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La Suisse s’affiche à la Mostra de Venise

«Jeux d’été», une rencontre signée Rolando Colla. SP

La 68e édition du festival international d’art cinématographique s’est ouverte le 31 août. Au programme, plusieurs films helvétiques dont «Jeux d’été» («Giochi d’estate») du réalisateur suisse Rolando Colla, présenté en première mondiale. Tour d’horizon.

«Tout un hiver sans feu», film de Greg Zglinski, marquait la présence de la Suisse à la Mostra de Venise, en 2004. Depuis cette date, la Suisse n’était plus allée à la Mostra. La revoilà cette année  sur la célèbre lagune, à l’occasion de cette 68e édition de la manifestation vénitienne qui démarre le 31 août.

Parmi les films projetés, il y a « Dialogischer Abrieb » de l’Alémanique Yves Netzhammer, un court métrage d’animation en images de synthèse. Il y a aussi « Il Vetturale del  San Gottardo », un mélodrame signé Ivo Illuminati et Hans Hinrich, qui relate la construction du tunnel du Saint-Gothard.

Sorti en deux versions, l’une helvétique (1941), l’autre transalpine (1942), « Il Vetturale… » vient d’être restauré, conjointement par la Cinémathèque italienne (Milan) et la Cinémathèque suisse (Lausanne). Frédéric Maire, directeur de cette dernière, a beaucoup œuvré pour ce travail en commun des deux institutions; comme il a beaucoup soutenu l’artiste italien Pippo Delbono, homme de théâtre et cinéaste très en vogue, qui présente à la Mostra (dans la section «Orizzonti») son nouveau film «Amore carne».

Filmer avec un téléphone portable

Artiste à la touche surréaliste et au style hybride, qui rassemble dans un même élan l’humanisme rebelle d’un Pasolini et la folie salutaire d’un Fellini, Pippo Delbono ne laisse jamais son public indifférent. Il peut irriter ou emballer. Il passionne en tout cas Frédéric Maire qui ne tarit pas d’éloges sur ce créateur singulier auquel il a offert une résidence d’écriture.

C’est donc à la Cinémathèque suisse que l’Italien a travaillé sur «Amore carne» dont les séquences ont été filmées dans différentes villes du monde. «Pippo Delbono s’y raconte autant qu’il raconte ses amis, sa mère, ses rencontres, précise Frédéric Maire.  Les inconnus croisent les figures de son théâtre, comme Bobò (un acteur sourd-muet, ndlr), et les visages des comédiennes Irène Jacob ou Marisa Berenson, de l’artiste Sophie Calle, de la danseuse étoile Marie-Agnès Gillot, du violoniste et compositeur Alexander Balanescu».

Tourné avec un téléphone portable, en lequel Frédéric Maire voit un outil de travail fascinant et «une voix à la fois plus intime et plus ouverte sur le monde», «Amore carne» est donc produit par la Cinémathèque suisse et par Casa Azul (Lausanne).

Un autre film, très attendu celui-là, figure dans la Sélection officielle (hors compétition) de la Mostra. Il s’agit de «Jeux d’été» («Giochi d’estate») de Rolando Colla, coproduit à 80% par la Suisse (Peacock Film, Zurich) et à 20% par l’Italie.

Déjà acheté par la France, l’Espagne, l’Allemagne et l’Autriche, ce long métrage est projeté en première mondiale à Venise. Très fier, Rolando Colla, réalisateur suisse d’origine italienne, confie: «C’est un honneur pour moi que de figurer dans la Sélection officielle avec les plus grands noms du cinéma mondial». Pour écrire son film, Colla est parti, comme il le dit, «d’une expérience de vie personnelle».

Les débuts violents de l’amour

Sur une plage de Toscane, deux adolescents d’une douzaine d’années se rencontrent lors des vacances d’été. Ce qu’ils vont découvrir, c’est leur univers intime respectif, et par-delà les prémices  de l’amour. Elle, la fille, vient de Genève. Lui, le garçon, d’Italie. Pour autant, la rencontre ici n’est pas celle de deux pays, mais de deux psychologies enfantines.

«Le moteur du film, c’est la violence du père transmise à son fils, explique Rolando Colla. Les parents du jeune garçon vivent une relation de couple conflictuelle face à laquelle l’adolescent a dressé un ‘rempart’ en se forgeant une deuxième personnalité. Il se convainc donc que pour ne rien ressentir il faut être un autre. C’est sa manière à lui de se protéger de la tension familiale. Mais c’est aussi un piège qu’il se tend».

En face de lui, une jeune fille plus équilibrée affectivement. Elle a d’abord du mal à comprendre le petit garçon qui se libère de ses traumatismes en faisant souffrir les autres par le moyen de jeux violents. Patiente et intelligente, elle finit par adoucir les mœurs de cet imprévisible compagnon d’été.

Dans un rire, Rolando Colla lâche: «Je ne veux pas me lancer des fleurs, mais je crois avoir réalisé là un film très sensible. J’ai travaillé durant une année avec les acteurs-enfants. Ce fut un bonheur».

Mostra de Venise (Festival international d’art cinématographique), 68e édition.

Du 31 août au 10 septembre 2011.

Né à Schaffhouse en 1957, de parents immigrés italiens.

Diplômé de la Faculté des Lettres de l’Université de Zurich, il est actif dans le domaine du cinéma depuis 1983, travaillant comme scénariste, réalisateur et producteur.

En 1984, il fonde une petite boîte de production Peacock Film.

Son œuvre cinématographique se caractérise par un engagement social et politique.

Il condamne notamment le durcissement de la loi sur l’asile en Suisse et dans les pays occidentaux.

A son actif, plusieurs films dont : «L’autre moitié», «Au-delà des frontières», «Le monde à l’envers»…

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