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BP et Transocean blâmés pour une marée noire évitable

Aux Etats-Unis, la compagnie BP a reconnus une partie de sa responsabilité. Reuters

La commission présidentielle nommée par Barack Obama pour étudier les causes de la marée noire dans le Golfe du Mexique a remis mardi son rapport. BP et Transocean sont accusés de négligence. Elle a fait des recommandations pour renforcer la sécurité des forages.

La commission présidentielle sur l’explosion de la plateforme de BP qui fit 11 morts le 20 avril dernier et sur la marée noire qui continue à polluer le Golfe du Mexique accuse BP et ses sous-traitants tels que Transocean d’avoir sacrifié la sécurité sur l’autel de la rentabilité.

«Délibérément ou non, nombre des décisions de BP et de ses sous-traitants qui ont augmenté le risque d’explosion ont économisé du temps et de l’argent», conclut la commission dans le rapport qu’elle a remis à Barack Obama.

Faillite du gouvernement

BP était le concessionnaire du puits et louait la plateforme à Transocean, géant mondial du forage offshore dont le siège est en Suisse.

Mais la commission attribue aussi la responsabilité de ce désastre «évitable» au gouvernement américain qui a longtemps failli dans son rôle de règlementation et de supervision des forages offshore.

Elle juge «inadéquate» la réaction initiale de l’Administration Obama à la marée noire et «insuffisantes» les réformes engagées par la Maison Blanche.

La commission se prononce donc pour une «réforme fondamentale». Elle souligne que les changements qu’elle propose sont «vitaux», à la fois pour éviter une nouvelle marée noire et pour mettre la règlementation des Etats-Unis au niveau des pays européens.

Les compagnies minimisent

Réagissant au rapport, l’Administration Obama affirme qu’elle a déjà lancé une «refonte agressive» des contrôles des pouvoirs publics sur les forages offshore.

De leur côté, les compagnies minimisent leurs responsabilités. BP note ainsi que la commission blâme aussi ses sous-traitants. Du reste, BP affirme qu’elle n’a pas attendu la commission pour effectuer «des changements importants destinés à renforcer la sécurité».

Transocean, quant à elle, déclare à swissinfo.ch que les procédures suivies par ses employés sur le puits Macondo «furent conçues et dirigées par les ingénieurs de BP et approuvées à l’avance par les régulateurs fédéraux».

Guy Cantwell, porte-parole de Transocean, souligne que depuis le désastre, «BP a accepté publiquement la responsabilité des coûts de l’accident, de ses contrats relatifs à Macondo avec Transocean et le gouvernement des Etats-Unis, de la pollution et du nettoyage».

Satisfaction et critiques

A La Nouvelle Orléans, où la commission présidentielle présente mercredi ses conclusions à la population locale, le Gulf Restoration Network, coalition d’associations écologistes du littoral, est satisfait du rapport de la commission présidentielle.

«C’est un rapport équilibré», déclare à swissinfo.ch son porte-parole, Aaron Viles. «La commission indique clairement que BP, Transocean et les autres ont commis des erreurs horribles, mais elle indique aussi clairement que toute l’industrie pétrolière est complice et que le système entier est défaillant», poursuit-il.

Certains avocats qui représentent des victimes de la marée noire déplorent néanmoins que la commission n’ait pas clairement accusé les compagnies de «négligence flagrante».

«Parler simplement de négligence n’est pas suffisant car les avocats doivent prouver une négligence flagrante pour ouvrir la voie à des dommages-intérêts à caractère punitif, ceux qui, contrairement aux dommages-intérêts compensatoires, ne sont virtuellement pas plafonnés devant un jury populaire, ici aux Etats-Unis», explique Matthew Villmer, un avocat de Pensacola, en Floride, qui représente environ 50 victimes.

Pas de recommandation chiffrée

La commission présidentielle est timide sur d’autres plans. Si elle conseille bien à l’Administration Obama et au Congrès de relever le plafond de la responsabilité financière des compagnies pétrolières en cas d’incident, elle ne fait pas de recommandation chiffrée, alors que des écologistes et parlementaires prônent le déplafonnement.

De même, si la commission martèle que si les mesures qu’elle propose ne sont pas mises en œuvre, «un nouvel incident pourrait bien se produire», elle s’oppose à un moratoire sur les forages en eaux profondes.

Enfin, si la commission assigne aux compagnies pétrolières la responsabilité de la marée noire, elle s’abstient de dire si BP, Transocean et les autres ont commis des crimes. Lors d’une conférence de presse mardi, l’un des co-présidents de la commission a laissé le soin au ministère de la Justice de déterminer si des poursuites criminelles et civiles s’imposent.

L’enquête du ministère de la Justice se poursuit, ainsi que celle des gardes-côtes et du Congrès. Parallèlement, les victimes de la marée noire peaufinent leurs plaintes contre BP, Transocean et les autres acteurs d’un drame qui continue de se jouer dans le Golfe du Mexique.

«Le pétrole est toujours là et affecte toujours la population de la région et son écosystème», lance Aaron Viles du Gulf Restoration Network. «A chaque sortie que nous faisons en bateau dans les marais situés près de La Nouvelle Orléans, nous trouvons du pétrole sur des kilomètres et des kilomètres», raconte ce responsable d’organisation de défense de l’environnement.

Approfondir la réforme du bureau du ministère de l’Intérieur qui approuve les permis de forage, en améliorant son indépendance envers le secteur pétrolier, son expertise et son budget.

Augmenter le plafond de responsabilité financière des compagnies en cas d’incident, plafond fixé à l’heure actuelle à 75 millions de dollars.

Affecter 80% des amendes imposées à BP, Transocean et aux autres compagnies impliquées dans la marée noire à la réhabilitation de l’environnement marin et côtier.

Mieux intégrer les scientifiques indépendants et ceux de la fonction publique à toutes les étapes des processus d’approbation et de supervision des forages.

Consulter systématiquement les riverains via des comités représentatifs semblables à ceux créés en Alaska après la marée noire provoquée par l’Exxon-Valdez.

Transocean a son siège à Zoug, en Suisse

Elle a été fondée aux Etats-Unis en 1973

Le siège a été transféré en Suisse en décembre 2008

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