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«Les foires de l’art m’électrisent toujours»

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Le Zurichois Hans Bollier est un collectionneur d'art passionné, avec un flair certain pour les jeunes artistes. «Art Basel est un must pour tous les collectionneurs», dit-il en faisant visiter son appartement.

Le «musée» Bollier s’ouvre dans la cage d’escaliers de la maison familiale: un mobile aérien en cinq éléments de l’artiste polonaise Paulina Olowska y est installé. Les plaques de métal symbolisent la disparition de la tradition artisanale polonaise noyée par la globalisation.

«Je me suis toujours intéressé aux œuvres de jeunes artistes qui ne se sont pas encore fait un nom», explique Hans Bollier. «J’écoute mes sentiments et mon instinct dans mes choix». De plus, lâche-t-il aussi, l’art des jeunes créateurs reste «abordable»…

Une fois qu’un artiste entre dans sa collection, Hans Bollier continue à le suivre. «Je suis très heureux lorsqu’un artiste dont j’ai acheté une œuvre des années auparavant prend de l’ampleur. Je le vois aussi comme une sorte de confirmation.»

C’est le cas de Markus Raetz, qui est aujourd’hui un des artistes suisses les plus réputés sur le plan international. «Il y a une trentaine d’années, j’avais dû emprunter de l’argent pour m’acheter un portrait de lui, pour 6000 francs», se souvient le collectionneur.

Les ombres du marché de l’art

Hans Bollier possède encore une sculpture du même artiste, qui montre une double tête, en métal. Selon l’angle de vision, elle apparaît en position normale ou sur la tête.

La collection compte aussi une sculpture ironique représentant un lapin assis se transformant, dans un miroir, en tête avec chapeau. C’est une allusion à Joseph Beuys, l’artiste conceptuel allemand et à sa phrase, «Je suis un lapin».

Dans le salon, un tableau de David Noonan occupe presque toute une paroi. Le jeune artiste australien a été la découverte du collectionneur lors du dernier Art Basel, en 2007. Autre découverte lors de cette édition, moins plaisante: celle des mauvais côtés du marché de l’art.

«Dans les foires, je suis toujours électrisé. Je sais que les bonnes œuvres partent en moins de deux heures après l’ouverture. On n’a pas le temps de repousser sa décision. Il faut être sûr de ce que l’on veut», explique le Zurichois.

Prix astronomiques

Avec David Noonan, Hans Bollier était tellement sûr de son choix qu’il a aussitôt conclu l’affaire par poignée de mains. Coût: 30’000 dollars. «Lorsque j’ai voulu confirmer mon achat par écrit, les gens de cette galerie australienne étaient aux abonnés absents. Ils ne répondaient ni par mail ni par fax et ne rappelaient pas quand je laissais des messages téléphoniques.»

L’expérience de voir un achat potentiel s’envoler a été extrêmement frustrante, se souvient Hans Bollier. Le collectionneur a pu se rattraper plus tard en achetant deux autres tableaux du même artiste, mais dans une autre galerie.

Le marché de l’art est un monde fébrile, un collectionneur qui se meut dans l’arène le sait mieux que personne.

«Une minorité des innombrables artistes dans le monde laissera des œuvres qui vont compter dans l’histoire de l’art. Lorsqu’un créateur est reconnu comme tel, tous les acheteurs se précipitent et les prix deviennent vite astronomiques.»

A Art Basel comme dans d’autres foires, la nervosité naît du fait que collectionneurs et marchands tentent précisément de découvrir les artistes prometteurs.

Le déclic: un cadeau de mariage

La passion de collectionner remonte à l’enfance chez Hans Bollier: «A l’âge de dix ans, je collectionnais des pièces de monnaie, mais pas des pièces commerciales, non, des pièces archéologiques. J’avais l’esprit de collectionneur dans le sang.»

Plus tard, des études d’architecture renforcent son amour des belles choses. «C’est le cadeau de mariage de mon frère, des gravures originales suisses, qui a déclenché notre envie, à ma femme et à moi, de collectionner des œuvres d’art.»

Au début, ils n’avaient que quelques milliers de francs par année pour acheter de l’art. «Aujourd’hui, je dépense beaucup plus. De temps en temps, je vends une œuvre pour pouvoir en acquérir une nouvelle et rester dans le mouvement», explique Hans Bollier.

Parfois, le soir, il parcourt son appartement et regarde ses œuvres. «Je vois toujours de nouvelles choses dans les tableaux, les sculptures. L’art est un défi de tous les jours.»

swissinfo, Susanne Schanda
(Traduction Ariane Gigon)

La Foire internationale d’art Art Basel est la plus grande et plus importante foire d’art moderne et contemporain du monde. Elle se tient du 4 au 8 juin.

Quelque 300 galeristes présentent les œuvres de 2000 artistes internationaux des 20 et 21e siècles.

Une carte journalière coûte 35 francs, l’entrée en soirée se monte à 15 francs.

La foire a été créée en 1970 par une équipe comptant notamment le collectionneur Ernst Beyeler. Elle a été dirigée par Samuel Keller jusqu’en 2007. Le jeune directeur avait créé une «filiale», Art Basel Miami Beach, en 2001.

Depuis 2008, la Foire est dirigée par Annette Schönholzer et Marc Spiegler.

Outre le programme principal, la Foire internationale d’art propose d’autres sections: Art Statements (jeunes artistes), Art Unlimited (très grands formats), Art on Stage (performances et théâtre), Public Art Projects (spectacles sur le place de la foire).

Les «Art Basel Conversations» (débats sur l’art) permettent d’entendre des spécialistes sur différents thèmes.

Art Basel présente aussi des films, des spectacles, des ateliers pour les enfants. Les incontournables fêtes sont aussi au programme.

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