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Au Tessin, une fenêtre artistique sur le monde

Fenêtre avec ombre, une installation de Giuseppe Uncini (1968). finestrasulmondo.ch / Giuseppe Uncini

La fenêtre, l'un des sujets les plus fascinants et significatifs de l'histoire de l'art occidental, fait l'objet d’une grande exposition qui vient de s'ouvrir à Lugano. Organisée en collaboration avec la Fondation de l’Hermitage, elle réunit plus de 200 œuvres, de la Renaissance à nos jours.

L’exposition a ouvert ses battants dimanche en parallèle dans les deux musées d’art de la ville de Lugano. C’est la première fois que les deux institutions, dirigées par Marco Franciolli, unissent leurs forces. «Il s’agit d’une étape significative vers la réalisation d’un musée unique avec l’ouverture du centre culturel LAC (Lugano Arte Cultura) prévu pour l’automne 2014», affirme  Giovanna Masoni-Brenni, en charge du dicastère des affaires culturelles de la ville de Lugano.

Le parcours, «avec la fenêtre comme fil rouge de 1400 à nos jours», comme l’a souligné Marco Franciolli, démarre du Musée d’art de Lugano avec les oeuvres des grands peintres de la Renaissance jusqu’au siècle dernier et se poursuit au Musée cantonal d’art  avec les auteurs – photographes, sculpteurs et  graphistes  – contemporains.

Au siège du Musée d’art, dans la superbe corniche de la Villa Malpensata, «la fenêtre, pour les peintres de la Renaissance notamment, se veut un point de départ pour l’organisation du paysage sur la base d’une perspective qui mesure précisément le temps», explique Marco Franciolli. Il cite à l’appui de ses dires Leon Battista Alberti, Albrecht Dürer, Lorenzo di Credi ou encore Pieter de Hooch. Ainsi, dans la gravure sur cuivre d’Albrecht Dürer, la fenêtre imposante et quadrillée est l’élément principal de l’oeuvre même si elle ne reflète aucune ouverture vers l’extérieur.

En revanche, dans La Dame au jasmin, tableau de Lorenzo di Credi peint vers 1490, la fenêtre, tout en restant à l’arrière-plan, donne sur un paysage bucolique haut en couleurs et assume autant d’importance que le modèle lui-même.

René Magritte, de Lugano à Madrid et retour

Pour les romantiques du 19e siècle, en revanche, «la fenêtre s’ouvre sur le monde, devient un seuil au-delà duquel se penchent des personnages tournés vers l’univers du dehors, un univers à la fois désiré et craint», comme l’explique Marco Franciolli. Parmi les impressionnistes et post-impressionnistes, Claude Monet l’esquisse à peine dans son huile sur toile Un coin d’appartement, réalisée vers 1875.

Puis, au cours du 20e siècle, la fenêtre assume toute une série de significations et de rôles, au fil des changements survenus dans les langages de l’art dès le début de cette époque. Ainsi, Pierre Bonnard l’ouvre toute grande Sur la Seine à Vernonnet (1912), Piet Mondrian la limite à une Composition géométrique au centre d’une façade bleue (1914), Paul Klee dans son aquarelle et gouache peinte en 1923 l’utilise pour jeter un Regard sur une île de la Mer du nord tandis René Magritte lui fait prendre La clé des champs en 1936.

A noter que cette huile sur toile, prêtée par le Musée Thyssen-Bornemisza de Madrid, se trouvait jusqu’au début des années ’90 à la Villa Favorita de Lugano, ex-pinacothèque de renom et demeure du baron Hans-Heinrich Thyssen-Bornemisza, décédé en 2002.

Prochainement à Lausanne

Au centre de Lugano, le siège du Musée cantonal d’art accueille la partie plus moderne de l’exposition avec des oeuvres d’art contemporain, notamment des photos, gravures, modelages et sculptures. Cette seconde étape du parcours illustre aussi «le rapport dynamique de l’artiste avec la fenêtre», comme le relève le professeur milanais d’histoire de l’art, Giovanni Iovine, l’un des trois commissaires de l’exposition avec Marco Franciolli et Sylvie Wuhrmann, directrice de la Fondation de l’Hermitage de Lausanne.

Présente à Lugano pour l’ouverture de la double exposition, Sylvie Wurthmann n’a pas caché sa satisfaction pour cette «première collaboration» avec les musées de Lugano. «Cette exposition arrivera sur les hauteurs de Lausanne en janvier 2013. C’est un nouveau défi pour notre fondation qui, de par sa position privilégiée, se veut à elle seule une fenêtre ouverte sur la ville, la cathédrale et les Alpes.» La directrice de la fondation lausannoise a qualifié d’excellent le travail accompli aux côtés de Marco Franciolli et de Giovanni Iovine.

«A Lausanne, où l’exposition sera concentrée dans un seul lieu, nous devrons réduire le nombre d’oeuvres et les limiter à celles du 19e siècle», a souligné Sylvie Wurthmann, qui a évoqué un «thème fascinant» et une «merveilleuse opportunité» pour la Fondation de l’Hermitage.

Ouverte le 16 septembre au Musée d’art et au Musée cantonal d’art de Lugano, l’exposition Une fenêtre sur le monde – de Dürer à Mondrian et au-delà présente 200 oeuvres de 114 artistes, de la Renaissance à nos jours, centrées sur le thème de la fenêtre, un des sujets les plus fréquents de l’histoire de l’art occidental et symbole aux nombreuses significations.

 

Les peintures, photographies, gravures, sculptures et autres moulages proviennent de musées suisses et internationaux ainsi que d’importantes collections privées.

 

Organisée par sections, l’exposition est articulée en deux parcours. Elle démarre au Musée d’art de la ville de Lugano, au bord du lac, avec des oeuvres de la Renaissance au 20e siècle, pour aboutir au Musée cantonal d’art, au centre-ville, qui présente les oeuvres contemporaines.

 

Placée sous la patronage d’Alain Berset, ministre de la Culture, l’exposition se tiendra jusqu’au 6 janvier 2013. Elle prendra ensuite le chemin de la Fondation de l’Hermitage de Lausanne qui en présentera une version redimensionnée.

 

A Lugano, le public pourra admirer des oeuvres d’Albrecht Dürer, Lorenzo di Credi, Pieter de Hooch, Claude Monet, Henri Matisse, René Magritte, Pierre Bonnard, Piet Mondrian, Ferdinand Hodler, Giorgio de Chirico, Paul Klee, Marcel Duchamp, Giuseppe Uncini, Hiroshi Sugimoto ou encore Jeff Wall, pour ne citer que le photographe le plus coté.

Aujourd’hui regroupés sous la direction de Marco Franciolli, le Musée d’art de la ville de Lugano – ex-musée contemporain d’art Villa Malpensata – et le Musée cantonal d’art sis au centre-ville vont devenir un musée unique.

Le projet de fusion a été accepté le 5 septembre dernier par les autorités luganaises. Le musée sera englobé par le nouveau centre culturel de Lugano, baptisé LAC (Lugano Arte Cultura). En phase de construction sur l’emplacement de l’ex-hôtel de luxe Palace, fermé en 1969 et resté à l’abandon jusqu’à son rachat par la ville de Lugano il y a quelques années, le LAC, qui aurait dû ouvrir ses portes au printemps 2013, ne sera pas inauguré avant l’automne 2014.

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