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Des étrangers pour muscler l’électorat genevois

Keystone

Pour la première fois, quelque 75'000 étrangers vivant à Genève auront la possibilité de participer aux élections municipales de dimanche.

La décision de donner le droit de vote aux étrangers vivant en Suisse depuis plus de huit ans a permis d’augmenter l’électorat local de plus d’un tiers, à 290’000 personnes.

L’immense population étrangère de Genève a obtenu le droit de vote lors d’un scrutin historique en avril 2006. Ici, les étrangers constituent près de 40% de la population (445’000 personnes) du canton, alors que le reste de la Suisse en compte 20%.

L’initiative «J’y vis, j’y vote», donnant aussi aux étrangers le droit de lancer et de signer des initiatives populaires et des référendum, a été soutenue par une petite majorité de l’électorat. Une autre proposition, autorisant les étrangers à se présenter aux élections locales, a par contre été rejetée.

«Notre identité nationale a changé depuis cinquante ans et cela implique que nous intégrions mieux les étrangers», déclare Guy Mettan, défenseur des deux initiatives.

«L’idée d’accorder le droit de vote après huit ans est une façon de les intégrer dans le système politique suisse», ajoute-t-il à swissinfo.

Un droit mérité

Guy Mettan, qui est à la tête du groupe démocrate-chrétien (PDC, centre droit) au Parlement cantonal, ajoute que les étrangers qui «paient des impôts, envoient leurs enfants à l’école et participent au développement économique du pays» méritent d’avoir le droit de vote.

Dimanche, les élections ont lieu dans les 45 communes du canton, avec plus de 1700 candidats en lice pour pourvoir 896 sièges.

L’année dernière, le bureau électoral du canton a envoyé une brochure d’information à tous les étrangers remplissant les conditions pour leur notifier leur droit de vote. Ils ont également été invités à des soirées d’information dans leur commune de résidence.

Les quelque 35’000 personnes travaillant pour les organisations internationales basées dans le canton, comme les Nations Unies, devaient s’inscrire auprès des autorités cantonales pour être enregistrés sur les listes d’électeurs.

Pas de points de comparaison

Pour Patrick Ascheri, responsable du bureau électoral, il est difficile de prévoir combien de nouveaux électeurs vont se rendre aux urnes dimanche. «Comme c’est une première à Genève, nous n’avons pas de points de comparaison, indique-t-il. Mais la première élection ouverte aux étrangers du canton de Vaud avait enregistré une participation d’environ 20% d’entre eux.»

La plupart des partis se sont empressés de solliciter ces nouveaux «citoyens». Carole-Anne Kast, du Parti socialiste, indique que des brochures en huit langues leur ont été distribuées sur les stands électoraux des communes.

De son côté, Guy Mettan relève que le PDC a invité les électeurs étrangers à des «soirées spaghetti» pour leur transmettre son message.

Changer le paysage politique?

Pour Guy Mettan, il est difficile de dire si les votants étrangers ont le pouvoir de modifier le paysage politique genevois, surtout du fait que personne, à ce stade, ne sait s’ils penchent plutôt à gauche ou à droite – ou simplement s’ils vont se rendre aux urnes.

L’Union démocratique du centre (UDC, droite nationaliste), qui avait fait campagne contre l’octroi du droit de vote aux étrangers, indique de son côté qu’elle n’a pas fait d’effort particulier pour plonger dans ce réservoir particulier d’électeurs.

«Le parti n’a rien fait, déclare Eric Bertinat, membre du parlement cantonal. Nous avons décidé que, puisque les étranger ont désormais le droit de vote en Suisse, nous les traiterions comme des Suisses.»

Gillian, 61 ans, (ne désire pas donner son nom complet), fera partie de ceux qui voteront pour la première fois à Genève, et même pour la première fois de sa vie. Elle avait quitté la Grande-Bretagne avant sa majorité et n’a donc jamais eu l’occasion de participer à un scrutin.

Pour elle, le plus difficile est de savoir pour qui voter. Dans sa commune de Meyrin, il y a plus de 80 candidats en lice pour 31 sièges. «Je n’ai jamais vraiment suivi la politique locale puisque je n’avais pas le droit de vote. Mais je pense que, si on nous a donné cette chance, il faut jouer le jeu. La question est: pour qui?»

swissinfo, Adam Beaumon à Genève
(Traduction de l’anglais: Isabelle Eichenberger)

Les étrangers qui résident depuis un certain nombre d’années ont le droit de participer aux scrutins locaux dans les cantons de Neuchâtel, Jura, Fribourg, Vaud et Genève.

Dans les cantons du Jura, Vaud et Fribourg, les étrangers peuvent se présenter aux élections locales.

La situation est très différente en Suisse alémanique. Seuls quelques communes des cantons d’Appenzell Rhodes extérieures et des Grisons autorisent les étrangers à voter.

Les conseillers municipaux sont élus pour quatre ans et leur nombre est proportionnel au nombre d’habitants de la commune. A Gy, 9 sièges sont en jeu, et 80 en ville de Genève.

Les conseils municipaux sont amenés à prendre des décisions dans les domaines budgétaire, territorial et des constructions mais ne peuvent amender des lois cantonales ou fédérales.

Les communes genevoises de moins de 800 habitants (il y en a 6) élisent leurs conseils à la majorité simple. Les 39 autres sont soumises au système de la représentation proportionnelle.

Plus des 38’000 étrangers résidant dans les communes de la ville de Genève, Chancy et Lancy, ont déjà eu une première expérience électorale en votant sur des sujets locaux en octobre dernier.

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