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La Toile pour les toiles de Jean-François Comment

L'une des ultimes toiles de Jean-François Comment, qui avait résolument opté pour le non figuratif.

L'œuvre picturale très riche du peintre jurassien, décédé en 2002, est désormais visible sur le Net. Elle est réunie dans un musée virtuel grâce à Bernard Comment, fils du peintre et écrivain. Interview.

Les cieux et les flots, il les avait à portée de pinceau. C’était sa manière à lui de dompter l’univers, ou plutôt de l’étreindre. «Vers le large», dit l’une de ses toiles quand trios autres chantent un «Hymne au soleil», inventent «L’arbre de mer» ou invoquent «Les trois ciels».

Largeur et hauteur de vue. Jean-François Comment cultivait donc l’une et l’autre. Pour s’en convaincre, il suffit d’aller sur le site: jfcomment.com. Soit un musée virtuel consacré au peintre jurassien et récemment créé par son fils Bernard Comment.

Très bien conçu, documenté et illustré, ce «musée» riche de 300 peintures à l’huile, de 200 aquarelles et de plusieurs dizaines de vitraux , annonce la création très prochaine d’une fondation dédiée à Jean-François Comment, décédé en 2002, à 83 ans.

Retour sur la vie artistique du peintre en compagnie de son fils Bernard.

swissinfo: Comment vous est venue l’idée de ce musée virtuel?

Bernard Comment: C’est l’écrivain français François Bon, un des pionniers dans le domaine d’Internet, qui m’a encouragé à créer ce site. L’œuvre de mon père est immensément riche. La reproduire dans un livre est donc impensable. Cela nécessiterait des milliers de pages et le livre serait impossible à commercialiser, question coût et volume.

Je me suis donc dit qu’un musée virtuel donnerait un avant goût de la fondation consacrée à mon père, qui sera prochainement mise sur pied. En attendant, le site permet de découvrir un maximum de pièces, sans restrictions et sans contraintes. Les visiteurs peuvent télécharger les images gratuitement. Il n’y a aucune finalité commerciale: pas de vente d’œuvres, pas de taxation non plus.

swissinfo: Pensez-vous que Jean-François Comment fût suffisamment honoré de son vivant?

B.C: Oui, absolument. La Confédération a d’ailleurs acquis plusieurs de ses tableaux, très beaux. Je ne pense pas qu’on puisse se plaindre de son destin. Il est vrai que son choix de rester et de travailler dans sa ville natale, Porrentruy, à laquelle il était très attaché, l’a en quelque sorte éloigné des circuits qui font les carrières internationales: Paris, Londres, New-York et même Zurich.

Mais bon, mon père avait un caractère entier, assez renfermé et au fond très orgueilleux. Il pensait que son œuvre devait se suffire à elle-même. En tout cas, il a su imposer son nom et a pu vivre de son travail.

swissinfo: A-t-il bénéficié d’une véritable reconnaissance à l’étranger?

B.C: Disons que l’essentiel de sa carrière s’est fait en Suisse. Ce qui ne l’a pas empêché d’être exposé en France, en Grèce, en Allemagne, en Italie et même à Hong Kong et au Japon.

swissinfo: Telle que présentée sur le site Internet, son œuvre révèle un éclectisme surprenant. Les influences artistiques sont multiples: Picassso, Degas, Derain…

B.C: Oui, c’est vrai surtout pour les quinze premières années de son travail pictural, disons tout ce qui relève de la période figurative. Après, on entre dans une démarche qui est quand même plus personnelle, moins figurative, et qui se caractérise par une quête de la lumière. Ou plus précisément par la vibration de la couleur, singularité de Jean-François Comment.

L’écran d’Internet restitue d’ailleurs très bien cette vibration. Je pense que si mon père avait vécu en France, on l’aurait aujourd’hui rapproché de Serge Poliakoff ou de Jean Bazaine, deux artistes du XXe siècle un peu méconnus.

swissinfo: Une fondation est prévue comme vous l’avez dit. Quand et où prendra-t-elle place?

B.C: Je ne peux pas vous donner de date exacte, mais ce sera dans les prochaines semaines, à Porrentruy, bien sûr, ville natale de mon père. Nous avons trois lieux en vue: la maison Turberg, autrefois occupée par un artiste, les anciens entrepôts de la Coop ou alors les combles de l’Hôtel Dieu.

swissinfo, Ghania Adamo

Peintre, aquarelliste, graveur et créateur de vitraux, Jean-François Comment (1919-2002) est né à Porrentruy.

Après des études à l’Université de Bâle et à la Kunstgewerbeschule, il revient s’établir définitivement dans sa ville natale.

Marqué par la deuxième guerre mondiale, il fonde le Kreis48 avec des amis bâlois.

En 1950, il s’engage dans la création de l’Institut jurassien des arts, des lettres et des sciences.

Pour son travail, il entreprend de nombreux voyages dans le Sud où la lumière qu’il découvre influencera durablement sa peinture.

Sur le site Internet qui lui est aujourd’hui consacré, on peut voir ses œuvres sur papier et sur toile, ainsi que les vitraux qu’il a réalisés pour des églises et pour l’hôpital de Porrentruy.

Le site contient également des archives filmées et une photo-biographie de l’artiste très détaillée.

Bernard Comment est né en Suisse en 1960.

Auteur d’une dizaine de livres, il est aussi le scénariste de quatre films avec Alain Tanner (Fourbi, Requiem, Jonas et Lila à demain et Paul s’en va) et co-réalisateur d’un docu-fiction (Le pied dans la fourmilière).

Editeur chez Denoël entre 1998 et 2001, il est directeur de la fiction à France Culture de 1999 à 2004 puis directeur de la collection Fiction & Cie aux éditions du Seuil.

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