté une motion qui proposait d’étudier cette idée.

Cette solution permettrait au futur apprenti de suivre une année préparatoire déjà orientée sur une profession. Ainsi, les petites et moyennes entreprises (PME) pourraient engager des jeunes en partie déjà formés. Ces classes seraient financées par les pouvoirs publics et par les entreprises.

L’UPS n’est pas opposée par principe à cette idée. «Ce serait une solution parmi d’autres, mais ça ne marche pas pour tous les métiers, juge Urs F. Meyer. D’ailleurs, on devrait normalement pouvoir attendre de jeunes qui sortent de neuf ans d’école qu’ils sachent au moins lire, écrire et compter correctement».

Qui veut encore être maçon?

Plus généralement, l’UPS, comme l’Union suisse des arts et métiers (USAM, qui regroupe essentiellement les PME) a fait sienne les conclusions de l’OFFT: 95% des jeunes Suisses trouvent une place d’apprentissage et «la situation n’est pas critique».

Patronat et autorités admettent néanmoins que si «l’offre est suffisante au niveau national, la répartition par région ne correspond pas toujours à la demande». Ainsi, la situation est jugée «tendue» dans les centres urbains de Zurich, Berne et Bâle.

En outre, si les places sont très chères dans les domaines où les jeunes ont tous tendance à vouloir travailler (vente, technologies de pointe, arts visuels, santé), elles sont par contre difficiles à pourvoir dans le bâtiment ou la restauration.

Urs F. Meyer est bien conscient du fait. «Personne ne veut faire un apprentissage de maçon, parce que l’image de ce métier est très négative, admet le cadre de l’UPS. Et je ne suis pas sûr qu’il suffise de changer l’image. Il faut bien avouer que pour ces professions du bâtiment, nous ne savons pas quoi faire…»

Le chômage demeure


Au final, le fossé demeure entre les chiffres officiels et les chiffres des syndicats. Restent les chiffres du chômage des jeunes, que l’USS emprunte au Secrétariat d’Etat à l’économie (seco) pour appuyer ses revendications.

En juillet 2005, 4,7% des 15-24 ans se sont annoncés auprès des offices de chômage. Et pour les femmes de 20 à 24 ans, le pourcentage monte à 5,9. S’appuyant sur une étude du marché du travail en Suisse orientale, Peter Siegrist rappelle que ces chiffres doivent être doublés, car la moitié seulement des personnes touchées s’inscrivent effectivement au chômage.

swissinfo et les agences

Salaire moyen d’un apprenti dans le canton de Zurich, première année/troisième ou quatrième année

Mécanicien auto 600/1300.-
Coiffeur 400/700.-
Electronicien 450/1000.-
Jardinier-paysagiste 450/900.- (3 ans)
Employé de commerce 670/1360.-
Cantonnier 1180/2100.- (3 ans)

– Pour aider les apprentis à connaître leurs droits, l’USS publie une nouvelle version de son dictionnaire «Apprentie, apprenti, tes droits de A à Z» (144 pages), adaptée à la nouvelle loi sur la formation professionnelle.

– Ce guide répond aux questions les plus concrètes des apprentis concernant leur contrat, sa résiliation, la durée des vacances, le salaire, ou que faire en cas de mobbing ou quand l’entreprise fait passer des tests pour détecter de la drogue.

– Avec cet ouvrage, les syndicats veulent motiver les jeunes à défendre leurs droits, menacés selon eux par l’abaissement de l’âge de la protection des jeunes travailleurs de 20 à 18 ans ou l’autorisation d’employer des apprentis la nuit dans certaines branches.

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