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Des miettes pour les créanciers

15 000 créanciers ont élevé des prétentions contre l’ex-SAirGroup. Keystone

Les créanciers de SAirGroup se retrouvent, mercredi à Zurich, pour se prononcer sur la suite de la procédure concordataire. Ils devront se contenter de miettes.

15 000 créanciers ont élevé des prétentions contre l’ex-SAirGroup. Et 2000 d’entre eux sont attendus mercredi au Kongress Haus de Zurich.

C’est, en l’occurrence, la plus grosse procédure de sursis concordataire de l’histoire économique suisse. La plus compliquée aussi.

Employés, retraités, banques, investisseurs, fournisseurs, filiales étrangères: tous se retrouvent au nombre des victimes de la débâcle de Swissair.

Les prétentions de créances se montent à plus de 38 milliards de francs, uniquement pour SAirGroup, la holding du groupe. Et même à plus de 70 milliards de francs, si on y ajoute SAirLines et Flightlease.

Or, du côté des actifs de SAirGroup, on ne trouve qu’à peine 1,6 milliard de francs.

Et tous les créanciers ne sont pas logés à la même enseigne. Les employés notamment doivent être parmi les privilégiés, pour un montant correspondant aux 6 mois de salaires précédant le début de la procédure.

Ils tombent dans la première catégorie prévue par la loi. Leurs prétentions devraient donc être satisfaites à 100%.

Des créances contestées

Mais ce n’est pas le cas du gros du paquet, qui forme des créances de 3e classe. D’un total de plus de 37 milliards de francs, ces dernières sont largement contestées par SAirGroup – qui ne reconnaît même pas un tiers d’entre elles.

Parmi ces créanciers-là, on trouve notamment les prétentions d’anciennes filiales du groupe.

A elle seule, l’ex-compagnie belge Sabena réclame pas moins de 8,2 milliards de francs. L’ardoise de l’Etat belge se monte à 800 millions de francs. Et celle de la compagnie française Air Lib à près de 500 millions de francs.

Des poids lourds, donc. Et, comme le relève Walter Stoffel, «plus ils seront payés, moins les autres recevront».

Et ce professeur de droit de l’université de Fribourg d’ajouter: «Les créanciers sont en concurrence et il est certain qu’il y aura à ce propos des discussions».

Tout dépendra de la suite de la procédure. Mais il est déjà sûr que l’ensemble des créanciers de 3e classe ne recevront que des miettes.

Si aucune des créances contestées n’est retenue, ils toucheront au mieux un dividende de 12%. Et, au pire 4%, soit 4 francs sur une créance de 100 francs.

Quelles responsabilités?

Sans doute, de quoi mettre certains créanciers de méchante humeur. La réunion de Zurich pourrait bien s’en faire l’écho.

Cela dit, les créanciers vont avant tout devoir se prononcer sur le projet de concordat. Et ils devront également élire les organes de liquidation.

Karl Wüthrich, le commissaire qui a mené la procédure jusqu’ici, est candidat au poste de liquidateur. En présentant son rapport, il devrait d’ailleurs évoquer la question des responsabilités des acteurs de l’affaire Swissair.

«Concernant d’éventuelles plaintes contre la direction, précise Filippo Beck, il annoncera trois domaines dans lesquels les recherches vont se poursuivre.»

«Mais, ajoute l’associé de Karl Wüthrich au sein de l’étude Wenger Plattner, il n’est pas question de désigner des coupables.» Filippo Beck n’exclut toutefois pas l’idée d’une plainte contre les anciens responsables de SAirGroup.

«Cela dépendra des résultats de l’enquête d’Ernst & Young, admet-il. Ce sera au liquidateur de décider. Si il choisit de ne pas porter plainte, les créditeurs pourront alors le faire.»

Des années de procédure

On est d’ailleurs très loin de l’épilogue. Après le vote de mercredi, les créanciers pourront encore donner leur accord par écrit. Et le concordat devra encore recevoir l’aval de la justice. C’est ensuite, seulement, qu’il pourra être exécuté.

Et, à ce moment là, de gros problèmes pourraient survenir. «Un certain nombre de créances seront contestées par SAirGroup ou par d’autres créanciers», explique Walter Stoffel.

«Des procédures judiciaires seront alors nécessaires, ajoute le professeur fribourgeois. Elles pourraient être relativement nombreuses et complexes, ce qui signifie que tout cela va durer encore certainement quelques années.»

swissinfo

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