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Drôle de nom pour un danseur

Le chorégraphe Frédéric Gafner - alias Foofwa - joue sur deux idées théoriquement antinomiques: la danse et l'immobilité. Keystone

Il s'appelle Foofwa d'Immobilité et pourtant... il tourne et bouge avec grâce. Sous ce nom de scène se cache Frédéric Gafner, chorégraphe et interprète genevois qui aligne les solos en ce début d'été. Genève, Barcelone, New-York... rien que ça. Rencontre.

Ne l’appelez pas Frédéric, il trouve ça rétro et prèfère Foofwa, ce prénom dada qu’il s’est choisi pour la scène et que l’on dirait sorti d’un manifeste des surrréalistes. «Foofwa, c’est léger comme l’air», dit-il. Foofwa d’Immobilité, donc. Eh oui ! il ne faut pas oublier le patronyme, lui aussi surprenant, d’autant que celui qui le porte est un danseur et un sacré sprinter.

Mais commençons par le commencement. Etat civil: Frédéric Gafner, marié à une danseuse américaine, né à Genève en 1969, d’une mère danseuse elle aussi, qui n’a pas étouffé son fils par sa passion artistique.

Fascination du sport

D’ailleurs Foofwa, aurait pu devenir footballeur, il aimait ça, le football, tout autant que la danse qu’il pratique depuis l’âge de 8 ans. «Ce qui m’émerveille, lâche-t-il, c’est la physicalité dans le sport. Lorsque celui-ci est bien exécuté, il peut avoir la grâce d’une chorégraphie».

Les champions pour lui, ce sont ceux qui savent dépasser le côté compulsif de leur métier et parviennent à laisser pénétrer dans leur jeu «une nonchalance positive».

Entendez, une manière de jouer les doigts dans le nez, un peu comme Roger Federer. Un peu aussi comme Foofwa. On ose la comparaison, qui ne déplaît pas à notre interlocuteur. Lequel sourit: «J’aimerais être comme Federer, un extra-terrestre».

La danse dans la rue

Il l’est sans doute à sa manière, Foofwa. C’est en tout cas ce que les Cairotes ont dû penser de lui en mars dernier, lorsqu’il traversa les rues du Caire sur un pas cadencé, habillé comme un joker. Un carnaval à lui tout seul qui fascina les habitants de la capitale égyptienne. Foofwa s’était alors livré à un sprint inédit, un corps à corps avec une ville qui d’habitude préfère le folklore pharaonique aux épopées individuelles.

Mais bon, cette course chorégraphiée avait son charme, plus exotique en tout cas que celui ressenti à Lyon, à Bologne, à Zurich, à Paris… où le danseur avait, par le passé, entrepris la même course -forcément moins enivrante- devant un public occidental plutôt blasé par les excentricités.

Les chorégraphies de rue font partie de l’univers aéré et aérien de Foofwa. Ses solos très demandés sont l’apanage du danseur qui se dit beaucoup plus habile dans les one-man-show que dans les spectacles de groupe.

Néo-minimaliste

«Il y a chez moi, explique-t-il, une pâte néo-minimaliste, épurée, que je revendique et que je préfère aux chorégraphies baroques et foisonnantes.

Le succès de mes solos vient de là sans doute: ils gardent un côté «produit non fini» qui attire. C’est pour cela qu’ils se vendent très bien sur les scènes locales comme dans les festivals internationaux.

Aussi, le programme de ces prochains jours est-il bien chargé pour Foofwa d’Immobilité qui interprétra «Quai du sujet» les 20 et 21 juin, à Genève, dans le cadre de la Fête de la musique. Et ce, avant de s’envoler pour New-York où il reprendra une de ses plus séduisantes pièces «Benjamin de Bouillis». Deux spectacles qui interrogent, chacun à sa manière, le statut de l’artiste-interprète, ses différents visages et son rapport avec le public.

Dans ce programme figure également une halte à Barcelone où Foofwa donnera «La Niña del Niño», un solo, là aussi, sur le réchauffement de la planète. «Une variation chorégraphique sur les variations climatiques», s’amuse à dire le danseur.

De quoi réjouir les écolos mais aussi quelques esprits surréalistes pour lesquels l’expression artistique n’est que la réinterprétation magique et inattendue du monde.

swissinfo, Ghania Adamo

De et par Foofwa d’Immobilité:
«Quai du sujet», Genève, Terrasse de l’Alhambra, 20 et 21 juin (dans le cadre de la Fête de la musique)
«Benjamin de Bouillis», New-York, Baryshnikov Art Center, du 26 au 28 juin
«La Niña del Niño», Barcelone, dans le cadre du festival Dies de Danza, 4 et 5 juillet.

Pseudonyme de Frédéric Gafner, né à Genève en 1969, fils de Beatriz Consuelo, danseuse étoile et directrice de l’école de danse de Genève.

C’est dans cet établissement qu’il suit, pour commencer, sa formation avant de danser pour le Ballet Junior de Genève.
En 1991, il rejoint à New-York la prestigieuse Merce Cunnigham Company et danse pour 14 de ses créations dont «Ocean», «Enter», «Scenario»…
Après avoir quitté la Merce Cunnigham en 1998, il s’établit à Genève et travaille pour son compte, créant ses propres spectacles.
En 2006, il reçoit le Prix Suisse de danse et de chorégraphie pour sa pièce «Benjamin de Bouillis».

Parallèlement à son travail de création, et en collaboration avec le chorégraphe vaudois Gilles Jobin, il donne aujourd’hui des cours de danse à Genève, dans le cadre de Geneva Sessions.
Il est invité régulièrement en Suisse et à l’étranger pour des stages de danse et d’improvisation.

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