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CN- PORTRAIT JO 6 Viktor Röthlin, un vainqueur suisse à Pékin? -CN

La joie de la victoire à Tokyo en février 2008: un bon présage pour Pékin? Le marathonien suisse Viktor Röthlin Keystone

Le marathonien est l'un des rares espoirs de médaille suisse aux prochains Jeux Olympiques. Le plus sérieux adversaire du Nidwaldien lors de la course qui mettra un terme aux JO le 24 août: l'air vicié de Pékin.

Le 17 février dernier, passant en tête la ligne d’arrivée du marathon de Tokyo après 42,195 kilomètres, Viktor Röthlin ne venait pas seulement de gagner un des plus importants marathons du monde: avec un temps de 2:07:23, deuxième chrono jamais couru par un Européen, il venait aussi de réaliser un temps de rêve.

En laissant derrière lui les favoris africains et asiatiques, le Nidwaldien accédait du même coup au «rang» de très sérieux prétendant à une médaille olympique à Pékin.

Les courses de Viktor Röthlin impressionnent les spécialistes depuis sept ans. En 2001, il frôlait pour la première fois la limite des 2 heures 10, limite vaincue en 2004.

Deux ans plus tard, il perçait véritablement avec la médaille d’argent aux championnats d’Europe de Göteborg. L’an dernier, il confirmait en s’octroyant la médaille de bronze des Mondiaux d’Osaka.

Objectif suprême

Le 24 août sera le jour du marathon olympique de Pékin et, très vraisemblablement, la «course de sa vie» pour Viktor Röthlin. A 33 ans, le marathonien suisse est à l’apogée de se sa carrière. Après Sydney et Athènes, où il a déjà participé, Pékin constituera son dernier défi olympique.

«J’essaye toujours d’accomplir la course parfaite, explique Viktor Röthlin à swissinfo. Le reste suit tout seul. Mais, après l’argent à Göteborg, le bronze à Osaka et la victoire à Tokyo avec ce chrono fantastique, je suis obligé de viser une médaille à Pékin.»

Le continent asiatique est de bon augure: «Les images positives que j’ai de mes deux grands succès au Japon vont sûrement m’aider à Pékin», dit celui qui exerce le métier de physiothérapeute.

Mental fort

Cette force mentale peut véritablement faire la différence en faveur du coureur helvétique. Viktor Röthlin est connu pour savoir gérer au mieux la pression de la course et réussir à tout donner au bon moment. Un marathon dans un championnat prestigieux se court mentalement très différemment des marathons où l’objectif est de gagner la prime, souvent élevée, versée aux gagnants.

Après sa victoire en février à Tokyo, Viktor Röthlin est devenu un héros au Japon, pays où le marathon est une discipline vénérée. «C’est incroyable ce que les gens ressentent là-bas, raconte le sportif, encore ému à ce souvenir. Après ma victoire, je ne pouvais quasiment plus sortir seul dans la rue.»

Quittant le pays après sa course, il a été ovationné partout à l’aéroport, porté de guichet en guichet, sans devoir attendre. C’était plus que la classe d’affaires ou la première classe, «mais une classe au-dessus, c’était presque gênant», concède le coureur.

S’il était Japonais, il n’aurait probablement plus de souci financier jusqu’à la fin de ses jours. Mais Viktor Röthlin n’a pas perdu le sens des réalités. Confronté à la gloire, il a même été heureux de retrouver son pays, «plus tranquille», dit-il.

Favoris absents

A Pékin, le marathonien pourra en outre «compter» sur l’absence de trois grands favoris, l’Ethiopien Haile Gebreselassie et les Kenyans Paul Tergat et Martin Lei. Mais le Suisse ne veut pas se concentrer sur les autres. Il ne regardera que le 24 août, qui est à côté de lui sur la ligne de départ.

Car même sans ce trio, la concurrence reste forte. Une vingtaine de coureurs sont dans les mêmes temps que Viktor Röthlin, estime-t-il. Mais il n’y aura de médailles que pour trois d’entre eux. «Dix-sept coureurs seront tristes à l’arrivée… J’espère que je ne serai pas parmi eux!»

Pollution

La performance de parcourir plus de 40 kilomètres en un peu plus de 2 heures n’est pourtant pas le souci principal des coureurs.

Leur principal adversaire pourrait bien être la pollution atmosphérique, importante à Pékin. Comme les autres participants, Viktor Röthlin ne sait pas quels effets les hautes concentrations en gaz nocifs, alliées à la chaleur et à l’humidité, ont sur le corps en train d’accomplir un marathon.

Le Nidwaldien partira donc assez tôt pour la Chine afin d’adapter son corps au mieux à la chaleur et à l’humidité. Le smog reste cependant un grand point d’interrogation, car il est impossible de s’y adapter réellement.

«J’espère que séjourner déjà plusieurs semaines avant le grand jour dans la gueule du loup me donnera un avantage mental», explique-t-il.

Même si Pékin constitue son dernier marathon olympique, Viktor Röthlin n’est pas prêt à renoncer à courir la distance. Le «Kenyan blanc», comme il est parfois surnommé parce qu’il s’entraîne depuis longtemps au Kenya – pays à la longue tradition de marathon – ne donne pas d’objectif chronométré.

Ces objectifs se transforment trop vite en limites mentales, dit-il. «Si je me répète sans cesse que 2:06 sont possibles, je réussirai sûrement à courir en 2 heures 06, mais pas plus vite.»

Un temps de 2:06 ou une médaille: quelle est la meilleure motivation? «Les Jeux Olympiques sont le plus grand événement sportif au monde et donnent les sensations les plus fortes, répond Viktor Röthlin. Une médaille olympique aurait pour moi une énorme signification.»

Si le Nidwaldien court, le 24 août, la course dont il rêve, les Japonais ne seront plus les seuls à le porter aux nues. Il risque fort de devenir un héros aussi dans son pays.

swissinfo, Renat Künzi
(Traduction de l’allemand: Ariane Gigon)

Agé de 33 ans, le marathonien Viktor Röthlin, originaire d’Alpnach (NW), est actuellement le meilleur sportif suisse en athlétisme.

Lors du marathon de Tokyo en février 2008, il a réalisé le 2e meilleur chrono européen de tous les temps et, bien sûr, le record suisse (2:07:23).

En 2007, il avait remporté la médaille de bronze des Mondiaux d’Osaka après un finish époustouflant.

Aux championnats européens de Göteborg en 2007, il s’était placé 2e derrière le champion olympique italien Stefano Baldini.

En 2004, il avait été le premier Suisse a passé la barrière magique des 2 heures 10 en courant la distance en 2:09:55.

C’était lors du marathon de Berlin en 2001 qu’il s’était fait connaître, en terminant 8e avec un chrono de 2:10:54.

Viktor Röthlin détient 8 des 10 meilleurs temps de marathoniens suisses.

Le climat à Pékin pose des problèmes de taille aux athlètes: chaleur, humidité de l’air et pollution atmosphérique peuvent influencer les performances. Des diarrhées et des difficultés respiratoires pourraient survenir.

L’Organisation Swiss Olympic a élaboré unguide, «heat.smog.jetlag», pour aider les sportifs à se préparer de manière optimale.

Certaines mesures ont toutefois suscité des critiques: c’est le cas du test d’asthme demandé à tous les athlètes avant de partir.

L’absorption d’additifs alimentaires naturels (créatine) et de médicaments (mélatonine contre le «jetlag», salbutamol contre les difficultés respiratoires) a aussi été critiquée.

Pour certains athlètes, les médecins de l’organisation se meuvent dans une zone grise proche du doping.

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