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Des ONG suisses demandent la restitution des narcodollars de Montesinos au Pérou

Vladimiro Montesinos fait toujours la une de l’actualité péruvienne. Keystone

Les principales organisations suisses de coopération au développement applaudissent à la célérité mise par le gouvernement à empoigner l´affaire Montesinos. Mais, disent-elles, l´intégralité des fonds retrouvés et bloqués doit être restituée au Pérou.

Le 3 novembre, l’Office fédéral de la justice annonçait le blocage de comptes bancaires attribués à Vladimiro Montesinos Torres, ancien chef des services péruviens de renseignement, soupçonné de blanchiment. Ces fonds, d’un montant de quelque 50 milliards de dollars, avaient été localisés dans trois banques zurichoises.

Il faut dire que ce personnage fait depuis quelque temps déjà la une de l’actualité péruvienne. Filmé en train de corrompre un député de l’opposition, il s’est enfui, soupçonné entre autres d’avoir dirigé des escadrons de la mort et de tremper dans des affaires de trafic d’armes et de drogue.

Pas plus tard que le week-end dernier, un magazine péruvien publiait encore des révélations selon lesquelles le président Fujimori aurait accepté que Pablo Escobar, l’ancien «parrain» du cartel de Medellin, finance sa campagne électorale de 1989.

Si la Communauté de travail des organisations suisses de développement, mais aussi le Groupe de travail Suisse-Colombie et l’Action Place financière Suisse-Tiers-monde ont attendu dix jours avant de prendre position sur l’action menée par la justice suisse, c’est parce qu’elles voulaient d’abord connaître les réactions des ONG péruviennes avec qui elles ont des activités de partenariat.

Le blocage des comptes repérés à Zurich est une façon pour la Suisse, disent les organisations, de «permettre au Pérou de reprendre le chemin de la démocratie et de l’équité sociale après les sombres années de la tyrannie Fujimori. Ce pays a donc un urgent besoin d’argent; il est notamment en droit d’exiger que les fonds transférés de manière illicite sur des comptes bancaires étrangers lui soient restitués.»

La réflexion des organisations d’entraide va toutefois au-delà du cas Montesinos. Cela fait des années, rappellent-elles, que les milieux qui s’occupent de développement et de drogue demandent que les narcodollars ainsi récupérés soient consacrés, en Suisse, à des projets de prévention de la toxicomanie et, dans les pays où l’on cultive ces drogues, à des appuis aux communautés paysannes qui se cherchent des cultures de substitution.

Les organisations d’entraide contestent fortement l’habitude qu’a la Suisse – sauf quelques exceptions comme le canton de Genève – de mettre ce type d’argent illicite dans les caisses de l’Etat, sans aucune affectation particulière. Elles invitent donc le Conseil fédéral à élaborer un nouveau projet de loi tenant compte des aspects éthiques et politiques que comportent les affaires de blanchiment d’argent sale.

«Prenons l’exemple du tabac, explique Pepo Hofstetter, de la Communauté de travail des organisations d’entraide: une petite partie de l’impôt sur les cigarettes sert à financer des projets de prévention du tabagisme. Nous demandons la même chose pour l’argent de la drogue.»

Bernard Weissbrodt

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