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Globalement, la démocratie se porte mieux, mais elle fléchit en Suisse

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Manifestation à Moutier après l’annulation du vote de rattachement au canton du Jura. Ici l’enjeu était très émotionnel, mais sur d’autres sujets, les Suisses ne sont pas nombreux à se mobiliser, y compris pour aller aux urnes. © KEYSTONE / JEAN-CHRISTOPHE BOTT

En 2018, la participation politique en hausse dans le monde a contrecarré le recul de la démocratie, selon le dernier indice de la démocratie de l’Economist Intelligence Unit (EIU). La Suisse a chuté au classement, en grande partie à cause de la faible participation électorale.

Le recul tant annoncé de la démocratie dans le monde a été, sinon stoppé, du moins «mis en pause» l’année dernière, selon le dernier indice de d’EIULien externe, publié mercredi.

Contredisant différents rapports récents qui annonçaient la fin de la démocratie libérale et des droits civils, le magazine basé à Londres écrit que si la démocratie a reculé dans 42 pays, elle a progressé dans 50 autres, le score global restant finalement stable.

Le principal facteur qui a aidé à mettre fin à trois ans de recul a été un net progrès dans la catégorie «participation politique». Les niveaux de participation, d’affiliation aux partis, d’engagement avec les médias et d’alphabétisation des adultes sont tous en hausse.

A part au Proche-Orient et en Afrique du Nord, la participation politique a augmenté dans toutes les régions du monde, souvent en raison d’une grande méfiance à l’égard des gouvernements. L’engagement citoyen massif dans les élections de mi-mandat aux Etats-Unis en sont un signe clair, note l’EIU. Les niveaux historiques de participation des femmes suggèrent également que la démocratie n’est pas lentement en train de mourir.

La Suisse recule

Cependant, et c’est peut-être une surprise, la Suisse, avec ses votations fréquentes et ses initiatives populaires, enregistre sa plus mauvaise performance justement dans cette catégorie «participation» – une des cinq qui constituent l’indice, avec les processus électoraux, le fonctionnement du gouvernement, la culture politique et les libertés civiles.

Avec un score de 7,78 en participation, la Suisse devance légèrement les Etats-Unis, mais reste loin de la Norvège, championne incontestée avec une note parfaite de 10. Au classement général, la Norvège est également en tête, suivie de l’Islande et de la Suède. La Suisse perd un rang et se retrouve 10e, alors que les Etats-Unis sont 25e.

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Cette baisse de la Suisse dans les dernières années est surtout due aux faibles taux de participation aux scrutins, explique Danielle Haralambous, analyste en chef à l’EIU pour le Royaume-Uni et l’Europe.

Bien que le pays obtienne de bons résultats sur de nombreux aspects de la participation politique, des femmes au Parlement à l’inclusion des minorités, la «fatigue des votants» due à de si nombreuses consultations (sur des sujets souvent complexes) l’a conduit à prendre du retard sur d’autres pays qui continuent à s’améliorer sur ce front, note l’analyste.

En deux mots, alors que ses instruments de démocratie directe font monter le score de la Suisse, le manque d’engagement lors des votes le tire vers le bas.

Sur mesure

Bruno Kaufmann, correspondent de swissinfo.ch pour la démocratie globale, affirme que la méthodologie de l’EIU est trompeuse. Selon lui, c’est une erreur de comparer régulièrement des pays comme la Suisse – où les gens votent généralement quatre fois par année, le plus souvent sur plusieurs sujets – et la Suède, où les citoyens ne sont appelés aux urnes qu’une fois en quelques années.

Le tableau qui en résulte, «basé sur une moyenne entre des pommes et des poires, est une image quantitative superficielle pour les politologues», juge Bruno Kaufmann.

En effet, bien que la participation électorale moyenne en Suisse soit relativement basse (moins de 50% pour les votes nationaux), la plupart des experts s’accordent à dire que ceci reflète la fréquence et la complexité des objets présentés. Mais cette faible participation ne nuit pas à la qualité démocratique des résultats.

Bruno Kaufmann note également que si la Norvège est première de classe en participation grâce au fort engagement dans des groupes comme les syndicats et les organisations civiques, la participation à des processus spécifiques à la Suisse comme la récolte de signatures pour les initiatives et les référendums n’est pas prise en compte dans les notes de l’EIU.

Ainsi, d’autres indices, qui adoptent une approche plus large pour mesurer la performance démocratique, donnent d’autres classements. C’est notamment le cas de celui de l’Institut suédois V-DemLien externe, où la Suisse est 4e, ou de la Fondation BertelsmannLien externe, qui la classe 6e.


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(Traduction de l’anglais: Marc-André Miserez)

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