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Cent jours de calme plat pour Blocher et Merz

Christoph Blocher et Hans-Rudolf Merz: cent jours consacrés essentiellement à l’étude de leurs dossiers complexes. Keystone

Leur élection au gouvernement avait fait beaucoup de bruit. Depuis, les deux représentants de la droite n’ont pourtant pas bouleversé la ligne politique.

Ni débat houleux, ni provocation. Les cent premiers jours de Christoph Blocher et Hans-Rudolf Merz sont bien calmes. Mais la bataille ne fait peut-être que commencer.

On attendait des étincelles au sein du nouveau gouvernement. Un Conseil fédéral inédit, élu par le Parlement le 10 décembre 2003. La traditionnelle formule magique était alors bouleversée, pour la première fois depuis près d’un demi-siècle.

Deux membres du centre modéré ont donc été remplacés par deux représentants de la droite plus musclée: Christoph Blocher, figure de proue de l’Union démocratique du centre (UDC, droite dure) et le radical (PRD, droite) Hans-Rudolf Merz.

Selon la gauche, on pouvait s’attendre à des attaques contre le système social et à une crise de la concordance. A droite, on évoquait une relance de l’économie et un allègement du fardeau de l’Etat.

De part et d’autre, on prévoyait en tous les cas des débats houleux au sein du nouveau gouvernement.

Rien à se mettre sous la dent



Et pourtant… Cent jours plus tard, c’est le calme plat. Et les commentateurs de la vie politique attendent toujours les premiers signes d’un changement.

Certes, Christoph Blocher et Hans-Rudolf Merz semblent plus déterminés encore que leurs prédécesseurs à réduire la dette publique. Mais le plan d’épargne le plus drastique de l’histoire suisse (3,5 milliards de francs) a été adopté avant leur arrivée.

Interrogé par swissinfo sur les changements intervenus au sein du Conseil fédéral depuis le 1er janvier, même le président de l’UDC Ueli Maurer n’a rien dit de plus que: «Un vent de fraîcheur souffle sur le gouvernement».

Pas de grandes décisions à analyser pour la presse. Rien de spectaculaire. Il faut dire que les deux nouveaux conseillers fédéraux se sont montrés bien sages pour rester à l’abri de toute polémique.

Du coup, les journalistes n’ont pas grand chose à se mettre sous la dent. Ils doivent se contenter de commenter le style des nouveaux élus et leurs déclarations.

Merz sous pression

A peine élu, Hans-Rudolf Merz s’est permis quelques réflexions personnelles qui ont fait couler pas mal d’encre.

«Il a dû corriger rapidement ses erreurs et démentir ses propos. Depuis, il est beaucoup plus prudent», constatait récemment la Basler Zeitung.

Mais son style, franc et amical, est apprécié. Selon la presse, il plaît à ses collaborateurs et, mieux, même à la gauche. Cela dit, Hans-Rudolf Merz ne pourra pas rester éternellement «gentil», prédit la Berner Zeitung.

Le programme d’économies, qui devrait être présenté cet été, «fera de nombreuses victimes: cantons, retraités, personnel fédéral, citoyens et, plus généralement, tous les bénéficiaires de subventions».

Le conseiller fédéral n’est pas seulement mis sous pression par ses adversaires, constate encore la Neue Zürcher Zeitung. «Ceux qui l’ont élu veulent le voir réaliser ses promesses: moins d’impôts et moins d’intervention de l’Etat».

Appelé à assainir les finances fédérales, le ministre est confronté à une bataille qui semble perdue d’avance. Il doit en effet convaincre le peuple d’accepter le paquet fiscal, en mai. Des mesures qui feront perdre 4 milliards de francs aux finances publiques.

La réserve inhabituelle de Blocher



Depuis son élection, Christoph Blocher, lui, s’est surtout fait remarquer par sa réserve plutôt inhabituelle. La presse, qui lui a longtemps reproché son populisme, semble désormais presque irritée par ses silences.

«Blocher est en stand-by. Il découvre son département et ses dossiers, observe la Tribune de Genève. Evidemment, on ne passe pas, en deux mois, du statut de chef de l’opposition à celui de promoteur de la collégialité.»

«Christoph Blocher a pris au sérieux son rôle de membre du gouvernement, affirme l’hebdomadaire Facts. Mais après cent jours, on peut déjà dire que son pouvoir de décision et sa marge de manœuvre sont minces.»

Pas de chance pour les caricaturistes

Ce qui est certain c’est que la diligence et le sérieux des deux nouveaux ministres ne font pas le bonheur des caricaturistes. Christoph Blocher et Hans-Rudolf Merz ne sont pas (plus) d’inépuisables sources d’inspiration.

«Reste plus qu’à regretter le temps où Blocher appartenait à l’opposition», déclare ainsi Chapatte, dessinateur du quotidien Le Temps, qui attend impatiemment les premières contradictions et autres faux pas du nouveau conseiller fédéral.

Pour Bürki, caricaturiste à 24 Heures, c’est le calme avant la tempête. «Jusqu’ici, Merz et Blocher étaient occupés à réaliser de petites économies dans leurs services. Mais, maintenant qu’ils sont installés, ils vont sans doute jouer les rouleaux compresseurs.»

D’ailleurs, Bürki a joint le geste à la parole. Dans l’un de ses dessins, les deux nouveaux élus dépassent les 100km/h. au volant de rouleaux compresseurs. Sur leur chemin, une femme et deux enfants tentent de fuir. Des victimes sans doute des futures coupes dans le secteur social.

swissinfo, Armando Mombelli
(Traduction et adaptation: Alexandra Richard)

Depuis le 1er janvier, Christoph Blocher (UDC) dirige le Département de Justice et Police.
Hans-Rudolf Merz (PRD) est à la tête du Département des Finances.

– Le 10 décembre, Christoph Blocher a été élu à la place de la démocrate-chrétienne Ruth Metzler.

– Le Parlement modifie ainsi la traditionnelle répartition des sièges au gouvernement, la «formule magique», en vigueur depuis 1959.

– Depuis le 1er janvier, le Conseil fédéral est composé de:

– 2 représentants de l’Union démocratique du centre (UDC, droite dure): Christoph Blocher et Samuel Schmid.

– 2 représentants du Parti socialiste (PS, gauche): Micheline Calmy-Rey et Moritz Leuenberger.

– 2 représentants du Parti radical (PRD, droite): Hans-Rudolf Merz et Pascal Couchepin.

– 1 représentant du Parti démocrate-chrétien (PDC, centre): Joseph Deiss.

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