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Bataille autour du taux de conversion

La baisse des rentes du deuxième pilier sera au centre des votations du 7 mars 2009. Keystone

Le 7 mars, le peuple vote sur l'abaissement du taux de conversion de la prévoyance professionnelle. Pour le gouvernement et la droite, cette mesure est indispensable pour compenser l’allongement de l’espérance de vie et les mauvais résultats boursiers. La gauche y voit une mesure précipitée.

Le gouvernement et la majorité de droite du Parlement veulent faire passer le taux de conversion de 6,8% à 6,4%. Mais le syndicat UNIA, soutenu par la gauche, a obtenu le référendum contre cette modification de la Loi sur la prévoyance professionnelle (LPP), raison pour laquelle le peuple est invité à se prononcer sur la question le 7 mars.

Seconde baisse

Le taux de conversion sert à fixer le montant de la rente des personnes assurées auprès de la prévoyance professionnelle. Par exemple, avec un taux de 6,8%, un assuré disposant d’un capital de 100’000 francs à l’âge de la retraite touchera une rente annuelle de 6800 francs. Avec un taux de 6,4%, cette rente ne sera plus que de 6400 francs.

Lors de l’instauration du système de la LPP, au début des années 1980, le taux de conversion avait été fixé à 7,2%. En 2003, le Parlement avait une première fois accepté une diminution progressive de ce taux qui devrait atteindre 6,8% en 2015.

Cette première baisse avait passé la rampe sans référendum. «On avait en effet compensé cette baisse par des cotisations plus élevées. Les assurés n’ont donc rien perdu. Le taux de conversion est certes plus bas, mais il s’applique à un capital plus important», déclare la député démocrate-chrétienne (PDC / centre droit) Thérèse Meyer.

Mais lors de sa session d’hiver 2008, le Parlement a accepté une seconde baisse. Il est prévu que le taux de conversion passera à 6,4% dès 2016. Et cette fois, aucune compensation n’est prévue.

Garantir l’avenir

Le gouvernement ainsi que la majorité de droite du Parlement estiment que cette baisse est absolument nécessaire pour garantir l’avenir du deuxième pilier. Le système serait en effet confronté à deux dangers.

Tout d’abord, l’espérance de vie de la population continue d’augmenter. Or, si les retraités deviennent de plus en plus vieux, il n’est plus possible de leur accorder une rente aussi élevée qu’aujourd’hui sans mettre en danger les caisses de la prévoyance professionnelle.

De plus, les avoirs du deuxième pilier ne rapportent plus autant qu’autrefois. Les très mauvais résultats des marchés financiers, surtout depuis deux ans, ont provoqué de lourdes pertes – ou tout du moins des manques à gagner importants – pour les caisses professionnelles.

«Ces deux facteurs font que le capital vieillesse s’épuise malheureusement plus rapidement», résume Thérèse Meyer. Pour assurer la pérennité du système, il faut donc diminuer les rentes en abaissant les taux de conversion. «Vu que le gâteau à se partager ne devient pas plus grand, il faut que les tranches soient un peu plus petites», illustre la députée.

Et si le peuple refuse cette solution, le 7 mars, il ne restera plus que la solution d’augmenter les cotisations des employés et des employeurs. Or une telle issue «pénaliserait les jeunes familles et l’économie suisse», avertit Thérèse Meyer.

Mesure précipitée

La gauche ne juge pas la situation aussi dramatique. Pour elle, les mauvais rendements boursiers sont temporaires. L’influence des marchés financiers sur la prévoyance professionnelle doit être analysée sur une période d’au minimum dix ans. Adapter le taux de conversion sur la base des résultats des derniers mois est donc prématuré.

La gauche estime que la question de l’augmentation de l’espérance de vie a déjà été résolue. «Le Parlement l’a fait en baissant le taux de conversion à 6,8%. Ce que nous contestons aujourd’hui, c’est la précipitation avec laquelle on accélère la diminution vers le 6,4%», déclare le député socialiste Stéphane Rossini.

Par ailleurs, des adversaires de la baisse du taux de conversion estiment que cette mesure frappera avant tout les plus défavorisés. En effet, la question de l’allongement de la durée de vie ne touche pas tout le monde de la même manière.

«Effectivement elle s’allonge, mais on sait que les catégories socioprofessionnelles les plus défavorisées vivent moins longtemps et meurent avant l’âge statistique, explique Stéphane Rossini. Nous pensons donc que c’est surtout sur celles-ci que la baisse du taux met la pression. D’un point de vue social, il y a problème.»

«En matière de prévoyance vieillesse, la droite joue toujours le discours du pire et du catastrophisme en nous disant qu’il sera difficile de maintenir les rentes à long terme. Ici, notre souci est plutôt un souci concret de maintien du pouvoir d’achat à disposition des rentiers», conclut Stéphane Rossini.

Olivier Pauchard, swissinfo.ch

Le 1er pilier est constitué par l’Assurance vieillesse et survivants (AVS). Cette assurance obligatoire s’applique à tous les habitants. Elle a pour but de fournir un minimum vital à l’âge de la retraire.

Le 2ème pilier est constitué par la prévoyance professionnelle. Elle est obligatoire pour tous les employés gagnant plus de 20’520 francs par an. Elle est financée par les cotisations des employés et des employeurs. A la retraite, elle est perçue sous forme de rentes, mais l’assuré a aussi la possibilité de retirer l’entier de son capital.

Le 3ème pilier est constitué par la prévoyance privée. Elle n’est pas obligatoire. Cette épargne volontaire, favorisée fiscalement, est déposée auprès de banques ou d’assurances. Elle ne peut être perçue qu’à l’âge de la retraite.

En théorie, les 1er et 2ème pilier doivent assurer au rentier 60% de son dernier salaire. Le 3ème pilier sert de complément.

Pour l’année 2009, le taux de conversion était de 7,05% pour les hommes et de 7% pour les femmes.

Selon la loi actuelle, ce taux doit atteindre progressivement 6,8% – pour les hommes et pour les femmes – d’ici 2015.

Si le peuple accepte la révision de la loi sur la prévoyance professionnelle le 7 mars, le taux passera à 6,4% d’ici 2016.

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