Pierre de Meuron: «Non, la Suisse n’est pas moche», mais «il y a beaucoup» d’erreurs architecturales
A 74 ans, l'architecte star Pierre de Meuron n'a pas fini d'ériger les bâtiments de demain. Avec son binôme de toujours, Jacques Herzog, il a conçu à Bellevue (GE) le nouveau siège de la banque Lombard Odier, qui sera prêt en 2025. Invité de la Matinale, il se confie sur sa vision de l'urbanisme en Suisse romande.
«Non, la Suisse n’est pas moche» répond très sérieusement Pierre de Meuron quand on lui demande son avis sur la Suisse «hideuse» qu’avait dépeinte la NZZ dans un long article cet été.
Face à ce «titre accrocheur», il faut faire la part des choses, estime le Bâlois qui a fondé avec son ami d’enfance Jacques Herzog le bureau d’architecture Herzog et de Meuron, devenu mondialement célèbre.
La liste des réalisations de l’agence est en effet bien longue et prestigieuse. On leur doit, entre autres, la transformation et l’agrandissement du musée Tate Modern à Londres, le stade national de Pékin et les deux tours Roche à Bâle, dont le plus haut gratte-ciel de Suisse (205 m).
Bientôt, un premier bâtiment signé Herzog et de Meuron verra le jour en Suisse romande: le siège social de la banque Lombard Odier, dans le canton de Genève. L’inauguration est prévue en 2025.
Si ce grand vaisseau se veut «avant-gardiste», «élégant» et «durable», comme le vante le groupe sur son site, ce soin n’est pas pour autant apporté à toutes les nouvelles constructions dans notre pays, juge le célèbre bâtisseur.
Quand la rentabilité prend le dessus
La Suisse n’est pas «moche», certes, mais «il y a beaucoup» d’erreurs architecturales, notamment «dans les villes et les zones périurbaines», admet Pierre de Meuron. Il développe: «à mon avis, il y a parfois un trop grand effort pour la rentabilité», au détriment du «soin apporté à la qualité architecturale».
La star de l’architecture tient à souligner que «la qualité architecturale» ne coûte pas forcément «plus cher». Pour ce dernier, il s’agit surtout «de faire le mieux possible avec les moyens à disposition».
Et que pense-t-il du mitage du territoire, aujourd’hui de plus en plus dénoncé? «Il faut faire attention que cela n’aille pas encore plus loin», explique-t-il en ajoutant qu’«il faut prendre conscience que le développement urbain ne peut pas se faire sans limites et n’importe comment».
Le septuagénaire va-t-il encore longtemps vivre de cette «passion» du beau? «Tant que j’aime faire ça» et qu’il y a une envie «de travailler avec moi… avec nous, je le ferai», assure Pierre de Meuron. Ce qui est certain, c’est qu’il prendra la décision de partir à la retraite de concert avec son acolyte Jacques Herzog. Ainsi que sa femme et sa famille.
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