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Berne propose un compromis climatique

40% des émissions de CO2 proviennent du trafic motorisé. Keystone

Pour réduire les émissions de CO2, le gouvernement veut introduire un système combiné: taxe sur les combustibles et centime climatique sur les carburants.

Un compromis qui n’enthousiasme ni l’économie ni les écologistes, ni les partis politiques.

Dans le cadre du protocole de Kyoto, la Suisse s’est engagée, à réduire d’ici 2010 ses émissions de gaz carbonique de 10% par rapport à leur niveau de 1990.

Cet objectif, repris dans la loi sur le CO2, ne peut plus être atteint par des mesures volontaires, a souligné mercredi devant la presse le ministre de l’environnement Moritz Leuenberger. L’Etat se doit donc d’intervenir.

Quatre variantes étaient en concurrence, allant de l’introduction d’une taxe sur le CO2 sur les combustibles et les carburants à la seule instauration d’un centime climatique prélevé sur une base volontaire par l’économie, selon la proposition de l’Union pétrolière suisse.

Le Conseil fédéral (gouvernement) a opté pour une combinaison des deux mesures.

Une chance pour l’économie

Dès 2006, les combustibles seront frappés d’une taxe de 35 francs sur chaque tonne de CO2, soit 9 centimes par litre d’huile de chauffage.

Pour les carburants en revanche, le Conseil fédéral laisse sa chance au centime climatique. Si l’économie ne joue pas le jeu ou si le centime climatique ne déploie pas des effets suffisants d’ici fin 2007, la taxe sur le CO2 sera étendue à l’essence, avec possibilité d’exempter le diesel, avertit Moritz Leuenberger.

Le ministre de l’environnement ne cache pas que personnellement, il souhaiterait frapper également les carburants d’une taxe sur le CO2. Mais il admet qu’il est juste de donner aux promoteurs du centime climatique une chance de se responsabiliser.

Les arguments financiers ont joué un grand rôle dans la décision finale. Chaque année en effet, le tourisme de l’essence rapporte plus de 300 millions de francs aux caisses fédérales. La taxe sur le C02 aurait lourdement frappé le prix des carburants.

Recettes redistribuées

Le centime climatique étant une mesure librement consentie, la Confédération n’a d’influence ni sur le niveau de majoration du prix des carburants ni sur l’utilisation des recettes, estimées à 70 millions de francs par an, précise Moritz Leuenberger.

La majeure partie de l’argent devrait toutefois être utilisé pour soutenir des mesures de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’étranger.

Quant aux recettes de la taxe sur le CO2, elles seront redistribuées à la population par le biais de l’assurance-maladie, à raison de 46 francs par an et par habitant.

Critiques tous azimuts

Le compromis du Conseil fédéral ne satisfait personne, à l’exception du Parti démocrate-chrétien. A gauche, le Parti socialiste déplore le «détour inutile» par le centime climatique. A ses yeux, il ne fait en effet pas l’ombre d’un doute que ce prélèvement volontaire ne suffira pas à réduire les émissions de CO2 générées par les carburants.

Plus sévères, les Verts accusent le gouvernement de «plier devant les lobbies de l’automobile et du pétrole» et de «brader la protection du climat».

L’Union démocratique du centre (droite dure), qui voulait tout au plus du centime climatique, critique vertement l’introduction de la taxe sur le CO2. Les contribuables vont une nouvelle fois passer à la caisse, critique le parti.

Quant au patronat, par la voix d’economiesuisse il déplore également ce surcroît de charges pour les PME et l’artisanat et craint un renchérissement dans le secteur du logement.

swissinfo et les agences

Depuis une quinzaine d’années, la Suisse rejette annuellement dans l’atmosphère plus de 40 millions de tonnes de CO2.
En 2003, les émissions ont atteint 41,1 millions de tonnes, soit presque le niveau de 1990. La pollution due aux carburants tend à augmenter, alors que celle due aux combustibles diminue.

– En signant le Protocole de Kyoto en 1997, la Suisse s’engage à réduire ses émissions de gaz carbonique (CO2).

– Le 1er mai 2000 entre en vigueur une loi qui prévoit d’ici 2010 une réduction de 10% par rapport au niveau de 1990. Si les mesures volontaires ne suffisent pas, on introduira une taxe sur le CO2.

– Le 30 janvier 2001, le ministre Moritz Leuenberger lance le programme SuisseEnergie, qui succède à Energie 2000.

– A l’automne 2002, l’Union pétrolière suisse propose le «centime climatique» comme alternative à la taxe sur le CO2.

– Le 16 avril 2004, un rapport officiel affirme que les mesures volontaires prises jusqu’ici ne permettront pas d’atteindre les objectifs de la loi sur le CO2. Les émissions ne diminueront pas de 10 %, mais seulement de 3,8 %.

– Le 20 octobre 2004, le gouvernement met quatre variantes de taxes en consultation: trois avec une taxe sur le CO2, et une avec un centime climatique librement consenti. Les réponses sont contrastées.

– Le 23 mars 2005, le gouvernement opte pour un compromis: taxe de 9 centimes par litre sur les combustibles d’origine fossile, centime climatique pour les carburants.

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